Retour sur la victoire, et la qualification, du Maroc en CAN 2017

Retour sur la victoire, et la qualification, du Maroc en CAN 2017

On le sait, et on en est contents, et fiers : le Maroc, en battant la Côte d’Ivoire ce 24 janvier au Gabon, a réalisé une magnifique prouesse. La sélection nationale a battu la grande Côte d’Ivoire, tenante du titre, et s’est qualifiée en quarts de finale de cette compétition, avec deux victoires et donc 6 points.

Les records du temps battus

Cela fait donc 13 ans que les Marocains vivotent en queue des équipes du continent. Soit ils sont éliminés dès le premier tour, en général de la manière la plus humiliante qui soit, soit ils restaient chez eux, même pas capables de se qualifier. Pour cette CAN 2017, le Maroc s’était qualifié de manière relativement aisée et, après le hiatus de départ contre la République démocratique du Congo, il s’est brillamment repris contre le Togo, puis a confirmé contre la Côté d’Ivoire… qu’il n’avait pas battu depuis le début des années 90 !

Le problème des Marocains est essentiellement leur mental. Cette soirée du 23 janvier, à Oyem, ils ont pu affronter leurs démons, et les laisser aux vestiaires, malgré un jeu parfois cafouilleux et imprécis. Mais en sport, c’est le résultat qui compte, dit-on…

La joie et la confiance reviennent…

Cela faisait longtemps, bien longtemps, que les Marocains n’avaient pas déboulé dans les rues, arborant leur drapeau et leurs plus beaux sourires. Oh, il y a bien eu des petites victoires de-ci delà mais rien de véritablement sérieux. Pour retrouver une telle joie et une telle ferveur, il faut remonter à l’épopée tunisienne des Marocains, en 2004… il y a 13 ans !

Avant le début de la CAN au Gabon, le public n’y croyait pas trop, surtout après la défaite contre l’équipe de Finlande le 9 janvier. Et la personnalité d’Hervé Renard, en plus de la composition de son équipe, n’étaient pas tout à fait rassurants. Mais les voies du football et du mental des footballeurs sont impénétrables, et surtout imprévisibles.

Le Marocain, comme le Brésilien, a un ballon de foot au pied dès son plus jeune âge, dans les quartiers, les rues et les ruelles. Et la population, comme au Brésil, a une relation passionnelle avec ses joueurs nationaux. La comparaison s’arrête là car les Brésiliens, eux, concrétisent, jouent, et gagnent, sans jamais douter d’eux-mêmes (sauf peut-être lors de l’historique défaite contre les Allemands par 7 buts à 1, au Mondial 2014). Les Marocains, pour leur part, ont très souvent proie aux doutes, et aux polémiques…

Et puis, n'oublions pas que le Maroc, exclu de la CAN 2015 pour l'avoir voulu reporter en raison d'Ebola, avait été suspendu pour les...

deux prochaines CAN. Il avait fallu l'arbitrage du Tribunal de Lausanne pour restaurer le royaumedans son droit... Et le Maroc prend, avec cette victoire d'hier, une belle revanche...

Les polémiques

Avant la compétition, le moins que l’on pouvait dire de Renard est qu’il ne convainquait pas… Trop modeste, palmarès hors Afrique trop étriqué et lui-même n’étant pas très proche de son public, ledit public nourrissait à juste titre des doutes… surtout après la récente sortie du concerné sur sa volonté de retourner dès que possible en France, pour s’y imposer. Nous avions l’impression d’être une simple marche dans le parcours de cet homme.

Mais il a gagné, et a qualifié son équipe, en battant les redoutables Ivoiriens, tenants du titre et grande équipe continentale.

Concernant l’équipe et ses neuf pays de provenance des joueurs, elle n’était pas à son tour très convaincante. « Les joueurs ne se connaissent pas »… « Les styles de jeu sont très différents »… « Les joueurs sélectionnés ne sont pas au point »… Tels étaient les commentaires que l’on entendait et que l’on voyait partout.

Une violente polémique est née récemment suite aux propos passionnés d’un chroniqueur radio qui a recommandé de réfléchir à l’interdiction des binationaux en équipe nationale. Les binationaux, tout court, ont vertement réagi et les insultes ont commencé à fuser contre ledit chroniqueur, qui n’avait pourtant rien fait d’autre qu’exprimer son opinion…

Et maintenant ?

Sans être aussi tranché sur la présence ou non de binationaux au sein de l’équipe, il serait bon d’observer les choses avec du recul… D’abord, éviter de se laisser enflammer par cette victoire/qualification, et attendre la suite de la compétition. On verra bien…

Ensuite, il est légitime de se poser la question sur la quasi absence de joueurs de la Botola en sélection. On dira ce qu’on voudra, mais il n’est pas naturel, ni sain, qu’une sélection ne soit composée que de jeunes joueurs n’habitant pas au Maroc. Un équilibre entre nationaux et binationaux serait salutaire, et exemplaire.

Enfin, et comme le martèle un ancien responsable du football national ayant requis l’anonymat : « Il n’est pas normal qu’en 60 ans d’indépendance, le Maroc ait échoué à produire des sélectionneurs marocains. Il s’agit d’un chantier de la plus haute importance, et pour cela, il faut accepter de perdre dans l’intervalle »… On ne peut dire que ce responsable du football des années 80 et 90 ait véritablement tort.

Il est effectivement bien meilleur de construire un football national, qui gagnerait à toutes les compétitions internationales, ou en sortirait le plus tard possible, que de placer tous ses pions entre les mains d’individualités qui, sitôt parties, laissent ce sport si populaire en état de déshérence.

Aziz Boucetta

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