« Marche de la colère » des policiers français
A l'appel d'une très large intersyndicale, plusieurs milliers de policiers ont défilé mercredi à Paris. Inédite depuis près de 20 ans, cette manifestation qu'ils ont baptisée "marche de la colère" visait à dénoncer la dégradation de leurs conditions de travail, la hausse des suicides dans leurs rangs, un manque croissant de moyens et de reconnaissance de leur profession mais aussi la remise en cause de leur statut dans le cadre de la réforme des retraites.
Après un mois de septembre marqué par de nombreuses actions contre la réforme des retraites (grève dans les transports, manifestation des professions libérales puis des syndicats), plusieurs milliers de policiers français venus de tout le pays (2 2000 selon les syndicats) sont à leur tour descendus mercredi dans la rue à Paris.
Le cortège s'est élancé à la mi-journée de la place de la Bastille en direction de celle de la République. Un groupe d'une vingtaine de "gilets jaunes" - dont Eric Drouet, figure du mouvement - se trouvait devant le cortège dans le but de "dénoncer les violences policières".
En tête du défilé 52 policiers portaient un masque blanc sur le visage en hommage à leurs collègues qui se sont donnés la mort depuis le début de l'année.
Dans la matinée, le secrétaire général adjoint du syndicat Alliance Police Nationale, Olivier Hourcau a dénoncé sur franceinfo "une année noire, du jamais-vu depuis plusieurs années". "Depuis 2001 c'est la première fois qu'une intersyndicale se monte pour dénoncer les conditions de travail, les suicides, et la stigmatisation systématique des policiers. C'est un ras-le-bol", a-t-il dit.
Les forces de l'ordre, mises à
forte contribution en raison du mouvement des "Gilets jaunes" et de la multiplication des manifestations, veulent tirer la sonnette d'alarme quant à la charge de travail croissante à laquelle elles sont confrontées.
Dans le cortège de nombreuses pancartes rappelaient que 23 millions d'heures supplémentaires n'ont toujours pas été réglées par l'Etat.
Face aux nombreuses polémiques autour des violences policières, les forces de l'ordre soulignent de leur côté qu'elles sont devenues des cibles. Elles relèvent notamment que fin août, plus de 23 000 infractions contre des personnes dépositaires de l'autorité (soit 15% de plus qu'en 2018) ont été enregistrées.
De manière plus générale, elles dénoncent le manque de considération, de respect et de reconnaissance dont elles s'estiment victimes.
Les policiers s'insurgent également contre la dégradation des conditions matérielles dans lesquelles ils travaillent. Un rapport parlementaire pointait du doigt, en juillet dernier, des commissariats "abandonnés par la puissance publique", des locaux insalubres ou encore un parc automobile "vieillissant".
Les forces de l'ordre s'opposent par ailleurs à la remise en cause de leur statut dans le cadre du projet de loi sur la réforme des retraites auquel travaille le gouvernement. "Il y aura une modification de leur régime comme pour tous les Français, mais il y aura la prise en compte de la dangerosité de leur métier de policier", a déclaré mercredi matin sur France 2 le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner.
Selon les résultats d'une enquête YouGov réalisée pour Le HuffPost, publiée mercredi, 56% des Français interrogés estiment que le gouvernement ne soutient pas assez les policiers, une profession qui bénéficierait d'une bonne image chez 62% des sondés.