zoom n°23: Béji CaÏd Essebsi, l’homme de la transition démocratique

zoom n°23: Béji CaÏd Essebsi, l’homme de la transition démocratique

Le printemps arabe dans le monde arabe était le soulèvement des peuples contre la dictature des pouvoirs militaires. Son lieu de naissance était la Tunisie au nom de la « Révolution de Jasmin ». Hormis le cas de ce pays, le printemps arabe n’était pas une belle saison malheureusement, il n’a pas chassé l’armée du pouvoir et le fruit escompté, la démocratie n’a pas vu le jour.

Seule la Tunisie est parvenue à instaurer avec succès un pouvoir civil et démocratique. Comment et pourquoi elle a réussi cette transition ?

En évoquant les particularités spécifiques de la Tunisie après l’indépendance et usant de la comparaison avec ses grands voisins de Maghreb, le Maroc et l’Algérie, il y a une nécessité d’expliquer la réussite de la transition tunisienne.

Dans tout changement de régime, le problème de la transition se pose obligatoirement et de manière cruciale. Il est présent même dans le cas de la monarchie marocaine où le prince hésite naturellement du Trône. Pour une transition réussie, Feu Hassan II a fait appel au grand leader de la gauche marocaine, M. Abderrahaman El Yousfi, militant des droits de l’Homme. L’unité de la patrie et son amour étant au-dessus de tout et la priorité des priorités, le Roi et le leader signent un pacte moral : le nouveau roi sera adopté par l’un des hommes les plus charismatique du peuple marocain. L’histoire n’est-elle pas l’œuvre des grands hommes ?

Pour le cas de l’Algérie, ce pays vit plus de cinq mois une situation politique pour le moins inexplicable. Le soulèvement du peuple algérien, le hirak a fait démissionner Bouteflika qui aspirait à un 5ème mandat malgré son état de santé grabataire depuis des années.

Après l’indépendance du pays, les militaires accaparent le pouvoir et tiennent à le garder. Le chef d’Etat-major, Gaïd Salah est actuellement l’homme fort et le vrai président de l’Algérie.

Depuis plus de 5 mois, le hirak manifeste tous les vendredi s et les étudiants tous les mardis criant haut et fort leur rejet du pouvoir de l’armée, celle-ci jugée « incompétente » en matière de gestion et de surcroit « gravement corrompu. »

L’absence d’opposition réelle et les grands partis tels que le FLN et le RND étant les alliés objectifs du pouvoir militaire obligent le hirak à trouver dans la société civile des hommes intègres et compétents pour traduire ses aspirations en vue d’un dialogue avec Gaïd Salah...

afin d’asseoir les bases d’une transition démocratique. C’est le grand problème du hirak et donc de la transition.

S’agissant de la transition, qu’en est-il du cas tunisien ?

La Tunisie accéda à l’indépendance la même année (1956) que le Maroc, lui aussi protectorat français. Son premier président, Habib Bourguiba, l‘avocat fut baptisé « grand Majahid » par les Tunisiens. Son parti politique » Neo-destour », qui n’était pas seul réunit plusieurs élites de la Nation dont un certain Beji Caïd Essebsi, lui aussi avocat devient vite l’homme compétent de confiance, disciple du président Bourguiba.

A ce titre, il occupa plusieurs postes dont celui de premier ministre après celui du ministre des Affaires étrangères et participe aux grandes réformes engagées. Dans le domaine agricole, des milliers d’hectares furent plantés d’oliviers. Cela généra du travail pour le monde rural et fit du pays un grand exportateur d’huile d’olive.

Le secteur de la santé publique connut l’instauration du planning familial qui eut un impact très positif sur le contrôle des naissances et par la même sur l’éducation de la femme tunisienne et sur la qualité de l’enseignement. Le multipartisme étant de rigueur toutes les réformes engagées alors se réalisaient dans un esprit libéral, édulcoré même de laïcité.

De cette période riche en réalisations Beji Essebsi a hérité tout le savoir et toute l’expérience nécessaire et utile des hommes d’Etat.

Après un bref passage dans le gouvernement du président Ben Ali, il s’était mis au vert lorsque celui-ci fut chassé par la révolution du jasmin. Il ne tarda pas alors à créer son propre parti « Nidaâ tounse » (l’Appel de la Tunisie). Reconnaissant en lui une grande figure du « Bourguibisme » et un grand homme d’expérience, qui le peuple tunisien portera au pouvoir.

Auparavant, il fallait neutraliser le grand parti islamique (Ennahdha) en signant une alliance avec son leader Ghanouchi avec qui il rompra lorsqu’il fut élu président de la république.

Libre et indépendant, il s’est rarement départi de son combat pour les droits, les libertés, l’égalité et le rayonnement de la Tunisie.

La nouvelle constitution qu’il inspira, marqua de son sceau offre au peuple tunisien, aux femmes et hommes, les libertés et les droits d’un état d’un état démocratique. Grâce à ses institutions libérales et au dynamisme de sa société civile qu’animent des femmes hautement compétentes, la Tunisie devient sans conteste un exemple pour beaucoup de pays africains.

Mouhamet Ndiongue