Contribution du Mouvement Maan pour les Assises de la fiscalité
C’est cette semaine que se tiendront les très attendues Assises de la fiscalité au Maroc. Les préparatifs courent depuis plusieurs mois et les propositions affluent de tous les secteurs concernés. La Direction générale des impôts est à la manœuvre et elle affirme prendre en considération l’ensemble des recommandations et suggestions qui lui sont présentées. Le Mouvement Maan, créé voici tout juste un mois, apporte à son tour sa pierre à l’édifice, au moyen d’un document contenant 40 propositions.
S’appuyant sur les dispositions constitutionnelles qui prévoient l’impôt, Maan relève d’entrée de jeu quatre insuffisances du système fiscal national, qui doivent donc être améliorées :
1/ Complexité et faible lisibilité ;
2/ Instabilité due aux amendements annuels de la loi fiscale ;
3/ Evolution modérée de l’assiette fiscale ;
4/ Persistance des niches fiscales, ou exonérations, dérogations ou encore dépenses fiscales, au profit de certaines catégories et au détriment d’autres.
Dans son document de 4 pages, Maan lie la réforme fiscale à bien des domaines, telles que le développement, la justice fiscale, la productivité et l’efficacité économique, et la bonne gouvernance. Partant du principe universel du consentement à l’impôt, la réforme à venir est attendue car elle reviendra sur les natures d’impôts appliqués ou à introduire, les montants et modes de prélèvement, ainsi que sur la philosophie générale sur laquelle tout le monde doit s’accorder.
D’où les « 40 idées pour une fiscalité de croissance, juste et équitable ». Tout un programme…, décliné en chapitres distincts.
1/ Les principes généraux : Ils sont au nombre de 14.
On en retiendra globalement l’idée de la légalité institutionnelle de l’impôt, mais aussi celle de la liberté des Marocain(e)s à jouir de leurs patrimoines et à bénéficier des services d’une administration efficace et efficiente.
Pour sa part, l’Etat devra gérer ses ressources en « bon père de famille », sans exclusive ni discrimination, sans abus ni confiscations et surtout sans inégalités. L’équité, la perception d’égalité, l’efficacité doivent être les idées maîtresses de la nouvelle réforme fiscale et de la plateforme des impôts qui en résultera.
2/ L’impôt sur les sociétés : 3 points.
Maan préconise l’égalité de l’IR et de l’IS et la suppression de la cotisation minimale car appliquée sans création de richesse puisqu’elle concerne les entités ayant enregistré des pertes.
3/ L’impôt sur le revenu : 4 points.
Maan use de la notion de l’équité fiscale verticale, aux fins de ne plus assujettir à l’impôt les tranches inférieurs à 50.000 DH et d’introduire un taux de 45% pour les revenus excédant 1 million de DH.
Il est également important d’indexer l’IR sur l’inflation et de créer le concept de foyer fiscal qui prend en compte l’effectif des descendants.
Idée importante : l’instauration d’une déduction fiscale compensatoire pour les familles prenant en charge les dépenses de santé et d’éducation de leurs enfants.
4/ La TVA : 6 points.
En plus de la neutralité de la TVA, Maan recommande la simplification des taux avec, dans un premier temps, trois taux de 0, 10 et 20%, avant de basculer vers un système simplifié à deux taux, 0 pour les produits de première nécessité et 15 à 20 pour les autres produits. Il est également important de réfléchir à une TVA agricole et à son impact sur l’activité pimaire.
De plus, Maan propose de faire participer la TVA à l’effort national de solidarité afin de dissocier la couverture sociale de l’emploi et d’élargir les effectifs de populations bénéficiant de cette couverture sociale.
5/ La fiscalité locale : 5 points.
Maan préconise de simplifier la fiscalité locale afin de la rendre plus lisible et de la faire converger avec la fiscalité nationale. En plus d’autres aménagements, Maan propose de faire publier les bilans des collectivités locales en ayant recours aux services de commissaires aux comptes pour plus de lisibilité, d’efficacité et une meilleure gouvernance territoriale.
6/ Les dépenses fiscales : 2 points.
L’idée générale est de mieux et plus étudier l’opportunité des niches fiscales, dont plusieurs sont improductives, voire même pénalisantes. La Cour des comptes devra donc auditer ces dépenses fiscales, autre appellation de niches. Maan recommande de remplacer ces dépenses fiscales par des dépenses budgétaires, qui deviendraient des subventions, plus faciles à mettre en place et plus directes.
7/ La gouvernance et le contrôle fiscal : 6 points.
Pour Maan, le fisc ne devrait plus disposer du monopole de l’interprétation des textes de l’administration fiscale. Cela serait remplacé par le développement d’une jurisprudence fiscale et par la publication des décisions des commissions fiscales, qui devraient se fonder sur des avis d’experts privés. En outre, les résultats des contrôles fiscaux devraient être publiés sur les sites de la DGI.
Ainsi, le débat à venir cette fin de semaine sur la fiscalité nationale est enrichi par cette contribution du Mouvement Maan, une contribution qui ne se veut pas exhaustive, mais indicative sur les grands principes moraux et les non moins grands procédés techniques. Une fois cela acquis, les discussions plus pointues et chiffrées à venir pourront se tenir dans une perspective d’amélioration de l’efficience du fisc.
AB