Le G5 Sahel sur le gril au sommet de l’UA

Le G5 Sahel sur le gril au sommet de l’UA

Emmanuel Macron est attendu ce lundi à Nouakchott pour un déjeuner avec les chefs d'Etat de l'Union africaine, suivi d'une rencontre avec ses homologues du G5 Sahel, un double échange consacré à la sécurité en Afrique sur fond de « failles » persistantes et d'un durcissement de la ligne américaine.

Pour la première étape de sa mini-tournée africaine avant Lagos et Abuja au Nigeria, le chef de l'Etat français participera à un déjeuner à huis clos au Palais des Congrès de la capitale mauritanienne qui accueille le 31e sommet de l'UA.

Il devrait renouveler à cette occasion « son soutien à l'initiative de l'Union africaine en vue d'assurer un financement autonome et prévisible des opérations africaines de paix », selon l'Elysée, un enjeu de taille se heurtant aux réticences de Washington qui privilégie l'aide bilatérale à l'aide multilatérale et souhaite couper dans le budget onusien.

« Cette attitude américaine justifie à fortiori la volonté des Africains, soutenus par la France, de prendre en charge leur sécurité », relève-t-on à Paris. « Les Africains font un vrai effort politique, financier et logistique pour ce faire, ce serait paradoxal que les Etats-Unis nous disent 'on ne va pas les aider' au moment où les Africains font eux-mêmes l'effort ».

« Cet effort de l'UA et extrêmement important et nous ferons tout en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l'Onu pour nous assurer que les Nations unies répondent à cet appel », ajoute-t-on, d'autant qu'« avec l'effort financier militaire de l'UA, les contributeurs aux Nations unies en sortiront gagnants, nous allons donc tout faire pour convaincre nos partenaires américains ».

Première attaque contre le QG du G5 Sahel

La marge de manœuvre s'annonce étroite. Un « financement autonome et prévisible » des opérations africaines de paix, également prôné par l'Onu afin de réduire l'écart entre les objectifs et les ressources, suggère une hausse ou du moins un maintien des contributions des Etats membres. Or, les Etats-Unis, premier contributeur individuel au budget de maintien de la paix, ont décidé sous l'administration Trump de réduire leur part à 25% du total contre 28,5% actuellement.

Même problématique concernant la force régionale du G5 Sahel (Mali, Niger, Burkina Faso, Tchad, Mauritanie) composée de 5.000 hommes et lancée en 2017 avec le soutien de la France pour lutter contre les groupes djihadistes dans la bande sahélo-saharienne.

La lente montée en puissance de cette force, théoriquement appelée à prendre le relais de la force française Barkhane déployée dans la région, fera l'objet d'une rencontre entre Emmanuel Macron et ses homologues du G5 lundi, après le déjeuner avec les pays membre de l'UA.

« Ce sera notamment l'occasion de constater les progrès opérationnels de la force conjointe qui réalise actuellement sa quatrième opération et qui en prévoit d'autres dans les semaines à venir sur l'ensemble des fuseaux », explique-t-on à Paris. Sur le plan du financement, « on peut constater qu'il y a un début de mise en oeuvre concret ».

« Dans tous les états-majors du G5 Sahel, des primes ont été versées avec un effet rétroactif (...) et il y a des équipements qui sont attendus, de protection individuelle, qui devraient être livrés à la fin de l été, d'autres équipements d'ici la fin de l'année. »

« C'est un processus complexe mais les tuyaux sont branchés et ça commence à donner des résultats concrets », assure-t-on à l'Elysée.

Mais la question du financement reste entière. Lors...

d'une visite à Paris début juin, le président du Niger Mahamadou Issoufou, dont le pays préside le G5 Sahel, avait appelé à « chercher des sources de financement pour les autres années ».

Très symbolique, la visite du collège de Défense du G5 Sahel, école régionale de guerre qui accueillir ses premiers stagiaires en octobre, intervient après un attentat-suicide commis vendredi contre le QG de la force régionale à Sévaré, dans le centre du Mali.

Cette attaque sans précédent a fait six morts, dont deux militaires de la force conjointe et a été revendiquée par une branche d'Al Qaïda.

« Si l'état-major a été attaqué, c'est qu'il y a énormément de failles que nous nous devons de corriger si nous voulons stabiliser la région du Sahel », a reconnu le président mauritanien Ould Abdel Aziz dans une interview à France 24 diffusée dimanche.

Des « failles » à corriger dans la sécurité au Sahel

L'attentat suicide perpétré vendredi au Mali contre le QG de la force du G5 Sahel démontre qu'il « y a encore énormément de failles » dans la sécurité qui doivent être « corrigées », a déclaré dimanche le président mauritanien Ould Abdel Aziz, dont le pays accueille le sommet de l'Union africaine (UA).

L'attaque, qui a fait trois morts, dont deux militaires de la force du G5 Sahel, « touche le cœur de notre système de sécurité, l'état-major (de la force conjointe du G5 Sahel) installé (à Sévaré) dans le centre du Mali. C'est un message envoyé par les terroristes en ce moment précis, moment où nous nous organisons pour stabiliser, sécuriser notre région », a déclaré le président mauritanien à la chaîne France 24.

Cette première attaque contre le quartier général de la force conjointe, lancée en 2017, est survenue trois jours avant une rencontre à Nouakchott, en marge du sommet de l'UA, entre le président français Emmanuel Macron, qui soutient cette initiative, et ses homologues du G5 Sahel, organisation régionale regroupant la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad.

La France, qui conduit dans la région l'opération Barkhane, voit dans la force du G5 Sahel un possible modèle de prise en main par les Etats africains de leur propre sécurité.

« Le G5, c'est d'abord le Sahel, la région du Sahel. La France, nous aide effectivement, nous assiste, mais le G5 est avant tout une initiative souveraine des Etats du Sahel qui partagent et vivent énormément de problèmes. Ce sont des problèmes qui ne sont pas seulement de sécurité mais qui sont aussi la sécheresse, la pauvreté, le chômage et le trafic », a ajouté le chef de l'Etat mauritanien.

« Nous ne sommes pas du tout satisfaits de la compréhension et de l'aide que nous recevons. Nous pensons aussi qu'au niveau des Nations unies des portes nous sont fermées », a-t-il dit.

Enfin, M. Aziz a réaffirmé qu'il ne se présenterait pas pour un 3ème mandat et déclaré que le blogueur Ould Mkheitir était en résidence surveillée pour « des raisons de sécurité ».

Arrivé au pouvoir par un coup d'Etat en 2008, M. Ould Abdel Aziz, un ancien général, a été élu en 2009, puis réélu en 2014.

Dans un entretien à l'hebdomadaire Jeune Afrique paru en mars, il avait réaffirmé qu'il ne « toucherait pas » à la limitation constitutionnelle de deux mandats présidentiels et annoncé qu'il soutiendrait un candidat à sa succession en 2019.

 

Mouhamet Ndiongue

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