OBG analyse l’impacte du coronavirus sur l'industrie marocaine
Au moment le gouvernement mobilise des fonds pour protéger les entreprises, formels et non formels impactées par le coronavirus, le cabinet Oxford Business Group (OBG) s’interroge de l’impacte de la crise sanitaire sur l'industrie marocaine.
Nous livrons ici l’analyse d’OBG
«Au-delà d’autres secteurs de premières nécessités qui ont également répondu présent face à cette crise, tels que la distribution où les principaux supermarchés ont adapté leur stratégie de vente pour offrir des services de livraison à domicile inédits, ou du secteur de l’éducation qui a rapidement mis en place des solutions digitales pour délivrer des cours à correspondance, la priorité du pays s’est logiquement orientée vers le secteur de la santé.
Alors que le Ministre de la Santé, Khalid Ait Thaleb, se montrait rassurant quant aux capacités du Royaume à répondre à la crise lors d’un entretien télévisé réalisé le mardi 31 mars, différentes initiatives ont vu le jour, grâce notamment à l’appui du Ministère de l’Industrie, du Commerce, de l’Economie Verte et Numérique.
Le pays entend en effet tirer profit de son secteur industriel qui a su se structurer au cours des dernières années, sous l’impulsion du Plan d’Accélération Industriel (PAI) 2014 – 2020. Pendant cette période, plus de 400 000 nouveaux emplois ont été créés (bilan à fin 2018), et 54 systèmes industriels se sont tissés, tels que l’automobile, le textile et l’aéronautique.
Au moment où la seconde phase du PAI, pour la période 2021 – 2025, s’organisait, les entreprises privées, en coordination avec le secteur public, se sont donc concertées pour adapter la production industrielle et venir en aide à la population et aux régions ne disposant pas des moyens nécessaires pour faire face à cette crise sans pareille.
Le secteur santé priorisé
C’est dans ce sens que, en ce début du mois d’avril, l’industrie textile -qui employait à fin 2019 plus de 185 000 travailleurs répartis dans plus de 1600 entreprises, et représentant 15% du PIB industriel marocain- s’est mobilisée, par l’intermédiaire de l’Association Marocaine des Industries du Textile et de l’Habillement (AMITH) pour reconvertir certains de ses adhérents à la fabrication de masques et viser une capacité de production de 4 millions d’unités par jour d’ici la mi-avril. Au-delà d’être produits en un temps record, ces masques répondront aux normes de l’Institut marocain de normalisation (IMANOR), prouvant leur qualité et les rendant accessible au personnel de soin.
« Alors que la majorité de nos adhérents travaillent à titre gracieux pour cet exercice, cela est un bel exemple de solidarité de la part des industriels marocains du textile, » précise Jalil Skali, Vice Président de l’AMITH.
Cette nouvelle est d'autant plus importante avec l'annonce faite par le gouvernement marocain le 6 avril, imposant le port obligatoire du masque et fixant les prix de vente à 80 centimes l'unité.
En parallèle, l’unité
industrielle de Lamatem à Berrechid inaugurée en octobre 2019 et spécialisée dans le textile médical, s’est également engagée à fournir l’Etat en matériel médical. Cela inclura des casaques, charlottes, combinaisons, et sur chaussures, ce qui constituera un atout de taille, alors que l’usine peut produire jusqu’à 6 millions d’unités par mois.
L’ensemble des acteurs mobilisés
Les instituts de recherche et développement qui redoublent également d’effort, ont ainsi conçu un respirateur artificiel 100% marocain ainsi qu’un appareil de mesure de la température destinés aux malades atteints du coronavirus (Covid-19), à travers le travail des chercheurs de l’Université Mohammed VI Polytechnique. Ces innovations technologiques, faites de composants entièrement disponibles sur le marché marocain, seront opérationnelles autant en ville qu’en milieu rural, et dotés d’une autonomie de plus de 3000 heures. Une fois leur production achevée au cours des semaines à venir, elles seront mises à disposition du système sanitaire. La date de mise à disposition reste pour le moment inconnue ».
A côté de cela, les professionnels l’assurent, bien qu’en partie dépendant des marchés extérieurs et notamment de la Chine et l’Inde pour produire les médicaments, qu’il n’y aura pas de pénurie. Comme le rappelait Amine Benabderrazik, Président des Entreprises du Médicaments du Maroc , lors d’une interview exclusive dans le cadre des recherches annuelles d’Oxford Business Group au Maroc: « 80% des médicaments vendus au Maroc, princeps ou générique, sont fabriqués au niveau local ».
« A condition que les concitoyens ne vident pas les pharmacies, le stock de médicaments est parfaitement alimenté », précise de son côté le 3 avril Rachid Lamrini, Président du conseil de l'ordre des pharmaciens répartiteurs au Maroc, aux médias locaux.
Des prévisions de croissance revues
Ainsi, bien que l’économie globale et nationale soit affectée, le Royaume se veut rassurant quant à sa gestion sanitaire face au virus.
Le pays a annoncé mi-mars débloquer un fond spécial de 10 milliards de dirhams pour prendre en charge les dépenses résultant de cette crise sanitaire. Ce fond devra financer d’une part, les dépenses de mise à niveau du diapositif médical, en termes d’infrastructures adaptées et de moyens supplémentaires à acquérir dans l’urgence. D’une autre part, ce fond devrait soutenir l’économie nationale et accompagner les secteurs les plus touchés par cette crise sanitaire. Autres mesures, incluent la suspension du paiement des charges sociales et la mise en place d´un moratoire pour le remboursement des crédits bancaires au profit des entreprises.
En 2019, le Maroc a affiché un PIB en hausse de 2,7%, et la Banque Africaine de Développement prévoyait une croissance du PIB réel devant s'établir à 3,7% en 2020. Cependant, le Centre Marocain de Conjoncture vient d’actualiser, fin mars, sa prévision de croissance pour 2020 au vu de la situation, revoyant à la baisse sa croissance de 0,8% du PIB à prix constants.