La Hongrie prive les migrants de nourriture (ONU)
L’ONU épingle la politique hongroise sur la migration. Les Nations Unies accusent la Hongrie de violer les règles du droit international en privant délibérément les demandeurs d’asile de nourriture.
« Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU (HCDH) est alarmé par les informations selon lesquelles des migrants se trouvant dans des centres de détention en Hongrie ont été délibérément privés de nourriture, en violation des lois et des normes internationales », a déclaré Ravina Shamdasani, porte-parole du HCDH, lors d’un point de presse.
Les services de la Haut-Commissaire Michelle Bachelet ont appelé les autorités à mettre fin à cette pratique. « Selon les informations disponibles, depuis août 2018, au moins 21 migrants en attente d’expulsion ont été privés de nourriture par les autorités hongroises, dont certains pendant cinq jours maximum », a ajouté Mme Shamdasani.
Selon les informations du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, les autorités hongroises avaient promis de mettre fin à cette pratique à la suite d’une mesure provisoire adoptée par la Cour européenne des droits de l’homme. « Cependant, nous regrettons qu’en l’absence d’un changement clair du cadre juridique, les rapports suggèrent que la pratique se poursuit », a fait valoir le Haut-Commissariat.
« Si le bureau hongrois de l’immigration et de l’asile entame une procédure en vue d’expulser le demandeur rejeté du pays, les migrants ne reçoivent plus de nourriture », fait remarquer Mme Shamdasani. Dans l’attente de l’exécution de l’expulsion, les adultes - à la seule exception des femmes enceintes ou allaitantes - sont ainsi délibérément privés de nourriture. Ce qui peut entraîner à la situation de la malnutrition. « Cela est à la fois préjudiciable à leur santé et inhumain », dénonce le Haut-Commissariat.
Une violation des règles Mandela
L’institution rappelle face à ce traitement infligé aux migrants et aux réfugiés, aux Etats leurs obligations de respecter les droits fondamentaux reconnaissant la dignité des détenus.
« Les Etats ont un devoir accru de protection à l’égard des migrants privés de liberté, notamment en leur fournissant des vivres », a indiqué Mme Shamdasani.
A cet égard, les services de la Haut-Commissaire Bachelet rappellent que la privation délibérée de nourriture est interdite par les Règles Nelson Mandela.
En 2015, l'Assemblée générale
des Nations Unies a non seulement adopté l'Ensemble des règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus sous sa forme révisée, mais a également approuvé sa dénomination « Règles Nelson Mandela » pour rendre hommage à l’œuvre accomplie par l’ancien Président sud-africain qui, du fait de son combat mondial en faveur des droits de l’homme, a passé 27 ans de sa vie en prison.
Budapest encourage une politique anti-migration
Dans ces conditions, l’ONU a encouragé la Hongrie à s’acquitter de ses obligations en matière de droits de l’homme à l’égard des personnes privées de liberté, qu’elles se trouvent dans des zones de transit ou dans tout autre lieu de détention ou de rétention des migrants. Les services de la Haut-Commissaire Bachelet ont réitéré le droit de tous les migrants à demander l’asile, ainsi que le principe fondamental de non-refoulement, qui énonce le respect des droits de l’homme.
« Des dispositions qui interdisent le retour de toute personne dans une situation de risque réel et prévisible de persécution, de mort, la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ou tout autre préjudice irréparable », note le Haut-Commissariat.
Lors de l’examen du rapport de la Hongrie le 29 et 30 avril dernier à Genève, les questions migratoires ont suscité l’inquiétude des membres du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale. La rapporteure du Comité pour l’examen du rapport de la Hongrie, a ainsi rappelé que de nombreux rapports ont établi des constats accablants s’agissant de la situation des réfugiés et demandeurs d’asile.
Présentant ce rapport, le ministre des affaires étrangères hongrois, a affirmé qu’aux yeux du gouvernement, le fait de décider d’aller dans tel ou tel pays quitte à franchir illégalement les frontières internationales n’est pas un droit fondamental.
La délégation hongroise a ensuite attiré l’attention sur le contexte politique du pays. La Hongrie tient à honorer ses engagements conventionnels s’agissant de l’asile, mais le pays veut faire une distinction claire entre les demandeurs d’asile et les migrants, a expliqué la délégation. Il ne faut pas que le système (d’asile) donne lieu à la création de couloirs migratoires permanents ; toute migration n’est pas due à une crainte légitime d’être persécuté, avait insisté Budapest.