(Billet 204) – Chaosablanca !

(Billet 204) – Chaosablanca !

C’est la plus grande ville du royaume et la plus riche, la plus prospère, la plus peuplée… et la plus anarchique. Peut-être pas la plus sale car en matière d’insalubrité urbaine, le Maroc est plutôt prometteur. Casablanca est une ville qui semble sans gestionnaire, entre un maire rébarbatif et un wali de région furtif. La ville de la tentation et de l’ostentation est devenue la ville de la tension et des frustrations, la ville des gares gigantesques mais où on ne peut plus se garer.

Selon les recensements officiels, Casablanca est peuplée de plus de 4 millions d’habitants, qui mangent, boivent, se déplacent, s’aiment, s’invectivent et produisent des déchets. Idéalement, une métropole comme celle-ci, doit disposer des meilleures infrastructures, sauf que… sauf qu’on est au Maroc, le pays où tout est bien possible mais où tout bien est souvent impossible.

Cela fait ainsi un tiers de siècle que la décharge communautaire de Casablanca a été ouverte, à ciel ouvert, mais aujourd’hui, on peine à la fermer, cette déchetterie aux allures de fin du monde où s’activent des gens en forme de zombies, dont un nombre impressionnant d’enfants. On avait parlé de sa fermeture, un jour prochain, un jour lointain, un jour incertain, mais voilà, on n’en parle plus. En revanche, de gros moyens seront mis dans la collecte des déchets, avec des engins par centaines, mais avec une issue toujours incertaine, malgré les paperasses et les papas... On verra bien !

Les bus, ces épaves sales, brinquebalantes, bruyantes, surtout polluantes, hantent encore et encore les Casablancais. La mairie, la Région, les responsables de tous poils se sont ensablés. Alors on promet et on s’engage, puis on renonce et les gens enragent. On sait travailler dans l’aéronautique et l’automobile, mais on est strictement incapable de gérer un service de transport en commun digne des Casablancais.

Bonne nouvelle, début...

novembre, un contrat est signé pour l’acquisition de 700 bus. Mais, coup de théâtre, mi-novembre, ce marché est annulé pour le motif très peu persuasif de « prix excessifs ». Anguille sous roche, raisons fantoches et responsables de tout cela sous cloche.

Les taxis, rouges, blancs, fonctionnent selon des règles qui sont les leurs et que le bon sens commun ne saurait accepter… Certains chauffeurs de ces engins ont des raisons que la raison ignore, que la police ignore aussi et que les usagers subissent. C’est comme cela et cela ne risque pas de changer.

Et le reste… Des ralentisseurs qui font la guerre aux amortisseurs mais aussi et surtout la joie des investisseurs dans le domaine… des camions de livraison qui remplissent leur office en plein jour, stationnant n’importe où, n’importe quand et peu importe le civisme… Très ennuyeux.

Mais si, au moins, on avait une belle ville… et bien non. Le centre-ville, avec ses immeubles anciens, historiques, est en train de s’effondrer face à la coupable et inégalable indifférence des édiles et autres ô fonctionnaires. Et pourtant, les Français ont laissé de beaux bâtiments, qui tombent en ruine, qui tombent tout court. On veut planter des arbres, et on ne pense qu’aux palmiers… sauf que ce ne sont pas des arbres, mais des « herbes géantes ». Pourquoi Casablanca n’est pas plantée de vrais arbres feuillus et imposants et parsemée de gazon vert et reposant, comme Rabat ou encore Tanger ?

Le seul bémol à ce calamiteux constat est la fluidité de la circulation. Depuis quelques mois, on roule mieux à Casablanca, plusieurs tunnels, pont et trémies ayant été ouverts. Cela ne saurait néanmoins faire oublier que Casablanca mérite tout simplement mieux que ses dirigeants actuels, et même passés, qui savent tant ouvrir les chantiers et leurs bouches mais ignorent comment les achever, ou simplement la fermer.

Aziz Boucetta