Manifestation à al Hoceima, revendications sociales et économiques

Manifestation à al Hoceima, revendications sociales et économiques

3.500 à 5.000 selon les autorités, dix fois plus pour les organisateurs, et le tout retransmis par les télés officielles ; les choses retournent donc à la normale… Les autorités ne sont plus dans le déni, et les manifestants ne sont pas dans le séparatisme, ni dans la violence, mais dans la revendication sociale et économique. A partir de là, il faut discuter.

Ce jeudi 18 mai, donc, comme il était prévu, une grosse manifestation a animé les rues d’al Hoceima, mais dans le calme. Les manifestants brandissaient pour certains des drapeaux amazigh, ce qui ne prête pas à conséquence. On é également vu des banderoles proclamant : « Nous ne sommes pas séparatistes, nous sommes Rifains », ce qui, là aussi, est tout à fait exact. Mais c’était là la réponse des manifestants à ce fameux, et lamentable, communiqué des partis de la majorité qui, dopés par le nouveau et très sécuritaire ministre de l’Intérieur Abdelouahed Laftit, ont accusé des « parties extérieures » d’être derrière les troubles dans le nord du royaume.

Toujours est-il que les quelques milliers de manifestants ont proclamé à grand bruit leur souhait de voir se réaliser, et vite si possible, les promesses publiques pour le développement de la Région, dont le président Ilyas el Omary est en villégiature aux Etats-Unis ! Quant au gouvernement, il a toujours son approche sécuritaire. Voici ce qu’a dit Mustapha el Khalfi, porte-parole du gouvernement, après avoir constaté la légitimité des demandes de la population du nord : « La situation à al Hoceima et sa région a fait l'objet d'un large débat au sein des membres du gouvernement et qui a abouti à la nécessité du respect de...

la loi sous le contrôle de la Justice ». La loi, c’est aussi le respect des engagements du gouvernement à écouter les manifestants, puis à répondre à leurs demandes, sans forcément tout accorder, en raison des restrictions budgétaires, mais en avançant…

Jusqu’à présent, l’Etat est représenté par le wali de la Région, alors même que les membres du gouvernement, et à leur tête Saadeddine El Otmani, sont à Rabat et suivent de loin en loin les événements, informés par Laftit. Et plutôt taiseux.

Nasser Zefzafi, l’un des leaders du mouvement de contestation né après la mort du poissonnier Mouhsine Fikri fin octobre 2016, a harangué la foule, insistant sur les revendications sociales, et distillant de temps à autre des phrases martiales. Il n’est pas plus convaincant qu’el Khalfi ou les partis de la majorité. Au Rif, le chômage règne, les infrastructures manquent, et le programme Manarat al Moutawassit tarde à être – réellement – mis en œuvre.

Les manifestants ont commencé à se rassembler en début d’après-midi, convoyés sur les lieux par des grands taxis, sous l’œil attentif des forces de l’ordre venues en nombre et en renfort. Mais les cordons de policiers se sont défaits, et retirés, quand les manifestants ont commencé à marcher, demandant entre autres « la fin de la militarisation » de la ville. Aucun incident, aucune provocation, et on aura remarqué que la manifestation, « la plus importante depuis le début de la contestation », selon des témoins sur place, a été retransmise par les télévisions publiques.

Qu’attend donc le gouvernement pour se déplacer à al Hoceima et discuter, sérieusement, avec les manifestants ? C’est la question que tout le monde se pose…

AB

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