Rétro n°26 - Une semaine folle, molle, drôle

Rétro n°26 - Une semaine folle, molle, drôle

La fadeur n’est pas passée, elle ne passera jamais.

Lundi. Abdelali Hamieddine est dirigeant du PJD. Il est aussi conseiller à la Chambre du même nom, où il est même gradé, présidant une commission de quelque chose. Aujourd’hui, il est également inculpé d’un meurtre remontant à 25 ans, pour lequel il avait été déjà jugé, condamné et emprisonné. Mais les juges ont trouvé qu’ils ne l’avaient pas assez jugé, au regard de nouveaux éléments à charge. Il a été condamné pour participation à une réunion séditieuse, et aujourd’hui, il va être jugé pour participation à homicide. Qui vivra verra, et qui verra comprendra. Peut-être.

Le Pacte mondial pour les migrations ouvre sa conférence à Marrakech. Le ministre local Nasser Bourita ouvre les débats, et fait passer, maillet au poing, regard circulaire rapide sur la salle, la résolution mettant en place ce Pacte. Mais rassurez-vous, honnêtes gens aux pensées malhonnêtes, personne ne « vendra » rien à personne. Chacun fera en matière d’immigration ce qu’il voudra. Le pacte est NON CONTRAIGNANT, insistent les organisateurs. Fort bien, mais alors à quoi servira-t-il ? Les diplomates marocains ont la réponse, mais chut, ils ne la diront pas.

Emmanuel Macron bat sa coulpe, en différé, à la télé française. Généralement, il toise les gens, prend de haut la France d’en bas, qui lui a remonté de bas en haut un immense bras d’honneur. Manu a peur, et cela se voit, alors Manu promet. Désormais, sur la terre de France, les riches seront toujours aussi riches, et même un peu plus, et les pauvres, et bien on leur promet que leurs fins de mois difficiles commenceront le 25 et non plus le 22.

Mardi. Le PJD se réunit en Politburo, barbes prosternées et voiles consternés. Les membres dévots reprennent à leur compte le propos viril de l’ancien chef des lieux Abdelilah Benkirane : « Nous ne vous livrerons pas notre frère ! ». Le PJD serait-il donc une citadelle vertueuse assiégée, encerclée par les gens du siège ?

Le Sénat américain considère que MBS n’a démembré personne, et surtout pas Jamal Khashoggi, mais pense fermement qu’il en a donné l’ordre. Adieu chars, missiles, avions que Trump voulait absolument fourguer aux Saoudiens, qui ne savent absolument et définitivement pas s’en servir, comme on le voit au Yémen…

Mercredi. Il a glapi « Allah akbar », puis a fait un carton à Strasbourg. Lui, c’est Chérif Chekkat, ou plutôt c’était…, et il a été confronté par deux fois aux forces de l’ordre qui, par centaines, l’ont seulement blessé. Proverbe arabe : « Les malheurs des uns font le bonheur des autres ». Et voilà la Macronie qui appelle à la fin du mouvement des gilets jaunes ; ceux-ci, tout à leurs comptes de Smig, n’en tiennent aucun compte, mais comptent leurs abattis. RDV samedi pour l’acte V, mais dans la littérature française, il y a rarement d’acte VI, le V étant généralement le dernier, avant le dénouement du drame.

Les British au finish… le Brexit, May be, May be pas… on n’en sait rien, les sujets de sa Très Gracieuse Majesté veulent tout et son contraire, plus le contraire de tout. Veulent rester en UE, mais refusent les...

règles… veulent quitter l’UE mais ils se dérèglent. Des guirlandes pour l’Irlande, un commerce au forceps, des droits pas trop à l’endroit…

Jeudi. Conseil de gouvernement, sous la direction du toujours souriant et très conciliant Elotmani. Les ministres sont ailleurs… Bourita roucoule encore cérébralement avec son maillet du Pacte de Marrakech, Akhannouch n’en finit pas d’évaluer son Maroc Vert, Laftit regarde son monde par en-dessous, Ramid fulmine pour l’affaire Hamieddine, Daoudi s’amuse comme un fou, Yatim pense à sa dulcinée et MHE, calciné, a la tête qui bourdonne encore de la royale engueulade qu’il a subie quelques jours avant… Deux ou trois projets d’arrêtés, deux ou trois nominations, et tout le monde se disperse, puis vole vers de nouvelles trépidantes aventures.

John Bolton, l’homme à la moustache blanche qui officie à la Maison toute aussi blanche, est parti faire une bafouille dans un think tank. Il a déroulé une vision du monde qui court sur des décennies. Mais Bolton oublie que de toutes les manières, il sera éjecté, lui aussi, tôt ou tard, par tweet, dans quelques semaines, ou mois… et Donald Trump dira de lui après qu’il aura abattu « un travail extraordinaire pour la nation ». Mais viré quand même, sans n’avoir pu remuer un grain de sable…

Vendredi. BRI, RAID, GIGN, Vigipirate, Sentinelle… 650 membres des forces de l’ordre, rudement appuyées par le ministre Castaner, le secrétaire d’Etat, les chefs de la police, les gradés de la justice, les collaborateurs de tout le monde, les nervis du président… et finalement, tout ce monde a eu le terroriste. Sauf que ce ne sont pas ces grands hommes ni ces gros bras qui l’ont tué avec leurs gros calibres, mais une simple et tout à fait banale patrouille de police qui a aidé l’homme à… se suicider. Manu va alors sur les lieux, dûment briefé par Brigitte qui lui a bien enjoint de ne pas dire de bêtises. Alors il a joué au « père de la Nation » incandescente à défaut d’être reconnaissante.

Samedi. Et ce sont les Gilets jaunes qui remettent ça… Acte V, disent-ils. La « monnaie » que leur a distribué le président, pour citer J-L Mélenchon, n’a semble-t-il pas suffi. Mais le mouvement s‘essouffle… il faut dire que les gars ont inhalé tellement de gaz qu’on s’essoufflerait pour moins que ça. Alors ceux qui restent, la gauche de la gauche et la droite de la droite, passent aux revendications politiques : le référendum d’initiative citoyenne, ou RIC, qui ne suscite que ricanements ou rictus de la part des décideurs.

Dimanche. Le chef du PJD et du gouvernement Saadeddine Elotmani revient sur l’affaire Hamieddine, appelant au calme et disant à qui veut l’entendre, sans convaincre, que la position du PJD en faveur d’A. Hamieddine est juridique et absolument pas émotionnelle. Et le juridique insiste sur l’autorité de la chose jugée… sauf nouveaux éléments et requalification des faits jugés, ce qui est aujourd’hui le cas. Autorité de la chose jugée, c’est bien, mais juger une chose avec autorité en est une autre. Attendons les débats de la justice et les ébats des politiques.

A la semaine prochaine.

Aziz Boucetta