Journées ordinaires à la mission française, et dans ses abords…

Journées ordinaires à la mission française, et dans ses abords…

C’était mardi 5 septembre…  nos chères têtes brunes reprennent le chemin de l’école, du collège, du lycée… dans les établissements français. Les parents, fiers de leurs progénitures et confiants dans leur avenir certain, les accompagnent à bord de leurs véhicules de cylindrées variables.  Et le festival commence… et se poursuit toujours aujourd’hui, dans le plus flagrant déni de la loi et des droits. Et dans la démission et la légèreté des parents fortunés. Rousseau disait qu’ « on a tout avec de l'argent, hormis des mœurs et des citoyens ».

De l’incivisme des parents et de leurs chauffeurs

Mamans et papas conduisent donc leurs voitures, avec leurs enfants embarqués et prêts à aller à leurs établissements respectifs. Là, on se rassure dès le premier jour : les bonnes habitudes tiennent bon, aussi solides qu'une berline allemande. Le principe général est d’éviter aux progénitures de faire un trop long chemin à pied. Alors au lycée Lyautey, à Massignon Anfa ou Massignon Bouskoura, l’idée est de les déposer le plus proche possible de l’entrée. Et si on bloque la circulation, durablement, en seconde, troisième et parfois quatrième position, rien de grave, puisque le soleil luit toujours…

Lui est médecin, comme en témoigne le caducée fièrement acollé sur le pare-brise de son gros véhicule. Il soigne des gens mais pas sa conduite. Il gare son lourd 4x4 devant la porte de lycée Lyautey. Qu’il soit en 3ème position ne le dérange pas le moins du monde. En arrêtant son véhicule directement devant la porte, il fait d’une pierre deux coups : il exhibe sa voiture et son pouvoir d'achat, et il évite une marche épuisante de 15 mètres marche à sa fille qui sort du 4x4, fait quelques pas et tombe dans les bras de son amie, en plein boulevard !

La Madame, elle, doit être cadre dans une entreprise de taille respectable qu'on devine à son strict tailleur de prix considérable. Elle a des procédures et elle les suit, très certainement. Mais cette discipline vole en éclats devant Massignon Bouskoura. Madame passe à une vitesse à trois chiffres sur la double voie attenante au lycée, arrive au feu rouge pour faire demi-tour, et le fait, sans respecter le sens giratoire ni s’arrêter au feu, qui est rouge à cet instant précis. Pourquoi le faire au demeurant ? La loi n’est pas faite pour les nantis, mais pour les petits. Madame arrive donc devant l’école, abandonne son véhicule au 3ème rang, sort tranquillement de sa voiture, ouvre la portière arrière, côté conducteur…, accompagne son fils à la porte du collège, puis revient à sa voiture, lançant un regard méprisant et hautain à la ronde. Là, elle croise une connaissance, avec qui elle engage une très intéressante conversation, ponctuée de grands gestes et de petits rires. Un homme, derrière, ose un coup de klaxon, pour tenter de passer. Coup d’œil condescendant de la femme, qui lui indique qu’il a la place pour rouler, mais elle ne s’aperçoit pas qu’elle lui demande d’aller à contresens. Et alors ? Le bitume fonctionne bien dans les deux sens !

Arrive sur ces entrefaites un autre véhicule, conduit par le chauffeur de gens très certainement très puissants. Or, on le sait, il n’y a pas plus snob que ceux qui servent les riches. L’homme insère la berline suédoise en épi, entre deux voitures elles-mêmes garées en 3ème position, et, très dignement, ouvre la portière à la jeune fille qui attendait sagement la faveur ministérielle d’antan (aujourd’hui, surtout aujourd'hui, même les ministres ouvrent eux-mêmes leurs portières). Que l’arrière...

de la voiture ait bloqué la circulation ne préoccupe nullement notre chauffeur qui, une fois sa noble mission d’accompagnement achevée, revient à la voiture, ouvre le coffre, en sort un tapis, qu’il va dérouler gentiment sur le trottoir, pour accomplir son devoir religieux !

Elle, elle est voilée, et fidèle à son engagement, ne regarde aucunement les hommes dans les yeux. Alors, avec l’assurance que lui procure sa foi, elle traverse la grande voie près de Massignon Bouskoura, sans un regard pour les conducteurs qui, eux, ont un regard amusé sur le pantalon serré… elle traîne son adolescente au jeans dûment déchiré au niveau de la rotule et, soudain, au milieu de la voie, lâche sa fille, et fait un demi-tour sur place, manquant se faire renverser par un papa qui conduisait, tout en admirant les grands eucalyptus sur sa gauche. N’eût été la bienveillance divine, elle serait aujourd’hui au paradis céleste, ou dans une clinique terrestre…

De l’inconscience de (certains) enfants, fruit de l’inconsistance de (quelques-uns) de leurs géniteurs…

A quoi cela sert-il, pour certains parents, de placer leurs enfants dans les établissements étrangers en général, et français en particulier. Pour assurer à leurs progénitures un enseignement de qualité, répondraient-ils à l'unisson. Ce qui est quelque part exact, toutes choses étant perfectibles par ailleurs. Seulement voilà…  Que vaut un enseignement pédagogique sans éducation parentale ?

Au volant à 14 ans ! Début octobre, devant le lycée Massignon à Bouskoura, là où il y a une double voie… là où les conducteurs ne reconnaissent de lois que celles qui les arrangent… là où le non-droit triomphe et où l’égocentrisme luit… Une gamine de 13 ou 14 ans conduit la Porsche de ses parents, immatriculée à Rabat, signe de puissance s’il en est, avec une copine installée à côté d’elle, et des adolescents complètement inconscients jouant aux toréadors beuglant  devant la berline lancée à toute allure…

Frapper un gendarme. Voici 15 jours, un jeune d’environ 15 ans, monté sur moto, sans casque, sillonne l’avenue, toujours à Bouskoura. Interpellé par les gendarmes présents sur les lieux, il les invective, les injurie et entreprend de les corriger, du haut de sa quinzaine d’année au compteur.

Et si on brûlait la forêt… Et cette semaine, un autre jeune, de terminale S, supposé être concentré sur ses futures et dures études d’après, s’en va avec un copain à la forêt attenante, et œuvre résolument à mettre le feu ! Intercepté par un fonctionnaire qui passait par là, il a été stoppé juste avant de commettre l’irréparable.

Dans les deux cas précédents, les gendarmes ont fait leur travail, en conduisant les ados à leur brigade et en leur dressant des PV. Pour le dernier cas, celui de l’apprenti pyromane, il passera en justice.

Que retenir de tout cela ? Cette phrase d’un gendarme affecté près de ce lycée Masignon : « Les gens ici n’ont pas de problèmes matériels, ils paient toutes les amendes que vous leur exigez ! Que pouvons-nous faire de plus ? ». On revient à Rousseau : « On a tout avec de l'argent, hormis des mœurs et des citoyens », et on complète : « Pour avoir des mœurs et des citoyens, il faut de la rigueur publique, de la sévérité administrative, et surtout l’action du glaive de la justice »... en attendant, donc, que les parents, argentés, jouent leur rôle, avec leurs enfants délabrés et leur personnel compassé, aux abords de la mission française, et aussi des autres écoles privées, marocaines, belges, espagnoles, italiennes, américaines, en attendant l’arrivée des autres pays de l’ONU dans cette pépinière d’enfants appelée Maroc !

Aziz Boucetta

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