(Billet 14) - Casablanca a besoin d’une royale colère

(Billet 14) - Casablanca a besoin d’une royale colère

« Dites-moi la nature de vos transports publics, je vous dirai à quel point on vous respecte » … La dignité des citoyens d’une ville se mesure à l’état de ses équipements, le respect que leur témoignent leurs responsables aussi. Circuler et respirer à Casablanca permet ainsi de se faire une idée du véritable état de la ville, nonobstant les mobiliers urbains, bling bling à souhait.

En une semaine, un bus a brûlé et s’est entièrement calciné, en plein centre-ville… un autre a failli prendre feu le lendemain. Et le marché de gros des fruits et légumes a été partiellement détruit et ravagé par un sinistre. Au-delà de ces faits qui, somme toute, peuvent se produire partout, c'est l'indifférence des « responsables » qui heurte et retient l’attention.

Ce sont invariablement les mêmes causes, des courts-circuits, et les mêmes manquements, des extincteurs périmés et des édiles abîmés. Et ce sont toujours les mêmes explications administratives de la Ville, de la SDL Casa Transport, de Mdina Bus, de Sita et des autres, qui observent tout cela et donnent imperturbablement les habituelles réponses ronronnantes, « cahier des charges en cours », « ressources insuffisantes », « marchés publics lancés, puis reportés, puis déclarés infructueux », et des procédures judicaires en boucle…

Pour sa part, et bien que renouvelé en partie,...

le parc de taxis reste vétuste, avec des véhicules tenant par la saleté, indignes d’une métropole comme Casablanca ; les chauffeurs hagards se disputent les clients dans les gares, et toujours, partout, et un respect approximatif et douteux des règles de circulation et de sécurité. A la grande indifférence de la Ville et de sa police.

Dans un autre chapitre, la décharge de Médiouna dégage ses odeurs et ses gaz toxiques, empoisonnant les riverains. Quant à la voirie, elle n’absorbe pas la demande croissante de circulation automobile, et malgré les chantiers engagés, elle pèche par manque de projection sur l’avenir. Les voies nouvelles sont engorgées dès leur ouverture…

« Le problème dont souffre la capitale économique tient essentiellement à un déficit de gouvernance », disait en colère le roi Mohammed VI en 2013. 5 ans après, il semblerait qu’en dépit des travaux lancés ici et là et d’un bilan en pointillés, le « déficit de gouvernance » est toujours là, mais aggravé. L’ancien maire Sajid est devenu ministre et l’actuel, El Omari, ne se remet pas de ne plus l’être.

Casablanca, aujourd’hui, a besoin d’une saine et royale colère. C’est le seul antidote, en forme de boîte à gifles, à l’incurie des responsables de la ville, à tous les niveaux !

Aziz Boucetta