(Billet 77) – Assises du fisc : dima dima la dîme !

(Billet 77) – Assises du fisc : dima dima la dîme !

Echange entre un père et sa fille qui ne veut pas retourner dans le royaume après ses études à l’étranger : « Ma fille, le Maroc est ton pays, tu y as grandi et tu dois y revenir pour lui rendre ce qu’il t’a donné »… « Que m’a-t-il donné, père ? C’est vous, maman et toi, qui avez payé mes études, qui avez assuré mes soins de santé, et qui m’avez envoyé à l’étranger, où je compte bien rester ». L’échange se poursuit mais, manifestement, le père manquait d’arguments et guerroyait dos au mur…

Combien de ménages se reconnaîtront-ils dans ce dialogue ? Combien de jeunes Marocains ayant obtenu leurs diplômes ailleurs préfèrent ne pas retourner ici ? Même le ministre de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur etc… l’a reconnu : chaque année, 600 ingénieurs marocains quittent le navire Maroc pour s’en aller quêter leur chance de par un vaste monde plus accueillant. Le phénomène est certes mondial, mais au Maroc la fugue générale devient primordiale.

Dans cet aussi étrange qu’attachant (si, si !) pays qui est le nôtre, l’observateur avisé et perspicace nourrit l’idée que l’administration œuvre à sa manière, à sa vitesse et à l’abri des regards, évitant soigneusement l’écoute des gens. C’est le cas du fisc qui cogite et s’agite pour trouver l’impôt juste, et surtout pour donner l’impression qu’il l’est. Et pour éviter que le tout-venant ne soit sceptique, il le noie sous un...

déluge de mots abscons, de concepts (pyro)techniques et de calculs savants à écœurer un ordinateur de dernière génération. Le contribuable incompris qui ne comprend goutte à ce jargon qui fait tout le charme des experts n’a plus qu’à se faire fraudeur.

Que veut le peuple, à part du pain et des jeux ? Une justice fiscale. Soit, mais c’est quoi un impôt équitable pour un contribuable lambda, qui ignore l’alpha et l’oméga de la dîme ? Payer moins d’impôts car il paie déjà tout pour ses enfants, qu’un Etat doit pourtant savoir, vouloir et pouvoir prendre en charge, au nom du principe des générations futures. Le problème alors est que l’éducation et la santé publiques auront encore moins de sous et continueront d’être sens dessus-dessous.

Mais cela est l’affaire de l’Etat qui, à la différence d’une entreprise, ne doit pas avoir comme seule hantise l’équilibre de ses comptes et le bonheur de ses pontes, et tant pis si ça déplaît à Mme Lagarde ! Le public attend des Assises à venir une meilleure justice et équité fiscales, point. Imaginez, un soir de rêverie, que l’Etat se montre enfin imaginatif et créatif et non agressif, voire vindicatif… le volontarisme technocratique, c’est bien, mais l’éthique démocratique, c’est mieux, bien mieux… et en payant moins d’impôt, le père susdit aurait alors des arguments à faire valoir à sa fille qui veut jouer les filles de l’air.

Aziz Boucetta