Syrie, l’histoire d’un remake raté

Syrie, l’histoire d’un remake raté

La guerre en Syrie entre dans sa 8ème  année. Au nom de la lutte contre Daesh, qui a occasionné l’implication des Occidentaux, la guerre a pris d’autres allures qui pourraient faire penser à un contrôle des ressources énergétiques ou un à positionnement géostratégique à long terme des puissances étrangères.

La guerre a occasionné plus de 400.000 morts et des milliers de déplacés entraînant avec elle un drame sous le regard impuissant des Nations-Unies qui laissent Américains et Russes installer le chaos dans cette région.

Le conflit aura bouleversé les relations internationales, tant le drame syrien aura redistribué les cartes de la géopolitique surtout dans cette région.

Rapidement le remake du scénario libyen s’est mis en place, une opposition, que certains observateurs occidentaux considéraient pourtant jusqu'alors comme inexistante, émerge autour d'un Conseil national syrien pro-occidental, aujourd'hui oublié. Le gouvernement syrien tombe dans le piège de la répression d'une opposition pro-occidentale.

Ensuite, les Occidentaux et d'autres acteurs régionaux, tels que l'Arabie saoudite, prennent position dans la guerre civile syrienne naissante. Aujourd’hui sept ans plus tard, en 2018, la Russie, l'Iran et la Turquie sont devenues des puissances incontournables pour la résolution du conflit et se rangent à côté du gouvernement syrien et les Etats-Unis se retrouvent marginalisés.

Perdant tous leurs repères, les Occidentaux sont ainsi menacés de ne plus avoir au sol de groupes armés leur servant de proxys. Le journal Le Monde révèle que : début 2018, les « rebelles » que soutenait Washington ne représentent plus que quelques poches tenues par les djihadistes, comme dans la région de la Ghouta, à l'est de Damas. Au grand dam des Occidentaux, l'armée syrienne est en passe de couper l'enclave rebelle en deux, isolant au nord les combattants de Jaïch al-Islam (L'Armée de l'islam), de ceux, au sud du Fatah al-Cham (ex-Front al-Nosra), Faylaq al-Rahmane (Légion du Tout miséricordieux) et du groupe salafiste Ahrar al-Cham al-Islamyya (Mouvement islamique des hommes libres du Cham).

Les Etats-Unis et la coalition arabo-occidentale ont échoué à atteindre leurs buts de guerre. Premièrement, elles n'ont pas réussi à battre Daesh ; c'est la Syrie et ses alliés, parmi lesquels la Russie, qui y sont parvenus. Deuxièmement, les Etats-Unis n'ont pas renversé le président syrien dans l’optique de faire comme l’Irak et la Libye : installer le chaos et pomper le pétrole. Ce que Moscou n’acceptera plus.

Les Etats-Unis n’ont pas fini avec la déconvenue qui rappelle leur échec à Mogadiscio parce que les forces kurdes, dans le nord du pays, ont un temps porté les espoirs des Etats-Unis et de ses alliés, parmi lesquels Israël, fervent avocat de la constitution d'un Kurdistan et, au passage, d'une dislocation de la Syrie. Néanmoins, les Etats-Unis se heurtent, cette fois, à la Turquie. Ankara a ainsi lancé le 20 janvier 2018 l'opération « Rameau d’olivier » contre l'enclave kurde d'Afrin, afin de tuer dans l'œuf la tentative américaine de constituer une force de garde-frontières s'appuyant sur les Unités de protection du peuple (YPG) kurdes. Déconvenue ultime, ce qui reste de l'ASL de 2011 coopère aujourd'hui avec l'armée turque contre les Kurdes... lesquels bénéficient de l'appui de milices pro-syriennes.

 La situation explique peut-être, sur fond d'accusations récurrentes à l'encontre de Damas, l'usage d'armes chimiques. Perdant le contrôle au profit de la Russie et ses alliés, les Etats-Unis ont récemment menacé de frapper directement et unilatéralement la Syrie, sans l'aval des Nations Unies. Si les Etats-Unis s’engagent sur cette voie, ce serait la pire erreur que commettrait Washington à moins que les motivations...

soient autres car Daesh défait, la justification avancée en premier lieu pour légitimer l'intervention militaire sous l'égide de Washington ne tient plus.

Malgré les moyens considérables déployés par la première puissance militaire mondiale et ses alliés de l'OTAN, ce sont bel et bien des puissances jusque-là cantonnées à une sphère d'influence restreinte, comme l'Iran, la Turquie ou la Russie, qui sortent renforcées de ce conflit. Ce fait confirme la remise en cause de l'hégémonie occidentale et la dernière parade militaire de Poutine en dit long sur le sujet.

15 mars 2011, 15 mars 2018 : Sept ans révolus, qui représentent une éternité pour la population syrienne, multiconfessionnelle, confrontée à l'horreur de la guerre et aux exactions terrifiantes de Daesh. Sept ans aussi de descente aux enfers pour un pays laïc, prospère, réputé pour sa qualité de vie, son niveau d'éducation, son ouverture à l'Occident. Avant que la guerre ne commence…

Ghouta orientale symbole du cataclysme

Ancien « poumon vert » de Damas, situé à l’est de la capitale de la Syrie, la Ghouta orientale est un fief rebelle qui fait, depuis 2013, l’objet de bombardements quasi quotidiens.

La fuite des habitants se poursuit dans le fief rebelle de la Ghouta orientale, en Syrie, contrôlée désormais à plus de 70 % par le régime. « Plus de 40 000 civils » ont utilisé des couloirs « ouverts par l’armée syrienne en coordination avec ses alliés russes », a fait savoir vendredi 16 mars Bashar Ja’afari, ambassadeur de la Syrie à l’Organisation des nations unies (ONU).

 « Ils se sont rendus dans des centres mis en place par le gouvernement syrien et le Croissant-Rouge arabe syrien, des abris temporaires équipés de tout le matériel nécessaire pour les prendre en charge ont été mis en place », a-t-il fait savoir devant le Conseil de sécurité à l’occasion d’une réunion consacrée à la Syrie. De son côté, l’armée syrienne, par un communiqué lu à la télévision d’Etat, a demandé aux habitants de la Ghouta orientale de fuir la zone via « des couloirs sécurisés ».

Car les frappes de l’armée syrienne et de son allié russe se poursuivent pour conquérir totalement la ville. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), près de 80 civils sont morts vendredi dans les localités de Saqba et Kfar Batna. « Les corps ont été complètement calcinés par les frappes aériennes des avions de combat russes », a affirmé Rami Abdel Rahmane, le directeur de l’OSDH. Depuis le début de l’intensification des bombardements, à la mi-février, plus de 1.000 civils ont été tués et des milliers blessés toujours selon l’ONG syrienne.

L’Unicef de son côté a décidé de mettre en place un plan d’évacuation qui permettrait à 50.000 civils de quitter la zone où vivent environ 400.000 personnes, a annoncé une porte-parole de l’ONG onusienne.

Cette année-là, le conflit a pris un nouveau tournant dans la zone avec des attaques chimiques dans les alentours de Damas ; en mai, les journalistes du Monde sur place ont révélé des attaques chimiques lancées à l’entrée de la capitale (comme quoi l’histoire est entrain de bégayer avec l’histoire des armes chimique dont Saddam Hussein avait fait l’objet d’accusation). Pour ce cas précis, l’Observatoire syrien des droits de l’Homme n’a pas annoncé les attaques chimiques mais plutôt la mort de 1.300 personnes civils et rebelles confondus. Il relève par ailleurs qu’à partir de 2015, des dizaines de civils sont affectés par les pénuries de nourriture et de médicaments.

Mouhamet Ndiongue

 

 

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