Journée mondiale du lupus à l’ombre de l’épidémie du Coronavirus

Journée mondiale du lupus à l’ombre de l’épidémie du Coronavirus

Une des premières causes de réduction de la mobilité physique et de mortalité chez les femmes jeunes au Maroc (comme partout dans le monde)

L’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS), présidée par le Dr khadija Moussayer, se joint au « World Lupus Day », organisé le 10 mai depuis 17 ans par  la Fédération Mondiale du Lupus, pour sensibiliser aux aspects méconnus de cette maladie qui frappe plus de 5 millions de personnes dans le monde, des femmes dans neuf cas sur 10, souvent jeunes. Potentiellement mortelle, elle est une des toutes premières causes de mortalité des femmes jeunes dans le monde et au Maroc.  Une enquête mondiale divulguée le 7 mai dernier montre par ailleurs qu’elle affecte profondément la mobilité physique et la capacité à mener des activités normales.

Cette pathologie a été fortement médiatisée ces derniers mois par les débats sur l’utilisation de son traitement central, l'hydroxychloroquine, dans la lutte contre le coronavirus également. Une étude  publiée récemment dans le  British Medical Journal a montré à cet égard que la prise de cette molécule par des patients lupiques depuis plusieurs années ne les a pas prémunis contre le covid-19 et ne leur pas épargnés les formes sévères de la maladie.

Une maladie aux multiples signes

 Le lupus est une maladie chronique auto-immune aux manifestations très diverses d'où parfois son surnom de "maladie aux 1000 visages" : poussées de fièvre, perte de poids, fatigue, sentiment de mal-être, douleurs articulaires / musculaires, lésions cutanées, troubles de la vision, état dépressif, symptômes psychiatriques … sans oublier des rougeurs en « ailes de papillon » au visage.

Une évolution imprévisible

Sa sévérité est variable selon les patients et chez un même individu selon les périodes. Elle  peut rester inactive ou peu active pendant de longues périodes puis connaître des poussées attaquant de nombreuses parties du corps (articulations, peau, reins,  cœur) et susceptibles de conduire à une hémorragie cérébrale ou pulmonaire, une insuffisance rénale…en particulier lors d’une grossesse. Cette imprévisibilité complique son diagnostic, souvent tardif. Un examen clinique spécialisé, accompagné d’un bilan biologique recherchant en particulier certaines substances, les auto-anticorps, permettrait pourtant de la confirmer précocement.

De nombreuses jeunes femmes en meurent

Une analyse des certificats médicaux de décès, sur 15 ans aux Etats-Unis, a montré en 2018 que le lupus  se classe au 10ème rang des causes du décès chez les 15-24 ans. Il est même répertorié au 5ème rang des 15-24 ans dans les populations les plus pauvres, les femmes noires et d’origine hispaniques. On peut affirmer que ce


dernier ratio s’applique aussi au Maroc, où la pathologie atteint environ 20 000 femmes. Le lupus, la plus fréquente des maladies rares, constitue donc un problème majeur de santé publique dans notre pays. La situation est pire en Afrique noire, la région du monde la plus touchée par cette affection.

Une maladie  qu’on contrôle pourtant mieux

La prise en charge du lupus a connu de grands progrès  ces dernières décennies : le taux de survie à 5 ans pour le lupus était en France inférieur à 50 % en 1955 et  supérieur à 90 % maintenant. Ce qui est loin d’être encore le cas au Maroc !

En l'absence de traitement curatif, la prise en charge repose sur des thérapies visant à prévenir les complications et à traiter les  symptômes, principalement par l’emploi  de l’hydroxychloroquine (plaquénil) et aussi, suivant les attaques, de cortisone, d’immunosuppresseurs et  de  traitements innovants, les biothérapies (qui n’ont qu’un seul défaut : leur coût élevé).

L’adoption de l’hydroxychloroquine dans les traitements contre le coronavirus a suscité beaucoup d’inquiétude sur la disponibilité de ce produit pour les malades du lupus. Son remplacement fréquent actuellement au Maroc par de la chloroquine pure (Nivaquine) est une solution de secours qui ne peut pas être prescrite sur le long terme à cause de la toxicité cardiaque plus forte de cette dernière.

Il existe aussi d’autres formes de ce mal qui restent heureusement bénignes en général : « cutanée »  en se limitant à la peau, médicamenteuse et réversible à l’arrêt de la molécule en cause….

Un impact considérable sur les fonctions physiques et la qualité de vie

 Dans une nouvelle enquête mondiale menée dans plus de 70 pays auprès de plus de 3500 personnes atteintes de lupus et publiée le 7 mai 2020 par la Fédération mondiale du lupus (WLF), près de 7 participants sur 10 ont répondu que le lupus entrave leur mobilité physique . La majorité des répondants au sondage ont ainsi indiqué qu'ils ne pouvaient pas accomplir sans difficultés leurs activités quotidiennes, y compris monter et descendre des escaliers (67%) et faire des tâches ménagères (69%) comme passer l'aspirateur. Une personne sur 10 a besoin d'une canne ou d'un autre appareil pour ses déplacements. Toutes les personnes atteintes de lupus semblent enfin éprouver des difficultés à se lever de leur lit, à cause du sentiment de fatigue générale qu’elle engendre.

Cette enquête démontre bien, s’il en était besoin, les effets dévastateurs que le lupus peut causer à la vie de ceux qui en souffrent