Caisse de compensation: Une réforme qui fait du surplace
Entamée en 2014 avec la suppression de la subvention des hydrocarbures, la réforme de la Caisse de compensation demeure à la merci de l’opérationnalisation du Registre social unifié (RSU), un dispositif de ciblage des aides directes au profit des populations les plus vulnérables, qui permettra d’asseoir un système de compensation ciblée.
Dans un temps où les maux sociaux continuent de s’accentuer, face à une crise sans précédent, qui devra laisser des séquelles profondes sur l’économie nationale, la poursuite d’une telle réforme aurait permis de « renflouer les caisses de l’État, voire même de générer des ressources financières supplémentaires au profit des secteurs sociaux ».
Dans l’attente de la mise en place de ce Registre, les prix du gaz butane, du sucre et de la farine nationale de blé tendre continueront d’être subventionnés en 2021. Le projet de loi de finances (PLF) 2021 prévoit à cet effet, une enveloppe de 12,5 milliards de dirhams (MMDH), dont 80% sera attribué à la subvention des prix du gaz butane.
Dans une déclaration à la MAP, le professeur d’économie et de finance à l’Université Mohamed V de Rabat, Hicham Sadok a indiqué que « l’analyse des chiffres du PLF 2021 démontre que la réforme du système de compensation est toujours à l’arrêt, une réforme structurelle qui n’a pas encore abouti, même si le premier pas, qui était le plus difficile, a été entamé depuis 6 ans déjà ».
« Le démantèlement de la subvention des hydrocarbures en 2014 a eu un effet immédiat sur les comptes publics, puisque la charge de compensation est retombée de 56 MMDH en 2012 à 12 MMDH en 2015 », a-t-il fait remarquer, notant que cette décompensation a permis d’économiser l’équivalent de
5% du PIB.
« La poursuite de cette réforme aurait permis d’économiser davantage, soit 2% du PIB en 2021″, a-t-il estimé, ajoutant que ces économies réalisées auraient pu être orientées vers la relance dans plusieurs domaines.
Abordant les perspectives d’une décompensation progressive, M. Sadok a noté qu’ »au-delà de 2021, et si le climat social ne se détériore pas, il serait nécessaire, dans un premier lieu, de décompenser en totalité le sucre ».
Pour ce qui est de la décompensation de la farine et du butane, il ne faut pas que les couches défavorisées soient impactées, a insisté l’universitaire, pour qui « décompenser dans un contexte de crise semble difficile ».
C’est dans ce sens qu’il a recommandé, dans l’attente du RSU, d’allouer des allocations scolaires pour les enfants nécessiteux et de subventionner l’électricité des familles dans les zones et quartiers défavorisés, pour corriger le démantèlement de la compensation du gaz et de la farine.
Mettant en avant l’importance du Registre social unifié pour gérer l’affectation des ressources publiques consacrées à la lutte contre la pauvreté et la vulnérabilité, il a relevé que « cet outil très attendu », est « malheureusement » un chantier toujours en cours.
Ce dispositif devrait déboucher sur la mise en place d’un système d’information social assez éclairant pour la prise de décision, a-t-il fait observer, notant que « le déclenchement de la crise sanitaire a montré notre retard à ce niveau, de même que le niveau de qualité d’informations dont dispose le pays pour pouvoir agir justement et efficacement ».
Et l’universitaire d’ajouter que la rigueur du processus d’éligibilité, le choix des variables relatives aux ménages et les modes d’acheminement des aides sociales, sont parmi les principaux défis auxquels le RSU devra s’apprêter à affronter.