(Billet 128) – Langues d’enseignement : et si on organisait un réfélangum ?

(Billet 128) – Langues d’enseignement : et si on organisait un réfélangum ?

Il ne faut pas toujours compter sur nos dirigeants pour les grandes décisions, et c’est pour cela que des gens intelligents ont inventé un jour le principe du référendum. Pendant que nos ministres et nos députés sont en consultation dans le bureau du bon Docteur Elotmani, et que les choses promettent d’être longues, on pourrait penser à organiser une telle consultation sur les langues d’enseignement. Puisque le gouvernement ne parvient plus à plancher, alors il faut proposer au peuple de trancher.

 

Soyons clairs : le français est maintenu dans nos écoles contre toute logique. C’est l’anglais qui prime aujourd’hui dans le monde. Soyons encore plus clairs : le français résiste chez nous car il dispose de puissants relais d’influence, qui agissent en toute inconscience, sans même avoir du français une bonne connaissance. Quand, en effet, on ne maîtrise que le français et l’arabe (ce qui n’est déjà pas si évident), il suffit de traverser le Détroit de Gibraltar pour se sentir dépassé et déclassé.

La langue française se bat et combat, débat et se débat à coups de lobbies et de francophonie (avec ou sans majuscule), mais hélas pour elle, elle hoquette et balbutie dans le monde, malgré les rodomontades de la Francophonie, elle-même dirigée par une… Rwandaise anglophone ! Pour l’anglais, il n’existe pas d’ « Anglophonie » (avec majuscule) ; la langue s’impose toute seule, par la force des choses. Sans coups bas.

Mais nous, ici, on ne sait toujours pas, comme toujours. Français ? Anglais ? Arabe ? Deux des trois...

ou les trois à la fois ? Pour l’instant, c’est rien, on ne voit rien venir… et rien ne vient. Et pourtant d’autres pays ont franchi le pas vers l’anglais : le Rwanda et Madagascar l’ont fait, l’Algérie pense à un référendum… et même la France a sauté le pas, en assurant des Masters dans ses universités en anglais, en appuyant la candidature d’une Rwandaise anglophone à la tête de la Francophonie ! Qu’attendons-nous ? Pourquoi demeurer francophones, au risque de rester aphones ? Le Rwandais Paul Kagamé avait pris la décision de basculer du français à l’anglais pour « donner la priorité à la langue qui rendra nos enfants plus compétents ».  Chez nous, en matière de langue, nos dirigeants sont aussi inconséquents qu’incompétents ; qui dit pire ?

Si donc ces mêmes dirigeants peinent à trouver, enfin, un consensus autour d’une langue d’enseignement, en plus de l’incontournable mais peu indispensable arabe, pourquoi ne pas recourir à un référendum ? L’enjeu est quand même national, sociétal, historique… il vaut donc bien une consultation nationale, sociétale et historique. Pour mettre un terme au combat homérique et au débat hystérique.

Il suffirait juste que notre gouvernement, décidément aussi fatigant qu’un remords, proclame sa faillite en matière d’enseignement et donne sa langue au chat… Rien de mieux donc qu’une grosse engueulade tombée d’en haut ou d’une ferme orientation, soufflée par le bas, pour que le personnel politique file droit, et prenne langue avec l’anglais. « Et nos enfants seront plus compétents »…

Aziz Boucetta