(Billet 93) – Un secteur privé… de morale

(Billet 93) – Un secteur privé… de morale

Les Marocain(e)s vibrent pour la santé et l’éducation, et cherchent également avoir des logements dignes de ce nom. Normal. L’Etat, les caisses vides et traqué par des organismes financiers avides, s’est soulagé de ce fardeau social, en partie, en le confiant au secteur privé. Normal aussi. Ce qui est moins normal, en revanche, voire pas normal du tout, c’est de trouver des opérateurs privés… privés de morale. L’argent est leur seul credo et Crésus est leur grand modèle.

L’Etat, lui, est pauvre comme Job, mais ses opérateurs privés en charge de services initialement sociaux sont immensément riches, et demandent à l’être encore plus, légalement ou pas, moralement ou non.  Ils manient la manne fiscale, au risque d’engendrer une panne sociale, et quand on ose une remarque, ils piquent des colères à la Joe Dalton et vous jettent à la figure l’argument du « social ».

Critiqués lors des Assises de la fiscalité par l’impudent SG du ministère des Finances, les médecins en ont avalé leurs stéthoscopes et veulent aujourd’hui lui faire rendre gorge en le traînant devant la justice. On passera sur la vulgarité et l’arrogance de certains de leurs représentants qui l’auraient bien travaillé au scalpel ; hélas, cela ne se fait plus… Mais on s’est habitués à cela, à force de fréquenter beaucoup de cliniques et certains cabinets médicaux…

Pour l’éducation, ce n’est pas mieux… un ancien ministre...

en charge de ce secteur avait été abattu en plein vol quand il avait osé penser à envisager une prudente réflexion pour mettre un peu d’ordre dans le service public. Qu’avait-il projeté ? Interdire aux enseignants du public d’aller butiner dans les écoles privées pour arrondir leurs fins de mois, malgré les engagements des privés de former leurs propres enseignants. Que pensez-vous qu’il arriva ? Ce fut le ministre qui « morfla ».

Quant aux promoteurs (pour certains comploteurs) immobiliers, ils bâtissent des logements, et surtout d’immenses fortunes, offrant aux Marocains, sans états d’âme, des cages sans confort, sans esthétique. Avec eux, pas besoin d’attendre l’enfer, le diable est dans les finitions.

Santé, éducation, habitat… les trois secteurs alternent niches et bakchichs. La puissance publique s’est trouvée en situation d’impuissance chronique face à des privés attaquant en meutes et agissant comme telles. Ce ne sont plus des corporations, mais des clans, souvent des « bandes », occasionnellement des gangs.

Finalement, le secteur public est devenu une affaire privée où nombre d’investisseurs aussi énervés que vénaux ne se privent de rien, sauf du respect de la loi et du droit. Ces gens-là bafouent la morale sans répit et amassent des fortunes sans repos. L’Etat tient la dragée haute à l’ONU, à l’UE, à l’UA… mais baisse la garde devant ces opérateurs privés dont un grand nombre devient dépravé. L’Etat serait-il devenu faible ?

Aziz Boucetta