(Billet 66) – Benkirane donne sa langue au tchat
Depuis qu’il a (été) débarqué du gouvernement, ce funeste 15 mars 2017, l’ancien chef du gouvernement et du PJD Abdelilah Benkirane est un éternel énervé, en fulmination croissante. Contre tout, contre tous. Sa logique est simple : lui, il sait, les autres non. Et il le dit à qui veut l’entendre sur le web, le live et le tchat, où il est de plus en plus volubile pour déverser sa bile. Dernier exemple en date, sa langue déliée dans une vidéo sur les langues d’enseignement.
30 minutes d’imprécations improvisées, la mine sombre où il mêle les insultes contre Noureddine Ayouch, les attaques contre les autres partis, les sermons pour ceux qui furent les siens, les rappels historiques contre la France et les appels hystériques contre le français. Et si, pour être crédible, il doit tordre chouiya le cou à la vérité, qu’à cela ne tienne ! Et peu importe aussi que l’homme ait contresigné le dahir de création du Conseil supérieur de l’Education, où figurent nombre de gens du PJD. L’important, c’est la prose, l’important…
En réalité, la vie selon M. Benkirane se résume au credo suivant : soit ça passe comme je veux, soit je casse ce que je peux. Fin 2015, Benkirane avait guerroyé contre Rachid Belmokhtar, avant d’être recadré fissa par le Conseil de l’Education, puis royalement en conseil des ministres de février 2016. Mais en partant, dans les conditions peu glorieuses qu’on sait, M. Benkirane aura réussi la double prouesse de bloquer la loi-cadre sur l’enseignement et de ne rien faire,
ou presque, pour la loi organique sur les langues, qu’il devait pourtant déposer au parlement lors de son mandat, comme l’exige pourtant, et en arabe, l’article 86 de la constitution.
Finalement, l’Etat, ce n’est pas lui, mais le blocage de la loi sur l’enseignement, c’est bien lui… et il continue, en appelant dans son message vidéo éructant et gesticulant Saadeddine Elotmani à la démission et sa coterie PJD à la sédition. Lui, encore lui, toujours lui et surtout lui… Il fait une virée à Marrakech, avec ses gardes du corps et sa suite, en parlant à l’habitant, puis il conteste toutes les orientations des instances et institutions du pays… Monsieur l’Ex est à mi-chemin entre « انا وحدي نضوي لبلاد » et Benkiznogoud… Qu’il déroule sa violente bafouille anti-langues étrangères au lendemain du discours quadrilingue du roi devant le pape en dit long sur sa vision de lui-même.
M. Benkirane, à n’en point douter, s’aime à l’infini et sème la zizanie, faisant fi de la démocratie dans son propre parti. Mais est-ce sa faute si la compagnie des gens ordinaires l’ennuie, lui qui a jadis côtoyé les grands de ce monde ? Est-ce sa faute si sa vie spirituelle, forcément intense, l’incite à la prophétie, avec la mauvaise foi d’un jésuite ? Dans une vie antérieure, M. Benkirane a fait du bien à ce pays ; aujourd’hui, il a mal à lui-même et fait du mal autour de lui, toujours lui… Et à la longue, ses derniers fans vont comprendre !
Aziz Boucetta