Ceinture Bleue, Akhannouch veut sauver les richesses halieutiques mondiales
Une fois tous les deux ans, lek Salon Halieutis ouvre ses portes à Agadir, à mi-chemin de la côte atlantique marocaine, de Tanger aux confins du Sahara. Comme les fois précédentes, cette 5ème édition d’Halieutis reçoit un invité d’honneur, et cette année, il s’agit de la Norvège. Mais avant l’ouverture officielle du Salon, une Conférence de haut niveau s’est tenue sur « la Ceinture Bleue, une plateforme pour l’action en faveur de la durabilité de la pêche ».
La Conférence sur la Ceinture Bleue
Une table ronde, une large et vaste table ronde autour de laquelle se sont réunis ministres et ministres délégués, d’ici et d’Afrique, d’Europe et d’ailleurs. En ouverture, et tradition d’hospitalité oblige, c’est le président de la Région Hafidi qui a ouvert le bal, avec un mot de bienvenu où il a conseillé à ses hôtes de « faire des massages et d’aller dans les spas, pour oublier vos soucis, et les laisser aux Soussis ». Jeu de mots qui lui a attiré une salve d’applaudissements… Mais les Soussis ont-ils des soucis ? Il ne l’a pas dit.
Puis arrive le ministre marocain de l’Agriculture et de la Pêche, Aziz Akhannouch, qui a en sa qualité répertorié les menaces qui pèsent sur la mer et la Ceinture Bleue, comme « l’acidification des océans, la modification des courants marins, l’élévation de la température et du niveau des eaux et les disparitions d’habitats marins et pollution due aux activités terrestres ... ». Cette partie a été relevée par le ministre ivoirien de la Pêche qui a remarqué que sur terre, hommes et animaux bénéficient de soins et de traitements, ce qui n’est pas le cas de la faune et de la flore marines. Ce qui est vrai, et avec les 70% de surface terrestre que représentent les océans, on peut mesurer l’ampleur des dégâts à venir si rien n’est fait.
Puis, Afrique et politique africaines obligent, M. Akhannouch constate qu’ « en Afrique, la situation est préoccupante en raison, notamment, du déficit en termes de recherche et de surveillance et aussi de l’absence d’une synergie des actions. L’Afrique sera à l’origine de la moitié de la croissance démographique dans 30 ans, avec une pression sur les stocks de plus en plus soutenue. L’Afrique qui, ne contribue qu’a 7% de la production mondiale de poisson, et seulement 3% du commerce international des produits de la pêche… doit appréhender urgemment les questions liées à l’économie océanique ».
Puis le ministre développe les actions et réalisations de son Plan Halieutis : « Comme vous le savez, le Maroc mène depuis 2009 une stratégie de développement et de modernisation de la pêche maritime « Halieutis » qui consacre le principe de durabilité :
1/ La recherche halieutique a été renforcée pour une meilleure connaissance et suivi du milieu marin ;
2/ Les plans d’aménagement et mesures de gestion des pêcheries couvrent 96% des pêcheries ;
3/ Des récifs artificiels ont été immergés en méditerranée et en atlantique pour contribuer au repeuplement des fonds marins ;
4/ Le contrôle des activités de pêche a été renforcé par l’équipement de la totalité de
la flotte côtière et hauturière en dispositifs de géolocalisation par satellite ;
5/ La traçabilité des produits de la pêche est assurée par une certification électronique couvrant les maillons allant du débarquement à l’export ;
6/ Des plans d’aménagement aquacoles ont été définis pour permettre un développement durable de l’activité…
La Ceinture Bleue, portée par le Maroc lors de la COP 22 – et autour de laquelle nous sommes rassemblées aujourd’hui, ambitionne de compléter les chantiers lancés dans le cadre de nos stratégies nationales respectives ».
Mais qu’est-ce que la Ceinture Bleue ? Aziz Akhannouch en développe les grands axes :
La ceinture Bleue :
1/ C’est une offre globale, intégrée et inclusive destinée à faire de la pêche un vecteur de croissance de l’économie bleue.
2/ Elle concerne un espace prioritaire, les zones côtières et les Zones Economiques Exclusives, qui sont à l’origine de 85% de la production halieutique mondiale.
3/ Elle cible les Objectifs du Développement Durable (ODD) adoptées par les Nations Unies. Elle propose une vision opérationnelle de l’approche écosystémique liant :
- La pêche ;
- L’aquaculture ;
- La surveillance des océans.
4/ Elle propose une plateforme collaborative pour dynamiser l’investissement de nouvelle génération respectueux de l’environnement. Cette plateforme permettra de faciliter l’échange de la connaissance, le know how, l’innovation, la réplication de projets innovants, la création de partenariats et la mobilisation des fonds pour accompagner les porteurs de projets.
Les rencontres bilatérales
Avec la Russie. En marge de la Conférence, Marocains et Russes se sont retrouvés, Moscou étant représenté par Ilya Shestakov, vice-ministre russe de l’Agriculture et président de l’Agence Fédérale Russe des Pêches. La rencontre de ce dernier avec M. Akhannouch a été l’occasion de discuter du renouvellement de cet Accord qui prendra fin le 14 mars 2020. D’une durée de 4 ans, cet accord de coopération en matière de pêches maritimes permet à une flotte de 10 navires russes d’opérer dans les eaux marocaines en Atlantique sud jusqu’au Cap blanc. Cet accord permet également l’emploi de plus de 300 marins marocains. En outre, cette année a connu l’embarquement de 327 marins marocains à bord de la flotte russe pêchant dans les eaux marocaines.
Les deux responsables ont évoqué le volet technique de l’accord de pêche Maroc-Russie ainsi que la coopération scientifique entre les deux pays. L’accord prévoit notamment l’octroi, par la partie russe, de 14 bourses d’études au profit d’élèves marocains lauréats des établissements de formation maritimes.
Avec la Norvège. Aziz Akhannouch a également eu une discussion avec son homologue norvégien Roy Angelvik, Mlui rappelant la place du Maroc en tant que premier producteur de poissons en Afrique et le potentiel du Royaume en termes de valorisation, soulignant tout l'intérêt que suscite l'expérience norvégienne.
Les deux responsables ont également évoqué la question de la durabilité des ressources halieutiques et appelé à un effort conjoint afin de mobiliser l'attention sur cette problématique essentielle.
La lutte contre la pêche illicite non-déclarée et non-réglementée (INN) a dans ce sens occupé une place centrale lors des échanges. Roy Angelvik a insisté sur la nécessité d'une coopération mondiale en matière de lutte contre la pêche illicite.
Aziz Boucetta