Emploie/ SMIG : Menaces sur le dialogue social 

Emploie/ SMIG : Menaces sur le dialogue social 

Poussé par une restriction budgétaire due à la pandémie du coronavirus, le chef du gouvernement a décidé de surseoir à un recrutement dans la fonction publique jusqu’à 2021. Cette décision vient à  quelques jours de l’adoption par le gouvernement du projet de loi de Finances rectificative. Cependant elle faisait exception aux secteurs de la santé, de l'éducation et de la sécurité. Toutefois elle a suscité la colère des syndicats et risque de bloquer davantage le dialogue social.

A l’annonce de la nouvelle, le Bureau exécutif de la Confédération Démocratique du Travail (CDT) a souligné mercredi, que le programme de décollage économique et la loi de modification des finances doivent faire de leurs priorités la préservation des emplois et la garantie des droits de la classe ouvrière et des équilibres sociaux par le biais d'investissements publics efficaces et de la réhabilitation de la citoyenneté et de la justice fiscale. En outre, la CDT appelle le gouvernement à offrir des possibilités de travail décent, une protection sociale complète et une revalorisation des postes nouvellement créés pour les secteurs sociaux, tels que l'éducation et la santé, et des organismes d'inspection et de contrôle pour la mise en œuvre des lois sociales.

La décision pour l’instant annoncée par le Premier ministre, Saadeddine Elotmani ajoute de l’épaisseur à un climat assez tendu entre le gouvernement, les syndicats et patronat. Pour rappel, le mercredi 24 juin s‘est tenue au ministère du Travail une réunion pour discuter de plusieurs sujets dont la demande de report du relèvement du SMIG lancée par la CGEM. Cela avant la déclaration de M. Elotmani.

Et dans le cadre la relance du dialogue social, c’est le 1er juillet qui était prévu pour l'entrée en vigueur de la seconde tranche de la hausse du SMIG (5%), décidée dans l'accord signé dans le cadre du dialogue social en 2019. Mais là aussi, le problème : le patronat s’est rétracté, le coronavirus est passé par là, arguent les chefs d’entreprises.

Pour l’instant c’est un dialogue de sourds tripartite qui fait son lie dans cette période de relance économique. Interrogé par Médias24, un membre de la Confédération nationale du tourisme (CNT) déclare : « Nous n'avons eu aucun retour de la part du gouvernement. Les opérateurs touristiques rejettent catégoriquement cette hausse du SMIG ». Mieux, il ajoute : « Nous sommes en arrêt total depuis mars. Nous nous préparons à peine à reprendre l'activité. Ce n'est pas que nous ne voulons pas appliquer la hausse, nous ne le pouvons pas. Nous n'avons même pas de quoi payer les salaires, donc parler de hausse du SMIG est hors sujet ».

Sur la question du report de recrutement dans le fonction publique, la CDT a décidé d'écrire au ministre de l'Intérieur et à tous les secteurs ministériels concernés...

et à l'Union générale des marchés marocains pour ouvrir un dialogue à trois niveaux et ceci sous la supervision des gouverneurs et des travailleurs et en présence de représentants des employeurs et des secteurs gouvernementaux concernés, afin de rechercher des solutions et des mesures conjointes compatibles autour de cette décision.

La Confédération propose également la révision des accords de libre-échange dans la perspective d’établir des relations économiques plus équilibrées avec les partenaires économiques.

Sur le plan social, le syndicat appelle à revoir la décision du gel des promotions et du recrutement et l’augmentation des postes budgétaires réservés aux secteurs de l’éducation et de la santé. Il est également préconisé de réviser la loi régissant les conditions d’accès aux indemnités pour perte d’emploi et de prévoir dans le projet de loi de Finances rectificative un compte d’affectation spécial afin de couvrir l’éventuel déficit budgétaire des caisses nationales de protection sociale.

Pour ce qui est des propositions portant sur  la gestion de l’impôt, le syndicat formule un certain nombre de propositions portant aussi bien sur la gestion de l’impôt sur le revenu que  l’impôt sur la valeur ajoutée et l’impôt sur les sociétés. Ainsi, et en ce qui concerne l’impôt sur le revenu, le syndicat suggère de revoir les tranches d’impôt sur le revenu en vue de réaliser un équilibre entre les bas salaires et ceux supérieurs  afin de réduire les disparités entre les deux. La CDT met aussi l’accent sur l’importance d’exonérer les indemnités à caractère social de toute forme d’imposition et de généraliser l’exonération sur les pensions de retraite jusqu’à un plafond de 6.000 DH.

Pour le volet relatif à  l’impôt sur valeur ajoutée, les propositions de la CDT portent sur  le maintien de la mesure de l’exonération de certains produits de première nécessité, comme les traitements des maladies chroniques. En contrepartie, le syndicat propose  de porter le taux d’imposition des produits de luxe à 30%. En effet, selon cette formation syndicale, ce type d’impôt doit encourager à promouvoir la demande intérieure des produits portant le label marocain.

Pour ce qui est de l’impôt sur les sociétés, les mesures proposées par le syndicat visent à  faire de cet impôt un instrument pour encourager les investissements et préserver et créer de nouveaux postes d’emploi. Concrètement, la CDT préconise dans ce sens de lutter contre l’évasion fiscale et d’encourager les entreprises à investir une partie de leurs gains dans la modernisation des moyens de production. Enfin et pour  ce qui est de l’impôt sur la propriété, le syndicat propose de mettre en place un impôt sur la fortune cumulée et sur l’héritage à partir de certains niveaux et de déployer les montants cumulés pour financer le Fonds de solidarité proposé par le même syndicat.

Mouhamet Ndiongue