(Billet 428) – Le RNI tient son congrès bon gré mal gré

(Billet 428) – Le RNI tient son congrès bon gré mal gré

Le RNI tient son congrès, mais personne ne le sait vraiment, l’affaire est discrète, entre membres. La grand-messe avait été annoncée en début du mois d’octobre. La date a été fixée au lendemain de l’anniversaire de la Marche Verte pour réunir les Bleus légalistes, alors que les autres, les opposants, sont rouges de colère. Pourquoi un congrès, et pourquoi le tenir ainsi ?

Le président du parti Aziz Akhannouch a été, souvenons-nous, élu par acclamations, ou presque, un 29 octobre 2016… Il est vrai qu’avec 1.707 voix pour lui contre une petite poignée de 98 votes pour son héroïque challenger, on peut parler d’acclamations, et hormis une estrade qui s’était bien inopportunément effondrée (sans blessés), tout s’était bien passé lors de ce congrès extraordinaire.

La loi organique sur les partis politiques dit qu’un parti doit tenir son congrès tous les quatre ans. Le RNI respecte la loi. Donc un congrès se tient pile, à quelques jours près, quatre ans après. Il aurait bien organisé ses agapes le 29 octobre, le RNI, mais voilà, c’était jour de fête du Mawlid. Alors une semaine après. Mais pourquoi cette précipitation et ce légalisme si pointilleux qu’il en devient suspect ?

Un vent de contestation souffle de plus en plus fort au sein de la formation qui, après quatre années, ne s’est pas fait que des amis, et s’est même fait quelques ennemis, plus ou moins bien placés… M. Akhannouch, en bulldozer consommé et assumé, a fait le job, restructuré le parti, rajouté de la teinte à un bleu de plus en plus pâle. Et il a aussi changé l’ADN de cette formation, conçue et née pour tenir un rôle d’appoint, se voyant aujourd’hui alléchée par la pole position aux législatives, ce qui propulserait le ministre de l’Agriculture, normalement, à la chefferie du gouvernement.

Mais M. Akhannouch est capitaine d’industrie et il a dirigé son affaire en général d’armée, commandant les uns et les autres à l’ancienne. Et l’ancienne, cela veut dire que tout est bien, que tout est voté par tout le monde, que personne ne conteste… Sauf qu’à l’approche...

des élections, les appétits s’ouvrent, et les hostilités aussi.

Un mouvement autoproclamé « réformateur » est donc né, contestant la tenue de ce congrès extraordinaire, et dont les membres sont pratiquement tous « anonymes », à l’exception notable de Mohamed Bentaleb, l’un des fondateurs du RNI qui y va à la machette et sabre tout ce qui bouge encore au RNI. Las… personne ne bouge ! Et pourtant… Plusieurs questions se posent et, à défaut de réponses, deviennent des questionnements.

Comment sera organisé ce congrès extraordinaire… et d’abord, pourquoi extraordinaire ? Comment tenir des congrès régionaux, en principe électifs des délégués au congrès général, avec des délais aussi petits qu’un virus ? Comment le vote sera-t-il, techniquement organisé lors de ces agapes du samedi 7 novembre, lors desquelles plusieurs centaines de convives, pardon de militants, devront examiner des rapports, lire des documents, se prononcer sur des candidatures, gérer des postures ? Les plateformes numériques, c’est bien, mais pas nécessairement pour un congrès.

Et puis, pourquoi ne pas attendre décembre, janvier, ou des temps meilleurs ? Les « réformateurs » disent que depuis le 29 octobre, le mandat d’Aziz Akhannouch est expiré. Faux, puisqu’il y a eu, Covid aidant, une suspension de tous les délais légaux, donc trois mois de plus… Le RNI aurait pu décider de reporter son congrès pour l’après-scrutin, comme d’autres avant lui, et lui-même, avaient fait voici quelques années… Et les réponses aux questions ? Rien, pas un mot sur le site du RNI, à quatre jours du congrès !

La réponse, donc, à cette précipitation, voire fébrilité, réside dans le fait que M. Akhannouch marque le pas, doute même peut-être, face aux diverses contestations qui viennent de partout, de son propre parti où certains dirigeants disent tous bas ce que les « réformateurs » clament haut et fort, de ses adversaires politiques, des réseaux sociaux… dans l’attente des conclusions du Conseil de la concurrence qui pourraient souligner la question de la moralisation de la vie publique.

A la tête du RNI, Aziz Akhannouch a bien mené la direction, tenu ses orientations, mais a péché par manque de communication politique, de concertation politique et de conviction politique.

Aziz Boucetta