(Billet 133) – L'Union du Maghreb arabe a vécu… place au Maghreb !

(Billet 133) – L'Union du Maghreb arabe a vécu… place au Maghreb !

Il se passe quelque chose d’anormal au Maghreb en ce moment… quelque chose d’aussi anormal et inhabituel que magique et féérique. Une sorte de symbiose, d’alchimie, est en train de se construire entre les trois peuples, par eux et pour eux… Serait-ce la fin de cette période de tensions et de frictions, d’appréhensions et d’incompréhensions ? Cela en a tout l’air depuis quelques mois…

On a toujours dit, redit, soutenu, que si les pouvoirs politiques se chamaillaient, les peuples étaient amis, voire frères. On a dit ça, oui, puis on est passé à autre chose… jusqu’à cette année 2019 où les Algériens sont en train de bouter leur pouvoir hors des institutions, s’attellent à faire leur big bang contre leurs gangs. Puis arrive la CAN, avec chacune des deux équipes algérienne et marocaine supportée par les publics des deux nations. Poignant et émouvant. Ensuite, comme d’habitude, le Maroc a perdu et a été éliminé, mais contrairement à l’habitude, on trouve un public algérien déçu et des supporters marocains fans des Algériens…

Si les atteintes de l’Histoire sont toujours présentes, elles ne peuvent résister aux contraintes du présent, aux fins d’imprimer une empreinte à un futur de tous temps fantasmé mais aujourd’hui à portée de main. Les ennuis entre Algérie et Maroc ont commencé au milieu du 19ème siècle, avec la France, et se sont poursuivies tout au long des décennies suivantes… En 1963, après une embellie indépendantiste d’une décennie, la guerre éclata entre Alger et Rabat, et voici ce qu’en disait Charles de Gaulle, confortablement installé à l’Elysée : « Ce sont des histoires d’Arabes… (…) Nous aidons les Marocains,...

en leur fournissant des armes. Nous aidons les Algériens, en mettant à leur disposition notre aérodrome de Colomb-Béchar. Par le fait, nous les aidons à s’entretuer. Pourtant, il faut faire comme si nous étions neutres » … (C'était de Gaulle, d’Alain Peyrefitte, Gallimard)

Et puis arrive l’affaire du Sahara, qui a évolué comme on sait, avec la neutralité apparente de la France qui joue son jeu, n’ayant aucun intérêt géopolitique à une entente entre Algérie et Maroc. Mais ici comme ailleurs, les gens commencent à apprendre du passé pour mieux comprendre le présent, et rêver le futur. L’heure n’est plus aux frictions, mais à la construction.

Mohammed VI a été précurseur quand, en novembre dernier, il avait tendu la main à Alger pour un dialogue, « sans conditions ni exclusion ». La Bouteflika Band avait refusé sèchement, mais aujourd’hui, le pouvoir algérien vacille et Rabat observe ; les deux peuples commencent à parler, puis à se parler, à s’estimer, à s’attendre, de part et d’autre de la frontière toujours fermée mais selon des informations concordantes, en phase d’ouverture.

Le Maghreb est en pré-construction, avec le Maroc, l’Algérie et la Tunisie, la Libye n’existant plus pour longtemps  et la Mauritanie n’insistant plus depuis longtemps… Il semblerait que le Maghreb Arabe ne soit plus d’actualité et que l’idée du Maghreb tout court revient. Il est temps de mutualiser les acquis que chacun de ces trois pays a bâti sur des décennies : le savoir-faire économique (plus que perfectible) du Maroc, les avancées sociales et politiques tunisiennes, les richesses minières et l’art de se faire respecter des Algériens…

Soyons optimistes : le meilleur est devant nous !

Aziz Boucetta