PCNS/« Atlantic Dialogues »: la question du « rééquilibrage » Nord-Sud en ouverture
La pandémie de Covid-19 a mis en évidence la nécessité d’opérer un « rééquilibrage » des relations internationales, ont estimé, mardi à Rabat, des experts participant à la session inaugurale de la conférence annuelle « Atlantic Dialogues » (AD Talks), organisée par le Policy Center for the New South (PCNS).
C’est ce mardi 3 novembre 2020, qu’ont démarré les sessions plénières de la conférence de haut niveau, déclinées sous forme de 15 wébinaires, programmés jusqu’au 22 décembre prochain. Covid-19 oblige, les AD Talks seront virtuels pour l’année 2020.
La cérémonie d’ouverture a été donnée par Karim El Aynaoui, président de Policy Center for the New South, qui a indiqué que l’objectif de ces «AD talks» est de présenter différentes lectures de la crise actuelle pour permettre d’avoir une vision globale et comparer les approches de part et d’autres. « Comme l’édition de l’année dernière, nous avons veillé à la diversité des intervenants qui constituent notre communauté, en adéquation bien évidemment avec la devise de Policy Center for the new south. Ce dialogue et ces échanges élargis, qui constituent l’esprit des Atlantic dialogues, sont d’autant plus importants dans ce contexte », a indiqué M. El Aynaoui lors de la cérémonie d’ouverture à distance espérant à la même occasion, revoir l’ensemble de la communauté en présentiel l’année prochaine au Maroc.
Au cours des deux dernières décennies, le monde a connu un « rééquilibrage de puissances régionales », notamment l’émergence de la Chine, des pays du BRICs, ou encore le Nigeria, a relevé Mme Aminata Touré, ancienne Premier ministre du Sénégal lors de cette session tenue par visioconférence sous le thème de « la crise Covid-19 vue depuis l’Atlantique Sud ».
Après la décolonisation, les rapports ont changé et le nouveau concept +gagnant-gagnant+ « doit remplacer les clichés et stéréotypes qui ont entaché l’Afrique », notamment pendant cette crise sanitaire, a indiqué Mme Touré, notant que l’Afrique doit s’inscrire de plus en plus dans une logique d’intégration économique et financière par « un changement de paradigmes » afin de dépasser les 20% d’échange économique enregistré entre les États africains.
Elle a en outre indiqué que l’Afrique doit saisir les opportunités pour dialoguer, échanger et commercialiser « sans alignement vis-à-vis des Etats unis
ou de la Chine ».
Évoquant la mondialisation, l’ancienne Premier ministre sénégalaise a fait observer que ce paradigme « n’était pas solide et n’a pas résisté » face à la pandémie, lorsque les frontières ont été fermées ce qui a causé « la destruction des chaines approvisionnement ».
« Cette crise a permis aux Africains de découvrir des compétences et des capacités qui ont conduit à la bonne gestion interne efficace, notamment la maladie (Ebola) », a-t-elle relevé, estimant que l’Afrique a réussi le test de la crise Covid-19 au contraire des occidentaux.
En abordant le multilatéralisme, Mme Touré, a indiqué, lors de cette session également modérée par Mvemba Dizolele, professeur d’études africaines à l’Université John Hopkins, que le monde a perdu lors de cette crise les mécanismes de concertation.
De son côté, l’ancien ministre français des Affaires étrangères, Hubert Védrine, a indiqué que le monde occidental « a perdu le monopole de la puissance , et son modèle présente des problèmes écologiques monstrueux ».
« C’est très tôt » de dire que la pandémie a changé le monde, a-t-il dit, plaidant pour une meilleure coopération internationale d’ici 2021.
Sur un autre sujet, M. Védrine a souligné que les rivalités sino-américaines vont dominer la prochaine décennie, précisant qu’il ne faut pas idéaliser la mondialisation.
Selon les organisateurs, 15 webinaires sont prévus du 3 novembre au 22 décembre 2020 dans le cadre des AD Talks, où une pléiade d’experts et personnalités civiles et militaires de haut niveau, du Sud comme du Nord, vont animer les sessions plénières de cette conférence.
Les 14 autres sessions des AD Talks, pour la plupart et programmées tout au long des mois de novembre et décembre, traiteront de thèmes liés au même sujet, sous des angles aussi variés : « la géographie du mécontentement dans le Sud global « , « les capacités sanitaires comme nouvel instrument de pouvoir » ou encore « la santé publique, nouveau champ d’action pour les organisations et alliances militaires ».
Les discussions iront de la politique à l’économie, en s’interrogeant notamment sur « l’Etat-providence dans le grand Sud : le retour d’un grand absent », « les pandémies, sauver l’économie ou des vies ? » et « l’âge de la désinformation », entre autres, avant une discussion de clôture avec d’anciens présidents latino-américains.