Zoom n°40 : lecture d’une crise (1ère partie)
Personne ne sait combien de temps durera la pandémie, combien de personnes tomberont malades, combien de vies le virus prendra. Mais ce qui émerge aujourd'hui, ce sont les conséquences économiques et politiques de la crise du coronavirus. Les mesures visant à contenir la pandémie perturbent la vie publique dans le monde et cela à tous les niveaux.
Avec le coronavirus, les chaînes d'approvisionnement mondiales sont brisées. Une vague de faillite atteint de nombreuses industries. La récession des économies est là, réelle et irréversible.
Le marché de l’or noir a été le premier aux abois. Au niveau mondial, les nouveaux conflits entre les grandes puissances alimentent encore plus la crise. La guerre des prix du pétrole entre l'Arabie saoudite et la Russie, en particulier, motivée par des motifs géo-économiques remet en question la survie du cartel de l'OPEP. Les conséquences immédiates ont entrainé la récession de toutes les places boursières mondiales.
La crise est un autre test de résistance pour le partenariat transatlantique déjà lourdement chargé atteint par des guerres commerciales tout azimut. La décision du président Trump d'isoler les États-Unis de leurs alliés européens sans consultation envoie un signal clair de sa détermination de « make America great again ». L’Europe de son côté est plutôt préoccupée par la résurrection des vieux démons de la division comme lors de la crise des réfugiés où l'Italie en particulier avait estimé que ses partenaires européens l'ont laissé tomber. Cette manque de solidarité a néanmoins permis à la Chine, qui a habilement profité du manque de solidarité européenne et a envoyé des avions d’aides destinées à plusieurs pays européens même en Afrique.
Le coronavirus a permis d’éclairer les fractures géopolitiques, économiques, idéologiques et culturelles de notre temps comme un projecteur. Cette nouvelle donne signale-t-elle une rupture d'époque? Rien n’est moins de nos jours, comme ce funeste virus qui mute
et met au défi scientifiques, politiques et autres.
Avec les mouvements Black Lives Matter, Extinction Rebellion, Génération identitaire et Gay Pride, tous ont repris du poil de bête juste après les premières mesures de déconfinement. A côté, l'ère de la turbo-mondialisation a pris un coup à cause de la crise.
Le coronavirus, c’est aussi les libertés individuelles qui ont été l’objet de débats et de craintes surtout le confinement qui a laissé émerger le questionnement de la limite des restrictions des libertés individuelles le temps l'état d'urgence. Mais cela bien évidemment n’avait qu’un objectif ralentir le rythme de propagation de virus. Mais on attendra la levée de restriction.
La crise du coronavirus est un gigantesque terrain d’essai. Des millions de personnes expérimentent de nouvelles façons d'organiser leur vie quotidienne. Les voyageurs d'affaires passent des vols aux vidéoconférences. Les professeurs d'université organisent des webinaires. Les employés travaillent à domicile. Certains retrouveront leurs anciennes habitudes après la crise. Mais beaucoup savent maintenant par expérience personnelle que la nouvelle façon de travailler fonctionne non seulement, mais est également plus respectueuse de l'environnement et de la famille. Nous devons utiliser ce moment de perturbation, l'expérience immédiate de la décélération pour générer des changements de comportement à long terme dans la lutte contre le changement climatique.
La crise a clairement montré aux citoyens que les choses ne pouvaient plus continuer comme avant. Le désir d'une réorganisation fondamentale de notre entreprise et de vivre ensemble n'a jamais été aussi grand. Dans le même temps, les menaces existentielles doivent être écartées sans restreindre de manière disproportionnée la démocratie et les libertés. Avec tout ce qui se passe durant cette crise, quelle force politique peut négocier les compromis sociaux nécessaires? Le politologue américain Sheri Berman semble trouver la réponse : « La social-démocratie peut sauver à nouveau le monde? » Abordons-le.
Mouhamet Ndiongue