Une icône du féminisme, par Fatiha Daoudi

Une icône du féminisme, par Fatiha Daoudi

Fatima Mernissi, une icône du féminisme marocain, a tiré sa révérence de ce monde où les femmes sont obligées de se battre au quotidien pour le moindre petit droit et même pour leur survie.

Elle n’a certes pas été la première féministe marocaine mais elle a été un jalon dans le combat par la plume et par l’argumentation pour déstructurer les idées sexistes longtemps défendues par la société marocaine. Elle a été le point de vue d’une femme sur les femmes à l’époque où les seuls féministes connus étaient des hommes.

Je garde de cette femme le souvenir d’un regard intense qui explore afin de comprendre la personne en face d’elle, le souvenir d’une femme à l’écoute, contrairement aux notoriétés du moment, toujours en mal de visibilité, et qui n’écoutent que leur voix et se gargarisent de leurs propos.

La disparition de cette dame est l’occasion de se demander si la situation des femmes au Maroc a changé depuis les années soixante-dix.  Le combat des femmes de la trempe de la défunte a-t-il abouti à une égalité en droits avec les hommes ?

La réalité est encore au combat pour les femmes malgré les avancées de certaines lois et au premier abord de l’apport de la constitution de juillet 2011, principalement de son article 19.

Les marocaines sont encore en attente de la mise en place de l’APALD, autorité qui devrait lutter contre les discriminations basées sur le sexe et promouvoir la parité dans les instances de prise de décision. En attendant, les femmes sont dans l’obligation de se battre pour la moindre petite place dans ces instances, ne serait-ce que pour les quotas imposés...

par la législation car de parité, que nenni !

Le seul changement notable est que le combat avec leurs adversaires hommes dans ces instances n’est plus franc et hargneux mais enrobé d’une amabilité mielleuse, et quand on leur demande pourquoi seulement une ou deux femmes, ils répondent le regard fuyant que ce sont les femmes qui ne veulent pas de responsabilité et, n’est-ce pas, qu’on ne va pas mettre des femmes que pour le principe de mettre des femmes ? Pour être dans les instances de responsabilité, les femmes doivent être capables de produire et de diriger !

Il ne leur vient pas à l’idée que la capacité de diriger n’a jamais été une exigence pour les responsables hommes, sinon on l’aurait su. Il ne leur vient pas aussi à l’idée que les femmes très capables fuient la responsabilité parce qu’elles en ont une plus grande quand elles rentrent chez elles et qu’elles doivent souvent l’assumer toutes seules ! Ceci pour la présence féminine dans les instances de décision.

Voyons voir la vie quotidienne… la femme est toujours victime de la violence des lois : la polygamie est encore de vigueur, sa part d’héritage est la moitié de celle de son frère. En cas de divorce, elle n’a droit qu’aux biens acquis pendant le mariage dont elle possède la preuve de sa contribution, elle n’a pas la tutelle juridique sur les enfants sous sa garde et la liste est longue ! Quant à la violence physique, elle en est victime dans l’espace public et privé.

Pour autant, le combat de Fatima Mernissi et des autres féministes marocaines n’a pas été vain puisque la situation de la femme s’est améliorée, même si elle est encore loin d’être idyllique !

Repose en paix Fatima, nous continuerons le combat !