Du nouveau concept de l’autorité à… un nouveau concept de la gouvernance, par Aziz Boucetta
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- 16 août 2017 --
- Opinions
Au tout début de son règne, voici déjà près de 20 ans, le roi Mohammed VI avait évoqué, défini, puis exposé un nouveau concept de l’autorité. A cette époque-là, l’idée avait fait l’effet d’un coup de massue, le Maroc sortant à peine d’un demi-siècle d’autorité pure, sans autre concept que celui de l’autorité dure. Driss Basri était à la manœuvre et ses agents d’autorité étaient à l’œuvre.
Ecoutons le roi ce 12 octobre 1999, alors qu’il n’avait pas encore bouclé ses 100 premiers jours de règne : « Nous voudrions à cette occasion expliciter un nouveau concept de l'autorité et de ce qui s'y rapporte, un concept fondé sur la protection des services publics, des affaires locales, des libertés individuelles et collectives, sur la préservation de la sécurité et de la stabilité, la gestion du fait local et le maintien de la paix sociale ». Vaste programme alors…
Cela supposait une atténuation de l’aspect exclusivement autoritaire des agents de l’administration territoriale, mais bien évidemment sans préjudice pour l’amélioration de leurs prestations et de la gestion de leurs services. Cela porte un nom : la gouvernance, elle-même idée encore inconnue à l’époque, et qui devait venir en remplacement de l’ancienne conception de l’autorité et en renforcement du nouveau concept de la même autorité.
Sur le plan de l’administration territoriale et des appareils sécuritaires, tous confondus, cette approche inédite de l’exercice de l’autorité a globalement réussi. Les jeunes d’aujourd’hui n’ont plus peur ; ils parlent, critiquent, contestent et au besoin manifestent. Sans peur et sans effroi, comme naguère. Les différents – et nombreux – ministres de l’Intérieur qui se sont succédé depuis 18 ans ont su et pu réformer un ministère a priori « inréformable », de même qu’Abdellatif Hammouchi, à la DGSN, a également réussi à imprimer un changement radical, et positif,
à une administration sclérosée dans et par ses anciennes pratiques.
Mais il n’y a pas que cela… Aujourd’hui, roi, société civile et population aspirent à une seconde génération de nouveau concepts, et essentiellement celui de la gouvernance, à même de répondre aux besoins des jeunes qui arrivent sur le marché du travail… En 2011, la gouvernance a même fait l’objet d’un titre entier de la constitution. Las… force est de constater que cette gouvernance, telle que définie et souhaitée, tarde à se mettre en place, ainsi que le montre la situation à al Hoceima, clairement, et ailleurs, plus discrètement.
Le problème est que la gouvernance, version 2017, ne doit plus être le fait des seuls responsables administratifs. La gouvernance est une forme de démocratie participative, et en cela, elle met en œuvre également la société civile qui doit… participer. Mais fort malheureusement, on ne peut que constater l’absence de cette société dans la participation car elle ne croit pas, l’incurie de l’administration dans la gestion car elle ne veut pas et la totale incompétence des partis dans l’implication et même la réflexion. Car ils sont ce qu’ils sont.
Or, le Maroc de 2017 accueille la Génération Z de ces jeunes gens pragmatiques nés au début des années 90, ultra-connectés et ne reconnaissant, n’obéissant et ne réagissant à rien d’autre qu’à leur intérêt matériel et de préférence immédiat. Les jeunes de cette génération, intégrés dans leur milieu et imprégnés de leur siècle, développent des idées auxquelles adhèrent leurs aînés.
Si l’Etat central et les collectivités territoriales ne se mettent pas, immédiatement, à l’écoute de cette génération, s’ils persistent à fonctionner à la manière d’antan, s’ils continuent d’opposer leur suffisance et d’exposer leurs insuffisances comme ils le font maintenant, alors on pourrait dire et même prédire que les problèmes type al Hoceima ne font que commencer.