(Billet 850) - Remous et rumeurs au sein des écoles françaises au Maroc
L’enseignement français au Maroc a une longue histoire, aussi ancienne que cette chose appelée « l’indépendance » en 1956. Cet enseignement a été accompagné en parallèle par et dans le secteur public national qui prodiguait la plus grande partie de son enseignement en français, avant l’arabisation des années 80. Et ce sont deux générations de Marocains qui ont été façonnées à la « pensée » française. Depuis, il en va différemment.
Ce sont aujourd’hui près d’une cinquantaine d’établissements d’enseignement français qui prospèrent dans le royaume, avec environ 45.000 élèves dont les deux tiers sont marocains. C’est dire l’importance que revêt ce réseau et cet enseignement sur nos terres, et cela a ainsi fonctionné des décennies durant. Inscrire ses enfants à la « Mission » française était le vœu de plusieurs milliers de parents, à juste titre rebutés par l’offre nationale d’éducation.
Les Français ont, depuis des décennies, fait de leurs écoles une véritable « arme » entre leurs mains pour favoriser les uns, exercer des pressions sur d’autres, accepter les enfants de tel ou ignorer les demandes d’autres. Quant à l’aspect financier, et malgré les associations de parents d‘élèves et les prétendus conseils d’établissement qui abritent des représentants de ces associations, il était et demeure du seul ressort des décideurs français, qui vont jusqu’à actionner ce levier dans leurs négociations avec certains officiels marocains.
Aujourd’hui, et au-delà des questions financières, les parents sont devenus plus attentifs, de plus en plus vigilants quant à l’enseignement dispensé à leurs progénitures. Sur deux aspects essentiels, national et moral.
Ainsi, sur le plan national, on a constaté ces dernières années un nombre croissant de manuels comportant des cartes du Maroc amputées des provinces sahariennes, montrées soit avec les aussi fameux que funestes pointillés, soit dans une couleur différente de celle du Maroc septentrional, ou encore comportant la mention « Sahara occidental ». Et à chaque fois, il aura fallu des interventions viriles des autorités publiques marocaines pour interdire ces manuels. Il faut se poser la question – même si on devine la réponse – de savoir pour quelle raison ces manuels sont proposés aux jeunes Marocains, au défi de la souveraineté et de l’intégrité de leur pays. Cela
rejoint la « mission » non dite de ces établissements, en l’occurrence de maintenir et de pérenniser la « présence française » au Maroc, à travers une certaine forme d’acculturation de nos futures élites.
Par ailleurs, on relèvera que les écoles françaises à Laâyoune et à Dakhla, ne hissent aucun drapeau à leurs portes, à l’inverse des établissements situés dans les villes septentrionales. Un drapeau français porterait reconnaissance de la marocanité de ces provinces et un drapeau marocain aussi, et les Français refusent cela. Il est important que cela cesse. Si Paris ne veut pas reconnaître la marocanité des provinces du Sud, cela est son droit, mais il est de celui du Maroc d’interdire l’ouverture de tout établissement français « anonyme » dans ces deux villes.
Sur le plan moral, les établissements français font certes preuve de prudence quant à la promotion par leurs enseignants de « valeurs » admises en France mais plus généralement en Occident comme les questions de genre ou le « wokisme », mais certains enseignants peuvent déroger à la règle, soit dans leur comportement, soit dans des messages subliminaux véhiculés dans leurs cours, ainsi que le rapportent de plus en plus de parents d’élèves. Il convient de noter que les écoles des autres nationalités ne sont pas autant épinglées que les françaises mais une vigilance doit être observée sur la transmission des nouvelles « philosophies », voire « religions » qui nous viennent d’un Occident scruté désormais avec scepticisme, voire méfiance, dans le monde.
En attendant que l’éducation nationale soit au niveau requis par les nouveaux défis mondiaux, le Maroc aura encore besoin des écoles étrangères, dont les françaises. Il faudra cependant penser à faire jouer la concurrence/compétition étrangère en exigeant que seuls les programmes et cursus étrangers puissent être enseignés au Maroc, mais dans des établissements de droit marocain, détenus par des Marocains, avec des enseignants marocains, et en parallèle de l’enseignement de la langue, de l’histoire et, plus généralement, de la culture marocaines.
On éviterait ainsi un déracinement de nos jeunes et une mainmise étrangère sur ces futurs dirigeants car ces établissements, étrangers en général et français en particulier, sont une forme de cheval de Troie installé dans nos murs.
Aziz Boucetta