(Billet 161) – Driss Jette Tout, ou presque…

(Billet 161) – Driss Jette Tout, ou presque…

Driss Jettou est un homme méticuleux, donc malheureux… Une fois par an, il remet le rapport de « sa » Cour des comptes au chef de l’Etat, et une fois par an, il lui annonce de mauvaises nouvelles. Globalement, les organismes publics fonctionnent plutôt mal, et aucune amélioration ne serait en vue… Ainsi du rapport couvrant l’exercice 2018 qui y est allé, comme à l’accoutumée, au couteau.

Halieutis pour la pêche et SNRT/Soread pour le (tout) petit écran, AMO/CNOPS pour l’assurance et Maroclear pour la finance, les choses ne vont pas aussi bien que pourraient le laisser entendre la qualité des dirigeants et les communications béates de leurs gens. Et le tout, avec le reste, à l’avenant… Mauvaise gestion, pas d’évaluation, manque de programmation, déficit de prévisions, dirigeants incompétents, responsables inconséquents…

Pour les Objectifs de Développement durable, le Maroc s’engage et la Cour des Comptes enrage… En gros, rien de sérieux n’est fait. Pour les Objectifs 3 et 4, concernant respectivement la santé et l’éducation, la Cour des Comptes nous apprend et nous confirme ce qu’on savait déjà : ces deux secteurs ne marchent pas, mais alors pas du tout. Les ministères concernés, dit la Cour, ont procédé à « la contextualisation et à l’appropriation » des Objectifs onusiens. En réalité, et en toute médiocrité, ils ont certes « contextualisé », mais ils ne se sont rien « appropriés ».

Pour l’ONSSA, les choses sont inquiétantes : pas de contrôle dans les restos,...

sur les pesticides et sur les marchés de gros. Et les agents, poursuit la Cour, impitoyable, ont un pouvoir limité de sanctions, ce qui signifie qu’ils constatent d’un air grave les tout aussi graves infractions, puis vont en parler entre eux, entre amis…

Et comme une Cour est constituée de magistrats et que des magistrats rendent des arrêts et peuvent se montrer méchants, alors une petite escouade de mauvais dirigeants est annoncée pour le pénal. Ils sont 8 à s’être montrés indélicats, les autres, quelques dizaines, sont juste incompétents. Et comme on ne sait que rarement de qui il s’agit, cela veut dire qu’on les sermonne, qu’on les tance, qu’on les gronde, qu’on les effraie… mais qu’on les garde.

Alors à quoi sert un rapport de la Cour des Comptes ? On peut croire, depuis le temps que ce document est annuellement produit, que sa fonction première est de faire des petites frayeurs aux grands responsables épinglés pour gestion approximative, les plus sérieux dysfonctionnements étant, quand même, sanctionnés. Enfin, on pense…

La Cour des comptes, son apport et son rapport, évoquent assez curieusement ce conseil de classe qui constate que peu d’élèves sont bons, qui en sanctionne très peu, et décrète que l’on peut continuer avec les autres, sachant pertinemment que le prochain conseil sera encore plus calamiteux. Et pourtant, son œuvre devrait être sérieusement prise en compte puisqu’elle dévoile les dessous de notre modèle de dévoiement économique.

Aziz Boucetta