(Billet 205) – Nos enfants de 10 ans ne savent ni lire ni écrire…

(Billet 205) – Nos enfants de 10 ans ne savent ni lire ni écrire…

Apprentissage des langues ou langues d’apprentissage ? Voici la question savante que l’on pose depuis plusieurs années pour l’adoption de la loi-cadre sur l’éducation… Dans les deux cas, l’apprentissage est mauvais au Maroc. On dépense de l’argent, beaucoup d’argent, pour aboutir au final à des gamins de 10 ans qui ne maîtrisent pas la lecture, et ils sont en proportion de 65 % (Banque mondiale) ! On pourrait croire à un complot de l'institution financière, mais non...

Rachid Belmokhtar, l’ancien ministre de l’éducation nationale, l’avait déjà dit en 2015 : à leur sortie du primaire, 74% des enfants ne savent pas convenablement lire et écrire. Et c’est ainsi qu’ils aborderont l’enseignement secondaire, où l’abattement de masse se poursuivra… Une fois le bac en poche, on peut raisonnablement estimer qu’ils seront quelques-uns à savoir lire et écrire, et aussi peut-être réfléchir, avant d’entamer leur parcours universitaire…

Rien d’étonnant, donc, que les rangs des chômeurs grossissent ainsi d’année en année, et les mécontentements avec. Les apprenants et leurs familles ont raison de s’énerver, car doublement grugées : d’abord par des établissements d’enseignement qui ressemblent à tout sauf à des établissements d’enseignement, et ensuite sur la qualité de l’enseignement prodigué. La bonne nouvelle est que selon les pédagogues, quand un enfant présente un déficit cognitif à 10 ans, il sera toute sa vie médiocre. Pas de menace à en attendre donc…

Cela fait 20 ans qu’on cogite copieusement et massivement sur la problématique de l’enseignement et de l’éducation. Et on vient même de décider de la langue d’apprentissage, 63 ans après l’indépendance du pays ! Nous avons eu droit à plusieurs acronymes compliqués comme la...

Cosef ou le Csefrs, dirigés par des gens aux patronymes aussi divers que MM. Meziane Belfqih ou Azzimane. Mais ça veut pas ! Plus de rapports à lire à de bienheureux savants ne procure pas nécessairement la faculté d’écrire à de malheureux apprenants. Rien à faire, et c’est comme si l’on était dans des sables mouvants, où plus on bouge et plus on s’enfonce… on touche le fond, au singulier, alors que d’autres touchent les fonds, avec « s ».

Au final, nous sommes à la traîne dans un monde en évolution perpétuelle et rapide, où il faut savoir non seulement lire, mais aussi avoir la capacité d’entreprendre, d’analyser, d’innover… A défaut, c’est toute une génération qui risque d’être sacrifiée sur l’autel de l’indifférence, de l’incompétence et de la très mauvaise gouvernance de dirigeants tombés en politique sans se faire mal, mais en en faisant autour…

Mais rassurons-nous, si nous sommes mauvais, nous ne sommes pas les seuls. D’autres nations, comme nous sous-développées, présentent de telles performances, tout aussi sous-développées. Comparons-nous donc à elles et donnons notre force de persuasion pour nous convaincre que c’est comme cela… et ne regardons surtout pas du côté des bons élèves comme la Colombie ou encore la Bulgarie, des pays à niveau de développement comparable au nôtre.

La question est de pouvoir répondre à cela : Pourquoi ne réussissons-nous pas à nous doter d’un système d’enseignement efficace, malgré tous les crânes d’œufs fatigants comme des remords, dont ce pays regorge ? Pourquoi la volonté politique ne remplace pas le volontarisme technocratique ? Une fois les réponses apportées, le gros du travail aura été accompli ! Bon courage, M. Benmoussa…

Aziz Boucetta