(Billet 922) - Tebboune, l’homme qui veut régler le problème migratoire en asséchant la mer
« La marocanité du Sahara ne se discute pas, mais nous voulons que le monde sache quel type de voisin Dieu nous a assignés » disait le roi Hassan II dans un de ses discours. Un voisinage qui se crispe d’année en année, de décennie en décennie, qui va de mal en pis. Si, sous Boumediene et Chadli, l’antagonisme avec le Maroc était idéologique, avec un zeste de personnel, sous Bouteflika, c’était de la politique, mais sous Tebboune, nous sommes dans le loufoque, le burlesque, l’ubuesque, l’abracadabrantesque.
De l’éruptif et agressif Boumediene à l’impétueux et impérial Bouteflika, en passant par le taiseux et taciturne Bendjedid, l’éphémère car tué Boudiaf et les autres, l’Algérie a toujours eu des chefs d’Etat plus ou moins présentables, dotés d’un certain bon sens et d’une cohérence certaine. Aujourd’hui, l’Algérie est devenue une caricature d’Etat, un Etat dirigé par un homme qui ne figurerait même pas comme personnage secondaire dans des bandes dessinées de moyenne notoriété.
L’homme qui dit de Vladimir Poutine qu’il est « un ami de l’humanité » divague… l’homme qui a « fixé un délai de trois mois maximum pour utiliser l’énergie solaire dans certaines institutions et infrastructures de l’État, notamment dans les secteurs de la santé et de l’éducation » ne sait pas ce qu’il dit ne de quoi il parle… L’homme qui s’enorgueillit de relever la bourse des étudiants de 9 à 15 euros, dans un pays qui est le premier exportateur de gaz en Afrique… l’homme qui affirme qu’il a rompu les relations diplomatiques avec le Maroc pour éviter la guerre… l’homme qui ne cesse de jurer dans ses prises de parole… l’homme qui proclame à la face du monde, à l'ONU, que son pays dessalera 1,3 milliard de m3 par jour (peut-être l’objectif secret est-il de faciliter la migration en asséchant la Méditerranée)… l’homme dont la diplomatie insiste pour sasser et ressasser, au risque de lasser, que l’Algérie n’est pas partie prenante au Sahara mais dont les diplomates ne parlent que de cette histoire… l’homme qui ordonne à ses télés de ne pas prononcer le mot « Maroc » dans ses couvertures des matchs du Mondial 2022 au Qatar… l’homme qui reçoit Antony Blinken pour causer avenir et qui glose sur la guerre de 1963…
Cet homme qui ment comme il respire, qui respire comme il ment, est trop confiant en lui-même et ignore les réalités de ce monde et les
contraintes de son statut. Parler de la sorte en aurait fait un personnage dangereux s’il décidait vraiment aux destinées de son pays. Dieu merci, il y a l’armée, dont le chef est certes accusé de crimes contre l’humanité contre son propre peuple du temps de la guerre civile des années 90, mais l’armée est dirigée aussi par des officiers qui semblent connaître leurs limites.
Abdelmajid Tebboune se caractérise par une étrange forme d’intelligence, encore mal étudiée, qui dénie toute forme de pensée aux autres. Dans le cas contraire, il ne dirait pas autant de contre-vérités, voire de monstruosités, s’il avait la moindre once de commencement de considération pour l’intelligence des autres. Son peuple en premier. Mais qu’arrive-t-il donc à ce dit peuple pour accepter que son chef d’Etat, et par là-même que son Etat, devienne la risée des autres ? Une répression féroce qui annihile toute velléité de soulèvement, de re-Hirak ? Le syndrome de Stockholm d’un peuple envers son président ? Une immense indifférence ? Ou simplement de la résignation ?
Quelles que soient les raisons de cette passivité populaire, très certainement momentanée, le président Tebboune ne fait honneur ni à sa fonction, ni à son pays, et encore moins à lui-même, si tant est qu’il en ait la conscience.
Et avec son âme damnée Saïd Chengriha, omnipotent chef d’état-major, faucon de qualité remarquable, ils forment le duo des pieds-nickelés de la politique internationale. Ils ont tous deux la componction du pape et la pratique de Torquemada, même mentalité obsidionale à l’égard du monde, obsessionnelle envers le Maroc et la France, obtuse avec leur peuple… une caricature de système politique où les walis annulent des marchés et désignent d’autres adjudicataires durant les visites de chantiers, où les ministres sont suspendus aux décisions vagues de leur président mais comptables de détails dont personne ne les a entretenus, où il est interdit aux parlementaires de critiquer les ministres, où les juges sont au garde-à-vous assumé face aux militaires, où la lecture d’une quelconque cohérence ou clarté est impossible pour le meilleur des politologues…
En un mot comme en cent, la triste conclusion est celle-ci : le ridicule ne tue pas, donc M. Tebboune est toujours en vie, et chemin (mal)faisant, il est une honte pour son pays et, plus généralement, un danger pour son environnement. Le Russe Poutine et le Chinois Xi l’ont compris, le Français Macron ne l’a pas encore appris.
Aziz Boucetta