Réflexions sur la  bataille entre islamistes et avorteurs, par Ahmed Raïssouni

Réflexions sur la  bataille entre islamistes et avorteurs, par Ahmed Raïssouni

Parmi les grandes questions – et batailles – qui ont actuellement cours à notre époque, je voudrais revenir sur celle de l’avortement. Certains ministères ont été bien inspirés d’organiser récemment des débats autour de ce thème. Mais en dépit de cette implication, voire intrusion, officielle dans la question de l’interruption de grossesse, rien ne changera dans la nature de la bataille ni dans celle des différentes positions en présence ; bien au contraire, l’antagonisme n’en est que plus grand et plus marqué entre les protagonistes.

Quels sont ces derniers ? On peut scinder les deux camps, globalement, entre celui des islamistes et celui des avorteurs.

Dans cet article, mon propos n’est pas d’aborder le fond de la question, tant sur le plan théologique que sur celui de la loi. Je me propose ici d’apporter simplement quelques réflexions en marge de cette bataille et de ses fondements.

1/ Je suis globalement partisan d’une révision législative – scientifique et rationnelle – des articles se rapportant à l’avortement dans le code pénal marocain, de même que, en gros, j’estime que l’interruption volontaire de grossesse peut tantôt être une obligation, tantôt un crime. Il existe d’autres cas où la discussion peut être ouverte, mais je laisserai là la parole aux théologiens et aux juristes, quelles que soient leurs positions, partant du principe général et fondamental qu’  « il ne faut négliger aucune voie ni aucun moyen d’effort jurisprudentiel » ; en effet, toute question étudiée, analysée et traitée par les scientifiques, les experts et les spécialistes ne pourrait in fine être que dans l’équilibre aussi rationnel qu’acceptable de l’ensemble du sujet. L’essentiel est de sortir de cette situation où une minorité nous domine depuis des générations.

2/ Dans cette bataille qui se tient aujourd’hui, nous avons ceux qui parlent de réglementation de l’avortement tout en la demandant, et nous trouvons d’autres qui l’évoquent à leur tour mais en la refusant ; or, en réalité, l’interruption de grossesse est déjà réglementée. En effet, le code pénal marocain consacre 10 articles à cette question (du 449 au 458), sans préjudice pour les amendements à venir. Réglementer une chose signifie la placer sous l’autorité de la loi, et c’est précisément le cas pour l’avortement qui est


donc, de fait, encadré par la législation ; il n’y a donc pas matière à réclamer cette réglementation, ou même à la refuser. Le problème, le véritable problème tient dans cette confusion venue des avorteurs qui appellent à une réglementation de l’interruption de grossesse, alors qu’en réalité leur dessein caché est une légalisation de l’avortement et l’abrogation de toutes les entraves juridiques posées.

3/ Il existe une autre zone d‘ombre dans la position des avorteurs, à savoir qu’en prétendant « lutter contre l’avortement clandestin », leur dessein caché reste en fait et en réalité sa légalisation, dans ses formes interdites par la loi. En effet, si ces gens combattaient effectivement l’avortement clandestin, ils se seraient dressés face à ceux qui en sont à l’origine et aussi à ceux qui s’en rendent complices, les femmes enceintes, les médecins mercenaires de l’avortement et leurs assistants infirmiers… ils auraient demandé la stricte application de la loi au lieu d’agir dans le contournement de cette même loi et d’aider celles et ceux qui le font. Mais en tout état de cause, les revendications d’amendement de la loi et de correction de ses insuffisances est un droit légitime, dans le cas où l’intention est bonne, sans ruse ni manœuvre.

4/ Les avorteurs axent leur raisonnement et leur argumentaire sur la liberté à disposer du corps et également sur la liberté de pouvoir entretenir librement des relations sexuelles. Et puisque la grossesse est de nature à mettre en péril ces droits et libertés, alors il est nécessaire selon les avorteurs de supprimer ce risque ; et le moyen trouvé est de légaliser l’avortement en vue de faciliter sa pratique et d’aider les femmes concernées à y avoir accès. Votre combat dans cette affaire est une affaire de sensualité alors que les islamistes affichent une position d’humanité car ils défendent le droit à la  vie, le droit des générations à exister, s’attachant ainsi à la criminalisation du meurtre des fœtus innocents, sauf pour des raisons de force majeure.

Autrement dit, les avorteurs aspirent à la libération des vagins et au désœuvrement des utérus, alors que les islamistes œuvrent à protéger  les vagins et à faire travailler les utérus. (waw..., NDLR)

Raissouni.ma