(Billet 635) – Variant Omicron : le Maroc s’enferme, le Japon et Israël sont juste fermes !
Et c’est reparti pour un tour… de vis. Les autorités marocaines ont publié hier dimanche un communiqué annonçant la suspension des vols vers le Maroc pour une durée de 14 jours (la RAM dit « de » et « vers » le Maroc). La raison est louable et très largement compréhensible, en l’occurrence protéger la santé des gens, et la conséquence est aussi très amplement prévisible, la ruée vers les aéroports, la panique et, pour des milliers de personnes bloquées encore une fois à l’étranger, le désespoir et la détresse.
Voici le communiqué du Comité Interministériel de suivi du Covid : « En raison de la propagation rapide du nouveau variant du virus de la Covid-19 – Omicron (B.1.1.529), notamment en Europe et en Afrique, et afin de préserver les acquis réalisés par le Maroc dans la lutte contre la pandémie et protéger la santé des citoyens, il a été décidé de suspendre tous les vols directs de passagers à destination du Royaume du Maroc, pour une durée de 2 semaines, à compter du lundi 29 novembre 2021 à 23h59. Une évaluation de la situation sera entreprise régulièrement afin d’ajuster, au besoin, les mesures nécessaires ».
Était-ce nécessaire ? Incontestablement oui. Le Maroc, ainsi que le rappelle si justement le communiqué, a engrangé des acquis et montré une excellente gestion de la pandémie en général. Confinement rude mais réussi, accompagnement hospitalier tendu mais globalement abouti, campagne de vaccination largement suivie, en dépit de doutes et résistances récemment apparus…
Il est donc naturel et normal que le Maroc s’enferme et se protège de ce variant aussi nouveau qu’inconnu. Les scientifiques pataugent dans l’incertitude, les politiques jaugent les mesures et jugent nécessaire de resserrer des mesures dernièrement assouplies. Et d’autres pays comme le Japon et Israël ont franchi le pas de la restriction d’entrées sur le territoire. Sauf que…
…. Sauf que le Japon et Israël n’ont pas exclu leurs ressortissants. Israéliens et Japonais peuvent rentrer chez eux, selon des protocoles différents, PCR et isolement à domicile, et parfois même à l’hôtel pour les personnes entrant dans leur pays en provenance des zones à risque.
Pourquoi le Maroc ne fait-il pas comme eux ? Pourquoi s’engage-t-il encore dans une voie où des centaines,
des milliers, voire des dizaines de milliers de nos compatriotes seront plongés dans la détresse. Imaginons un seul instant le cas de ces personnes coincées en Turquie, en France, aux Etats-Unis, ailleurs… sans argent car en voyage familial, médical ou touristique sévèrement budgétisé, qui se transformera en désastre financier, psychologique, parfois professionnel ! Deux semaines, c’est une éternité pour quelqu’un à l’étranger qui n’a pas prévu d’y rester !
Le Maroc a le choix, non, le devoir, l’obligation éthique de laisser entrer ses ressortissants sur son territoire, puis leur appliquer ensuite et au besoin toutes les mesures de prudence qu’il jugera utile. PCR à l’aéroport de départ et/ou d’arrivée, isolement à domicile (nous avons assez de moqaddems et chioukhs pour contrôler, qui savent contrôler…), isolement dans un hôtel désigné (sur une liste où tous les budgets se retrouveraient). Les Marocains coincés dehors accepteraient toutes les mesures qui leur seraient imposées, si tant est elles le sont au Maroc.
Le royaume ne devrait pas abandonner ses ressortissants à la misère, car on verra de la misère, ni à la détresse, car en constatera de la détresse. Le Maroc fait tout depuis quelques années, et surtout quelques mois, pour s’imposer sur la scène internationale et renforcer son image ; laisser ses citoyens en déshérence va dans le sens inverse. Le Maroc a besoin de l’adhésion de ses citoyens en cette période de développement et de mobilisation des compétences ; tourner le dos à ses gens n’y concourra pas.
Les hôtels et le transport aérien vont commencer à agoniser et l’Etat devra bien envisager de les soutenir, les renflouer pour ne pas avoir à gérer des mouvements sociaux. Permettre à nos compatriotes de rentrer chez eux devra donc, en plus d’assurer leur dignité, pouvoir assurer des ressources aux hôtels, selon la logique du « mieux que rien ».
Rééditer l’exploit de 2020, avec 35.000 Marocains bloqués à l’étranger, qui ont eu le bon goût de ne pas demander des comptes à leur retour, n’est pas une solution, mais une démission.
Mesdames et Messieurs du gouvernement, du Comité interministériel, de ce que vous voulez, laissez les gens rentrer chez eux, faites montre d’empathie et d’imagination… de responsabilité ! Et soyez-en remerciés.
Aziz Boucetta