Réaction musclée du ministère de la Communication contre Reporters Sans frontières

Réaction musclée du ministère de la Communication contre Reporters Sans frontières

Plusieurs personnes, on le sait, sont arrêtées, certaines jugées et condamnées et d’autres en attente de procès, en marge des événements à al Hoceima. Parmi ces personnes, jeunes et moins jeunes, l’ONG française Reporters Sans Frontières (RSF) dénombre 7 journalistes, dont elle dénonce l’arrestation et pour lesquels elle appelle à une libération immédiate. La réponse du ministère de la Communication est tombée, rude…

Le département dirigé par Mohamed El Aârej « réfute et dément toutes les fausses allégations contenues dans les déclarations de RSF concernant le traitement des autorités marocaines à l'égard des médias nationaux et étrangers lors de leurs couvertures médiatiques de la situation dans la ville marocaine d’al Hoceima, (et) dénonce, en parallèle, le caractère partial de l’évaluation faite par cette organisation de la réalité de la liberté de presse et d’expression au Royaume ».

Le ministère rappelle que pas moins de 89 correspondants et journalistes étrangers exercent leur activité librement dans la ville, dans la région et dans le nord, mais dans le respect de la loi. Et c’est là que les choses deviennent intéressantes. Pour l’Etat marocain, est journaliste toute personne qui répond aux conditions pour l’être, et pour Reporters Sans Frontières, est journaliste toute personne disant l’être. L’écart est là, et le problème aussi. Mais l’Etat marocain respecte les lois que son parlement a adoptées en 2016.

En effet, un pack de lois a été voté l’année dernière, définissant les règles et modalités pour ouvrir un journal ou un site, et précisant les conditions pour être journaliste. Cette loi ne semble pas avoir été lue par l’ONG française qui a toujours eu un regard critique sur la relation des médias avec l’Etat marocain. Cela était certes vrai il y a encore quelques années, mais les choses ont évolué, sans que RSF ne le constate.

Tout journaliste qui affirme l’être ne l’est pas forcément, et tout support électronique disant être un média ne l’est pas nécessairement. Aujourd’hui, 7 personnes sont écrouées, et une est condamnée, Hamid Mahdaoui. RSF assure que c’est là une atteinte à la liberté de presse. Croira l’ONG qui voudra, et comprendra les arguments du ministère qui le...

souhaitera. N’est pas journaliste qui veut, et tout journaliste n’est pas, par la grâce de sa carte professionnelle, innocent de dérapages et erreurs professionnelles. Qu’il soit marocain ou étranger. Or,  la loi est la même pour tous, et il serait difficile pour RSF de déroger à cette logique, au risque de partialité, ou de perte de crédibilité.

Il aurait été donc bien plus judicieux pour l’ONG d’examiner les cas des uns et des autres avant de porter des jugements. La loi marocaine est claire et précise. RSF aurait pu, et peut-être dû, contester ce corpus juridique au moment où il était examiné, si tant est que l’ONG ait eu légitimité pour le faire.

Aujourd’hui, et si tout le monde au Maroc s’accorde pour demander la libération des détenus d’al Hoceima, c’est bien plus pour apaiser les esprits et baisser les tensions que parce qu’on croit en l’innocence de tous les détenus. Il est des moments où les Etats disposent d’informations non publiques, et à ces moments, les Etats réagissent et se défendent. C’est le cas à al Hoceima, où la contestation est vive, sans que cela soit pour autant la Révolte du Rif, avec majuscules, comme précisé sur le site de RSF…

Oui, donc, pour la libération des détenus, non parce qu’ils sont journalistes, non pas parce que RSF l’a demandé, voire exigé, mais parce que cela serait un gage de bonne volonté de l’Etat à l’égard d’une ville dont une partie de la population souffre de conditions socio-économiques difficiles. Quant au cas de Hamid Mahdaoui, il a appelé à manifester, bravant l’interdiction des autorités de la ville. Dans un Etat de droit, cela est interdit et dans le cadre légal de la profession, cela exclut le journaliste des protections offertes par la loi. Il pourra être gracié, comme il pourrait ne pas l’être, cela dépend du chef de l’Etat.

Quant à l’ONG RSF, elle pourrait, dans l’attente de la libération de tous les détenus d’al Hoceima, consulter nos lois, essayer de les comprendre, et œuvrer à les appliquer, avant de demander des faveurs qui seraient peut-être problématiques, légalement, moralement et déontologiquement.

Aziz Boucetta

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