(Billet 144) – Le Maroc ne décolle pas car ses politiques déconnent !

(Billet 144) – Le Maroc ne décolle pas car ses politiques déconnent !

Abdellatif Jouahri claironne, Ahmed Lahlimi du HCP tonne, et même le taciturne Mohamed Banchaâboune ose et marmonne… Il faut développer ce pays, il faut que la croissance s’élance et que l’économie se relance… il faut, il faut, il faut… Mais cela revient à consulter un notaire pour un mal de dos ! Les ennuis, et les enjeux qui vont avec, sont ailleurs… La croissance, en effet, ce n’est que de l’argent, alors même que le problème se trouve dans les gens et leurs codes de vie.

C’est au RNI pourtant que revient le mérite d’avoir permis de mettre le doigt sur la plaie… et la plaie est sociale, voire sociétale. Lors d’un colloque tenu la semaine dernière à Rabat, le parti a réuni un panel d’intellectuels qui, avec des mots différents et rompant avec les propos déférents, ont trouvé les mots justes pour identifier LA source de nos injustes maux. C’est la cohésion nationale, ou plutôt le manque de cohésion. Difficile de resserrer les rangs avec une société éclatée…

Et donc, si le politologue Ali Bouabid a mis en garde contre les inégalités sociales, croissantes avec la croissance économique, l’économiste Youssef Saâdani a poussé encore plus loin, évoquant avec une préoccupation même pas dissimulée la polarisation extrême de la société, degré ultime des inégalités : en gros, le quart des Marocains se soignent bien, possèdent leur(s) voiture(s), inscrivent leurs progénitures dans les écoles privées, habitent dans des logements et pas des taudis dits sociaux… et causent français… le reste, c’est l’inverse, et c’est tout le pays qui va à la renverse.

Il n’est donc pas, plus, nécessaire de...

réfléchir 107 ans sur l’article 47, sur le chef du gouvernement, sur le gouvernement, le parlement, les partis et le reste… Le problème est dans celles et ceux qui les peuplent ! Et les questions sont les suivantes : A-t-on conceptualisé la problématique sociale ? A-t-on théorisé la fracture sociétale ? A-t-on le personnel politique adéquat ? Et la réponse à ces trois questions est malheureusement « non ». Pas que nos politiques soient incompétents, mais ils se posent les mauvaises questions... quand il leur arrive de s’interroger. Pour eux, accéder au gouvernement est une fin en soi, une consécration, une flatterie de l’ego… alors que ce n’est que le début du noble acte de gouverner.

Comme l’a si bien rappelé M. Bouabid lors de cette conférence, le roi, lui, a bien compris les choses, ayant appelé, depuis près de deux ans maintenant (!!), à la réflexion autour d’un nouveau modèle économique, et donc social. Plus inclusif, moins inégalitaire, résolument égalitaire, solidaire. Las… l’Istiqlal fait de la théorie sans pratique, le RNI fait des affaires sans théorie, le PAM fait du n’importe quoi et le PJD ne fait définitivement pas l’affaire.

Dans l’attente, le taux d’emploi diminue dangereusement, deux catégories de citoyens se dégagent nettement au sein de la société (ceux qui ont et vivent, et ceux qui n’ont rien et survivent(), la perception de la justice sociale est calamiteuse, les départs définitifs du pays s’accélèrent, et le climat social et politique devient de plus en plus délétère. Rien de mieux, sans doute, qu’une bonne engueulade pour que le petit personnel file droit !

Aziz Boucetta