Coronavirus : la course au vaccin fait rage
C'est la course dans le monde entier pour tenter de trouver un médicament et donc sauver tous les nouveaux malades. Quatre essais cliniques démarrent ce vendredi, des essais franco-européens dont la France est leader. 800 malades français inclus sur un total de 3 200.
Ce sont des malades hospitalisés qui sont inclus dans ces essais. Pas encore en réanimation, mais souffrant de pneumopathies.
Le premier essai démarre avec un médicament anti VIH, le Kaletra.
Dans le deuxième on y ajoute de l'Interferon qui envoie des messages aux cellules et stimule les défenses immunitaires.
Dans le troisième un antiviral le Remdesivir développé initialement contre le virus Ébola. Pour la petite histoire il y a un peu de retard dans le lancement. On attendait la livraison de ce médicament venant des États Unis, via l'Irlande. il vient tout juste d'être dédouané pour arriver en France.
Dans le quatrième, les malades recevront un placebo, comme dans tous les essais. Attention ça ne veut pas dire qu'ils ne sont pas soignés, ils bénéficient; comme les autres d'ailleurs, d'oxygène, de médicaments standards donnés dans ces pathologies pulmonaires.
Un essai avec la chloroquine, médicament contre le paludisme, a été rajouté. On en parle beaucoup mais il faut davantage de malades. Il débutera la semaine prochaine, ainsi qu'un autre qui porte sur du plasma de personnes guéries qui ont développé des anticorps, réinjecté à des malades.
On ne sait pas aujourd'hui, et c'est bien toute l'inquiétude autour de cette maladie, quel est le patient qui va évoluer vers une forme grave. Les médecins voient en quelques heures un état se dégrader chez des personnes qui ne présentaient pas de facteur de risque.
Les enjeux géopolitiques
Les annonces se multiplient : un premier essai clinique de vaccin à Seattle, un autre testé toujours aux États-Unis au mois d'avril, un troisième développé en ce moment par l'entreprise Sanofi en lien avec le gouvernement américain, des recherches également en cours dans plusieurs pays européens... Face à l'épidémie de Covid-19, les recherches médicales sont nombreuses. C'est une véritable course.
« Ce n'est pas tellement une course, dans le sens de compétition », analyse Michel Pletschette, médecin spécialiste des maladies infectieuses et de l'épidémiologie, chercheur à l'université de Munich. « Mais c'est une course contre la montre : la pandémie de Covid-19 pose un défi énorme à la recherche. » Sauf que dans cette course contre la montre, les participants ne partent pas unis.
Quelques initiatives multilatérales existent, mais elles sont faibles. « L'Organisation mondiale de la santé (OMS) n'a pas les moyens de financer de la recherche », décrit le chercheur. « Elle a publié un blueprint (un plan détaillé) en 2016 sur la recherche et le développement _: le texte est une sorte de consensus peu précis. Quelques années plus tard, il a inspiré la création du Cepi » _Fondé en 2017, le Cepi est la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies (Cepi), financé par plusieurs Etats (dont la France) et des fondations privées, qui planche sur la lutte contre le coronavirus.
Un champion en Allemagne
De même, des initiatives nationales
existent. En France, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a lancé mercredi 18 mars un comité de pilotage sur le coronavirus, en lien avec l'Inserm (l'Institut national de la santé et de la recherche médicale) et les universités : il devra permettre de recenser les projets de recherche, diffuser leurs résultats et mettre en place les moyens (humains comme financiers) pour la soutenir.
Sinon, le combat est essentiellement portée par des entreprises. Trop peu de moyens sont accordés à la recherche publique, affirme Michel Plestchette, si bien que « ceux qui y participent sont surtout des idéalistes ». En revanche, des financements publics (nationaux ou européens) soutiennent des laboratoires privés. Mais « il n'y a pas de patriotisme dans l'industrie pharmaceutique », reconnaît-il un sourire dans la voix, « et il n'y a pas non plus spécialement de sentiments. »
Parmi les leaders identifiables de la recherche contre le coronavirus, beaucoup d'initiatives viennent des États-Unis. En Europe, un champion se détache en particulier : l'entreprise allemande CureVac. Les techniques et les procédés brevetés par ce laboratoire pourraient lui permettre, une fois le vaccin trouvé, de le produire rapidement dans les quantités nécessaires et d'exporter facilement le matériel nécessaire pour le produire. Des caractéristiques précieuses pour lutter contre une pandémie étendue sur tous les continents.
A tel point que l'entreprise a attiré l'attention de Donald Trump : le journal allemand Die Welt a annoncé dimanche dernier que le Président américain aurait souhaité racheter l'entreprise. « Les chercheurs allemands jouent un rôle de premier plan dans le développement de médicaments et de vaccins », a rétorqué dans la presse le ministre allemand des Affaires étrangères, Heiko Mas, très remonté contre cette annonce, « et nous ne pouvons permettre que d'autres cherchent à se procurer l'exclusivité de leurs résultats. »
Déficit de liens avec la Chine
En parallèle des recherches européennes et américaines, un autre bloc : la Chine, d'où vient la pandémie. Mais là, l'épidémiologiste Michel Pletschette regrette amèrement la tournure de la situation : « Contrairement à 2003, avec l'épidémie du Sras, très proche de l'actuel Covid-19, où des ponts s'étaient très vite bâtis entre Pékin et le reste du monde, on n'a pas les contacts nécessaires avec les Chinois aujourd'hui. »
Les programmes évoluent de manière parallèle, mais avec trop peu d'échanges sur les connaissances et leurs avancées respectives. « La Chine est véritablement en capacité de produire un vaccin : elle dispose des moyens techniques, des laboratoires de recherche nécessaires, mais il n'y a pas de connexion entre leurs équipes et le reste du monde. »
La Chine n'est pas non plus impliquée dans la stratégie du blueprint de l'OMS, elle ne participe pas au Global Research Collaboration for Infectious Disease Preparedness (GloPid-R), une autre initiative internationale pour prévenir les risques liés aux maladies infectieuses (à laquelle appartient notamment l'Inserm).
Cette situation, déjà regrettable aujourd'hui, pourrait se répéter. « La Chine dispose d'une biodiversité énorme et méconnue, et sa densité de population, sa mobilité interne, est énorme », décrit le médecin. « Autant de critères qui font que d'autres maladies émergentes pourraient venir de Chine. », conclut- il.
Avec agences