Populisme et pouvoir, par Allal Akouri
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- 19 décembre 2016 --
- Opinions
Le populisme se manifeste lorsqu'on est en pleine campagne électorale, mais il faut savoir observer une retenue et rester dans certaines limites. Chercher à prouver que le concurrent présente des défaillances dans tel ou tel domaine est de bonne guerre, mais pas jusqu’à en arriver à l'invective, voire l'insulte et autres propos dégradants à se questionner sur la structure mentale du candidat à un poste de responsabilité.
Quelle est la part du "parlé vrai" et les propos insidieux et délibérés destinés à séduire son monde ? On cherche à vendre un programme, s'il en existe un, par des moyens qui sont loin de toute argumentation rationnelle.
Or, ce qui est plus grave est d’utiliser la religion à des fins purement et bassement matérialistes. En effet, les valeurs spirituelles sont normalement partagées par l'ensemble d'une communauté. Elles ne doivent pas être détournées au profit d'une mouvance ou toute autre organisation à des fins électoralistes et politiciennes. Mais on dira que la religion régit le comportement de l'être humain… certes, si c'est dans le sens des valeurs intrinsèques au Maroc, pays de tradition millénaire, le spirituel est intimement intégré dans la culture et la conception de la "oumma al wassat".
C'est dans la sérénité que la pratique religieuse s'est intégrée dans la vie culturelle du pays, qui a su, à travers des siècles, bâtir les assises d'un monde tolérant.
Le Maroc est un creuset où se sont fondus plusieurs courants civilisationnels qui ont contribué à atteindre cet équilibre, cette stabilité permettant de résister aux perturbations qui secouent le monde. C'est pour cela qu'il faut être vigilant et continuer, grâce à l'éducation, à sauvegarder cet acquis éminemment précieux.
Pour en revenir au populisme, il anime malheureusement plusieurs acteurs de la politique politicienne, hélas à travers le monde entier. Les populistes parviennent à séduire une frange de la population fragilisée culturellement et économiquement pour atteindre leurs objectifs, et surtout la captation du pouvoir. Ils concentrent leurs efforts de recherche d'un profit immédiat, loin de tout souci d'intérêt général. Leur conception est très éloignée d'une vision globale qui intègre des principes régissant la coexistence, le vivre ensemble, et permettant la compréhension de l'autre.
Au contraire, ils préconisent le conservatisme, le repli sur soi, l'exclusion de tout ce qui est étranger à leur vision étroite et chauvine. C'est une motivation mue par l'ego, et qui ne peut déboucher que sur des situations conflictuelles tant sur le plan national qu'à l'international.
En conséquence, on ne peut laisser ces charlatans persévérer dans leurs œuvres et ne pas contrecarrer leurs desseins, afin qu'ils ne progressent pas dans cette voie et qu’ils parviennent à hypothéquer l'avenir.
Ceci ne peut se réaliser que par un travail en profondeur en assurant à tout un chacun l'accès à l'éducation, la
santé et la justice. C'est un effort qui nécessite des moyens humains et matériels importants afin de se prémunir contre ce virus qui risque de fragiliser les structures et les fondements qui constituent l'assise de la communauté dans son ensemble.
Le monde ne doit pas devenir une grande arène où la politique politicienne sert des objectifs qui sont loin de servir l'intérêt général. Il ne faut pas encourager les irresponsables à jouer aux boutefeux avec tout ce que cela occasionne comme dégâts irréversibles.
Certes, le populisme peut être divertissant tant qu'il rappelle un théâtre de boulevard. Mais lorsqu'en en fait une armée insidieuse en cherchant à parvenir au pouvoir, il risque de déboucher sur l'inconnu. Car ces acteurs ne maitrisent guère la complexité des phénomènes sociaux culturels.
L'antidote consiste essentiellement à éduquer le citoyen dans le sens noble du terme. Il s'agit de former des têtes bien faites, aptes à agir d'une manière rationnelle et se comportant en responsables.
Enfin quand on prétend s'ériger en leader, il serait souhaitable de se comporter en responsable capable d'appréhender les difficultés qui surgissent. Car en principe ce sont les neurones qui nous amènent à réfléchir et éviter ainsi des comportements irrationnels mus par l'émotion (l'ego), en absence de toute retenue et sens de la mesure.
Il y a lieu de s'inquiéter lorsque l'extrémisme progresse et que les chantres du populisme surgissent dans des contrées censées être régies par des règles démocratiques et le verdict des urnes. Ils sont des apparitions sporadiques, des épiphénomènes, ou la révélation d'un profond malaise quant aux valeurs intrinsèques qui doivent régir le monde. Cette mondialisation qui a mené à la notion de village planétaire où il fait bon vivre, en apparence, a été dévoyée par les fous (du village) qui ont pris la liberté d'agir et ainsi d'accéder au pouvoir. Faut-il s'attendre à voir les tentacules de cette hydre tordre le cou à la raison et verser dans les travers qui risquent de mener n'importe quelle mesure extrême ? Allons-nous revivre la tension est-ouest ? Comment gérer le phénomène migratoire si on érige des murs aux frontières ? Au plan national, la problématique de l'enseignement : gratuité ou contribution d'une frange aisée de la société ?
Tous ces sujets sont traités non pas pour leur trouver une solution mais pour provoquer la polémique.
Quid du principe d'égalité devant régir la contribution de tout un chacun selon des règles conformes à la loi et non pas selon une vision étriquée, populiste ? Ceci risque de dresser les uns contre les autres, créer des tensions dont les conséquences ne serviront qu'à compliquer d'avantage les choses.
Encore une fois, la gouvernance ne doit pas se résumer à un slogan, mais impliquer les responsables et les rendre comptables de leurs actes.