Ambiance de fin de règne au congrès de l’Istiqlal

Ambiance de fin de règne au congrès de l’Istiqlal

Le congrès tant attendu du parti de l'Istiqlal s’est finalement ouvert, dans une incroyable cohue et une représentation très discrète de la classe politique nationale, et du gouvernement. Hamid Chabat était là, avantageux à son habitude, mais moins agressif que de coutume, et Nizar Baraka aussi, tout en discrétion. Les jeux semblent faits, tant on sent dans la salle un engouement particulier et sincère pour le président du Conseil économique, social et environnemental. Mais on verra bien, demain 30 septembre en fin de soirée.

La salle

L’assistance est nettement moins nombreuse que prévue... sur les 5.700 congressistes annoncés, ils sont tout au plus 2.500 à 3.000. Rangs clairsemés, militants peu ou pas intéressés, l’ambiance est soporifique. Évoquant l’heure de la sieste du vendredi.

Même l’arrivée de Nizar Baraka passablement stressé  ne réveille pas la foule, sauf ceux près desquels il est passé. Puis, soudain, la salle se dresse brusquement pour sauver l’incroyable cafouillage au moment d’entonner les deux hymnes, celui du pays puis celui du PI...

On commence d’abord par celle de l’Istiqlal, avant que quelqu’un ne fasse la remarque et demande de démarrer l’hymne national, qui cale aux premières notes. Ce sont les scouts du parti, aidés par l’assistance, qui chantent alors l’hymne national a cappella, avant de hurler le chant de l’Istiqlal.

Les invités

Pas grand-monde, là non plus, à prendre place face aux membres du Comité exécutif au grand complet, sourires de circonstances sur les lèvres.

Peu de ministres ont fait le déplacement, à l’image de Nabil Benabdallah, venu au titre du PPS, accompagné de Charafat Afailal et de Khalid Naciri. Les autres partis, en dehors du PJD, étaient peu  ou sous représentés. Pour le PJD, c’est Abdelilah Benkirane, le nouveau grand ami de Chabat, qui est venu, savourant l’ovation à laquelle il a eu droit, et il est arrivé flanqué de Slimane Elomrani, son adjoint au secrétariat général. Point intéressant : Nizar Baraka, en voyant Benkirane arriver, le salue, lui parle gentiment, lui cède sa place et… s’en va s’asseoir loin, très loin. Peut-être les dernières attaques de Benkirane contre lui ? Sans doute… Benkirane est resté, assis à coté de Saâd Alami, ancien ambassadeur et grand apparatchik de l’Istiqlal, et Abdellatif Abdouh, vice-président Istiqlal de la Commission de la Justice à la Chambre des représentants, et accessoirement condamné à 5 années d’emprisonnement pour, entre autres, corruption.

Pour l’UC, c’est l’obscur Driss Radi qui était là, alors que le PAM a délégué son secrétaire général par intérim Habib Belkouch. Le MP est représenté par Mohamed Moubdiî, fraichement sorti du gouvernement et Said Ameskane, lointain ministre d’un lointain gouvernement. L’USFP a délégué Mohamed El Yazghi, plus une ou deux personnes pas très connues.

Mais on aura remarqué, et tout le monde l’a remarqué, ou en a même fait la remarque... que le RNI n’était pas là. Tout simplement. Cela rappelle les moments épiques de la formation du gouvernement Benkirane en octobre 2016, quand le parti d’Aziz Akhannouch avait mis son veto pour l’entrée de l’Istiqlal.

Enfin, Moulay Mhamed el Khalifa s’est illustré par son absence, de même que Mohamed Louafa. Mais lui a quitté le parti voici longtemps, lui préférant le gouvernement. Les deux ténors tonitruants de l’Istiqlal ont brillé par leur absence.

Les discours

Rien de spécial, là encore… Abdallah Bakkali, président de la désormais dissoute commission de préparation a dit quelques mots dont on aura retenu le principe de l’indépendance des partis dans leurs prises de décision, et aussi cette idée très en vogue actuellement sur les différends et les façons de les régler, entre amis… Le conflit inter istiqlalien est alors dans tous les esprits.

Puis arrive l’ambassadeur de Palestine, ovationné, qui dit beaucoup de bien du Maroc, des Marocains et des relations entre le Maroc et la Palestine.

Et enfin, Chabat, clou du spectacle, qui n’aura pas été au rendez-vous. Phrases longues, quelques « Allah Akbar » pour mettre du relief, une relecture historique de la région maghrébine pour rappeler sa cruelle mésaventure mauritanienne, et aussi, cette phrase : « Le congrès de 2012 (qui l’a consacré, contre Abdelwahed el Fassi, NDLR), était historique car c’est la première fois qu’une véritable compétition démocratique avait eu lieu entre deux challengers »… Très aimable pour feu Boucetta et le très flegmatique Abbas el Fassi présent dans la salle, riant doucement.

Et c’est tout… Un congrès, en fait, qui n’en a que le nom, le véritable enjeu étant la journée de demain, au soir, avec l’élection du nouveau secrétaire général. Hamid Chabat rempilera-t-il ? Rien n’est exclu, connaissant le personnage et son sens de la manipulation et de l’intrigue… Nizar Baraka sera-t-il élu ? Rien n’est gagné, mais disons qu’il a toutes ses chances.

Aziz Boucetta