(Billet 201) – Ramid dévoile Marianne

(Billet 201) – Ramid dévoile Marianne

Blanc bonnet ou bonnet blanc… c’est donc une affaire de bonnet, de couvre-chef, quoi… Marianne a mal à son bonnet et sonnés, tout est bon dans les états-majors politiques pour attaquer, et surtout gagner des voix. Sauf que des fois, cela dérape en France et cela dépare la République. Le débat actuel est certes franco-français, mais comme aujourd’hui tout le monde commente tout sur tout le monde, sacrifions à notre tour cette nouvelle tradition comme vient de le faire le ministre d’Etat Mostafa Ramid, sans se voiler la face.

Contextualisons… La France est, depuis quelques années, très rudement touchée par des attentats perpétrés par des cinglés criminels qu’on a coutume d’appeler islamistes, des marginalisés plus ou moins vite « radicalisés ». Puis, récemment, un flic du Renseignement antiterroriste bascule lui-même en terroriste, commet un massacre à la maison poulaga, ridiculise la police et radicalise ses dirigeants. N’y tenant plus, le président, dans un geste de rassemblement national, appelle à la « vigilance citoyenne », une forme élégante de la délation ; puis on change la loi sur l’immigration (pour la 49ème fois en 45 ans !), on pointe contre les musulmans le lance-flamme à double-canon appelé RhaZemmour, et dans la foulée, on lance les grands ébats sur le voile, humiliations répétées à l’envi (ce qui a engendré une affligeante réaction communautariste d’exclusion de la part de certains musulmans).

Pendant ce temps, en nos vertes contrées, et suite à l’affaire Hajar Raïssouni, le CNDH s’invite dans le débat qui a jailli, et préconise, entre autres choses intelligentes, d’abroger tous les articles criminalisant les liens sexuels, hétéros, homos et aussi extraconjugaux. Appelé à répondre à cela, le ministre d’Etat chargé des droits de l’Homme Mostafa Ramid...

a répondu.

Il a expliqué que « le droit positif d’un pays s’appuie sur son système de valeurs : La France a fait et vu évoluer le sien et autorise désormais les mariages homosexuels, et nous, nous avons maintenu le nôtre et acceptons toujours la polygamie »… question de peuples et de consciences collectives, en quelque sorte… Le ministre d’Etat a raison, même si la loi doit changer chez nous car la conscience collective ne réduit en rien la tendresse et la promiscuité affectives… mais ceci est une autre affaire.

Et là, M. Ramid, rompu à la rhétorique, prudent et précis dans le propos, dresse un parallèle osé : Puisque la France veut imposer une tenue vestimentaire aux musulmanes, par défaut, elle rejoint donc les Talibans qui font pareil, à l’inverse. Intellectuellement, le raisonnement se tient, politiquement, il a fait grincer des dents et froncer quelques sourcils de chez nous (à l’étrange exception de ceux de M. Bourita, pourtant si prompt à dégainer et à cogner dès qu’on touche à « son » domaine réservé), certains ayant même fait passer M. Ramid pour un méchant de série B de Bollywood.

Le mérite du ministre d’Etat consiste en fait à délivrer son opinion sur un sujet, français, qui concerne ses coreligionnaires (parfois compatriotes), réagissant en quelque sorte à la condescendance réelle dont Marianne gratifie certaines de ses minorités. Mais si la France, de la Saint-Barthélemy à Drancy, en passant par Dreyfus et 1905, a toujours eu des tracas avec les religions, il n’en va pas de même pour le Maroc où la tolérance et la coexistence religieuses ont de tous temps été la règle… jusqu’à, peut-être, ces dernières années.

Aziz Boucetta