(Billet 1097) – L’affligeante histoire de M. Ghali avec le Polisario
Cette manie de s’énerver quand quelqu’un dit quelque chose… Ahmed Charaï pour Israël, Hakim Ziyech contre Israël et bien d’autres audacieuses saillies encore ont occasionné à leurs auteurs les pires attaques sur les réseaux, dans la sphère politique et au sein de la société civile. Aujourd’hui, c’est Aziz Ghali, le président de l’Association marocaine des droits de l’Homme qui fait sa sortie. Désastreuse, il faut le reconnaître, compliquant singulièrement les choses : entre mauvais goût, poussée égotique, bêtise, félonie ou inconscience, il y a le choix.
Est-ce sa liberté d’expression de laisser entendre qu’il soutient l’autodétermination des provinces sahariennes, en dehors du cadre du plan d’autonomie marocain, condition posée et maintes fois répétés de Rabat ? Certainement oui car ce n’est pas expressément interdit. Mais il y a l’opinion publique, la doxa politique, la coutume, un truc qui s’appelle le patriotisme… En disant cela, peut-être qu’Aziz Ghali voulait simplement « faire l’intéressant », sortir des sentiers battus, se montrer comme un révolutionnaire fidèle à ses idées, montrer ses muscles à ses pairs de l’AMDH. Soit, mais cela le plonge lointainement dans le passé, dans les années 60, comme cela est le cas dans l’ « autre monde » qui nous crée tant de problèmes.
M.Ghali défend ès-qualité, ou dit défendre, les libertés individuelles et collectives des Marocains. Mais ce n’est pas en les provoquant, en titillant leurs sentiments patriotiques – car il y en a ! – qu’il réussira à les convaincre. Il y a en effet unanimité (allez, à l’exception de quelques dizaines de refuzniks peut-être, pas plus) autour de cette cause qui est une cause nationale. Et dans tous les pays du monde, il est plus qu’indélicat de critiquer les orientations de l’Etat quand l’armée est engagée, et que des soldats sont exposés au danger, les armes à la main. Et que des soldats marocains soient morts par centaines dans les années 60 et 70.
L’AMDH a toujours été le poil à gratter de la politique marocaine. Ses membres et dirigeants ont toujours dénoncé les dérives sécuritaires et, ainsi, augmenté leur crédibilité. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas ; les bavures peuvent toujours exister mais de là à remettre en cause l’ensemble de l’édifice institutionnel du royaume, il y a un pas que les AMDHiens n’hésitent plus à franchir. Avec leur président, ils l’ont explosé, le pas ; il leur appartient aujourd’hui de confirmer ou non la position de leur président sur la question du Sahara. Sans menace aucune, on saura au moins à qui on a affaire…
Ces gens persistent à regarder le Maroc à travers un prisme étranger qui ne fonctionne même plus. Le Maroc n’est certes pas un paradis des droits de l’Homme, mais quel est ce pays qui l’est aujourd’hui ? Partout des exactions, partout de la répression policière ou des restrictions médiatiques, mais personne n’en parle. Nos défenseurs des droits ne voient pas ce qui a évolué et continue de changer, mais gardent pour eux cette condescendance occidentale à notre égard, que les Marocains ont dépassée mais que certains militants continuent de véhiculer.
Aziz Ghali, qui refuse de dire clairement sa position personnelle sur la question du Sahara marocain, se réfugie derrière celle de l’AMDH qui, dit-il, s’adosse aux résolutions des Nations Unies. Qu’un nombre croissant de pays reconnaissent la souveraineté marocaine sur ses territoires sud, que la France, qui détient les archives et la connaissance du passé de cette région, reconnaisse la souveraineté marocaine, que près de la moitié des Etats de l’UA aient ouvert des consulats dans les villes du Sud, que l’unanimité nationale soit établie pour cette question… tout cela n’émeut pas outre mesure les militants de l’AMDH et leur président, qui continuent de promener sur le Maroc de 2024 leurs états d’âme hérités des années hippies.
Certains n’hésitent pas à qualifier Aziz Ghali de « traître ». C’est sans doute excessif. M. Ghali est juste un homme qui nage à contre-courant pour des raisons qui lui appartiennent et qui sont certainement très discutables. Le président de l’AMDH ne devrait être ni inquiété ni poursuivi car, plus grave qu’une condamnation judiciaire, il devra affronter la condamnation populaire. Et s’il n’en a cure, cela montrerait le mépris dans lequel il tient l’opinion publique de son pays.
Si un jour il a le temps, Aziz Ghali devrait se plonger dans les innombrables ouvrages consacrés à cette question, au dépeçage de l’empire chérifien par les puissances européennes, aux accords conclus en 1961 entre le Maroc et le GPRA algérien. Il pourrait aussi consentir à s’entretenir avec des citoyens marocains hors sa sphère AMDH, peut-être y découvrira-t-il quelque chose qui lui ferait changer d’avis.
Mais cela est un vœu pieux. Aziz Ghali, solide du dogme et idéologue farouche, continuera sûrement sa route dans la dénégation des intérêts de son pays, alors même que ses modèles « démocratiques » et ses références gauchistes puisés dans une Europe désormais révolue ont montré que sur leurs terres l’intérêt national prime sur l’idéologie.
Prenez soin de vous, M. Ghali, et de vos proches, famille, confrères pharmaciens, militants AMDH. Vos propos ont sûrement dû les heurter. Allah yehdik, quoi…
Aziz Boucetta