Africa Security Forum: « La sécurité est au centre des préoccupations de tout le monde », Jean Pierre Boutroy

Africa Security Forum: « La sécurité est au centre des préoccupations de tout le monde », Jean Pierre Boutroy

Le Centre de Recherche et d’Etudes Géostratégiques, ATLANTIS, co-organise avec le Forum International des Technologies de la Sécurité, FITS, l’Africa Security Forum 2018, rencontre annuelle qui réunit les acteurs les plus influents du domaine de la sécurité et de la défense à l’échelle internationale.

Comme les précédentes éditions, Africa Security Forum 2018 se tiendra à Rabat du 21 au 23 Novembre 2018 et accueillera près de 400 participants issus de 50 pays. Cette année sous le thème «Redéfinir les Axes de la Coopération Internationale face aux menaces du XXIème Siècle».

L’Africa Security Forum porte l’ambition d’ouvrir le débat et d’enclencher la réflexion sur les problématiques sécuritaires et de défense que rencontre l’Afrique avec l’objectif de mobiliser et de fédérer pour un partage d’expériences optimales et la définition d’une vision transversale.

Abordant les sujets cruciaux du moment, l’Africa Security Forum a ainsi pour vocation de contribuer à l’émergence de pistes permettant de redéfinir les axes de la coopération internationale, face aux menaces endogènes et exogènes du XXIème Siècle.

Jean Pierre Boutroy (photo ci-contre) vice-président, Atlantis center et d’Africa Security Forum répond sur les enjeux sécuritaires et la place de l’Afrique dans le domaine de la sécurité et de la gouvernance.

Quels sont les enjeux qui vous ont poussé à développer les thématiques sécuritaires

La thématique sécuritaire sous-tend tous les problèmes du continent africains, tous ces problèmes : économiques, de développement…, il y a toujours une dimension sécurité. La dimension sécuritaire pour nous c’est notre légitimité. Pour nous quand on parle de ça, on est légitime.

La sécurité est au centre des préoccupations de tout le monde, la migration doit être vue sous cet angle sécuritaire et c’était le cas du forum de l’année dernière qui s’était préoccupé du flux de personnes qui partaient du cœur de l’Afrique en direction des bords (côtes de la méditerranée, ndlr). Et qui, au fur et à mesure sont exploités et sont l’objet de tous les désordres par les mafias locales. Nous, on est concerné pas tout ça et on pense qu’on a une expertise par nous même avec les chercheurs qu’on a et nos think tanks abonnés. Ça a du sens d’évoquer ces problématiques et de dire voilà appelons un chat un chat et regardons ce qu’on peut faire nous même dans notre propre pays.

Quelle place pour l’Afrique par rapport aux autres continents sur les enjeux sécuritaires ?

L’Afrique ne doit pas se Benchmarker si elle être au niveau de l’Europe, des Etats-Unis ou de la Turquie, le continent africain a sa problématique qui répond à des logiques qui sont particulières. Quand on prend le grand bassin des Bantous, en Afrique centrale, ce bassin culturel, ce qu’on appelle les frontières invisibles, elles existent c’est les frontières de l’ethnie, mais la frontière géographique a tout coupé en morceau. Donc les problématiques entre l’Afrique et le reste du monde n’ont rien à voir.

Par contre pour le problème de la sécurité, il nous appartient d’y amener une réponse qui nous est propre. On ne...

peut pas copier ce que font les autres continents, néanmoins, l’Afrique peut s’enrichir de leur expérience. Par exemple, quand on est sur le continent africain, on peut s’enrichir de l’expérience du Maroc, qui dans beaucoup de domaines, est un pays qui a montré un bon exemple et qui peut discuter d’une manière d’égale à égale avec son frère du continent. Aujourd’hui le Maroc a fait des réalisations en 15 ans voire 20 ans où ailleurs, ils ont mis un siècle à le faire. Il faut s’inspirer de tout ça. L’Afrique est un continent jeune, il y’ a de l’intelligence, il y a de la volonté, il faut juste l’aider à s’organiser pour aller là où elle voudra aller, il faut un peu de temps.

Que pensez-vous de la gouvernance qui est une problématique majeure pour l’Afrique raison de l’échec de beaucoup de politiques publiques ?

L’Afrique doit se développer à son rythme, chaque pays doit se développer à son rythme avec sa problématique propre. C’est sûr que si les choses sont mieux distribuées, c’est mieux pour tout le monde. Il faut regarder ce qui se passe en Afrique avec le regard de l’Africain pas avec le regard de l’Européen ou de l’Américain.

Pour des choses qui peuvent sembler anarchiques, anormales comme par exemple des espèces de relations coutumières, des cryptos organisations qu’on qualifie en Europe de mafieuses ou dans le sens que ce n’est pas normal, en fait, elles remplacent des structures régaliennes qui n’existent pas ou qui ont du mal à fonctionner, comme c’est le cas d’un pays où les structures sanitaires sont déficientes parce que c’est comme ça. Pas de jugement à porter, on fait le constat, c’est comme ça ! on s’aperçoit malgré tout avec l’aide, la fraternité, le ministre tel qui est patron ou tête de chaine d’un groupe social arrive à palier un petit passe-droit, ce n’est pas bien, mais c’est un procédé qui est connu est qu’on doit soutenir.  

 En Europe sous l’égide des Nations-Unies, il a été créé des unités qui servaient à régler tous les post-conflits comme en Bosnie où il y avait une phase où les gens faisaient la guerre, des jeunes gens qui avaient 14 ou 15 ans et au gré du temps, ils se retrouvaient à 20 ou 21 ans, ils n’étaient pas l’école et étaient à moitié drogués, c’est le même que les enfants soldats en Afrique, ils étaient drogués et avaient tués. Comment faire pour les recaser ? on crée un système dans lequel on va leur dire : tu fais du trafic, c’est mieux, tu vas gagner de l’argent. Petit à petit on a créé des systèmes qui ont aidé en les ramenant après dans le droit chemin. Revenir dans la normalité.

Il faut laisser un peu temps au temps, on ne changera pas ce grand continent avec cette diversité énorme en quelques minutes et surement pas en calquant sur un modèle extérieur et c’était une des erreurs de la colonisation.

Propos recueillis par Mouhamet Ndiongue

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