L’affaire Samir revient, et cette fois sous l’angle du (bad) buzz

L’affaire Samir revient, et cette fois sous l’angle du (bad) buzz

L’affaire de la raffinerie de la Samir est née voici trois ans déjà, et ses rebondissements ne cessent depuis. Tout le monde accuse tout le monde, et le patron de la société Corall, propriétaire de la raffinerie, a attaqué le Maroc devant les juridictions internationales. Et voilà qu’un homme, appelé Mohammed Benmoussa, vient apporter son grain de sel, s’attirant les foudres d’Akwa.

Un site de la place, le Desk, connu pour ses positions anti-Akhannouch, a pris sur lui d’interroger M. Benmoussa, qui n’en demandait pas tant, mais qui a eu plus. Il s’est présenté comme « Economiste en chef » de la CGEM et a répondu à des questions plutôt orientées. Voici la question et la réponse :

« Le Desk : Pensez-vous que Aziz Akhannouch, au vu de ses positions en affaires et en politique, tire les ficelles de ce dossier au long cours ? Le scandale des hydrocarbures a-t-il une relation avec la déliquescence de La Samir ? Agit-il par opportunisme alors que le sort de la raffinerie est déjà scellé ?

Mohammed Benmoussa : Ce n’est pas à moi de le dire. C’est à la justice d’enquêter et de sévir le cas échéant. Mais il n’est pas interdit à l’opérateur économique, au responsable politique et au militant associatif que je suis, de constater de façon factuelle les trois anomalies suivantes.

Primo, il n’est pas permis dans une vraie démocratie de confondre l’exercice du pouvoir politique avec la pratique des affaires, surtout lorsqu’on dispose d’une position dominante dans un secteur économique et qu’on exerce un effet systémique sur l’ensemble des acteurs de ce secteur, voire sur l’économie du pays en général. Le groupe Akwa contrôle 40 % d’un marché où les opérateurs fonctionnent selon la logique d’un cartel.

Secundo, les institutions de régulation politique et de contrôle fonctionnent mal dans notre pays, ou ne fonctionnent pas du tout. Une libéralisation des prix des hydrocarbures mal pensée par nos politiques a permis d’offrir sur un plateau d’argent 17 milliards de dirhams aux distributeurs pétroliers en l’espace de 24 mois ! Ce chiffre ahurissant ne représente que la hausse de leurs profits. C’est un enrichissement sans cause d’un cartel, qui s’est fait au nez et à la barbe de tous les Marocains au détriment du pouvoir d’achat des consommateurs et de la compétitivité des TPME. Cette situation qui perdure encore aujourd’hui est la conséquence logique d’une double impuissance : celle du gouvernement à prendre les bonnes décisions de politique économique ou à corriger rapidement les mauvais choix de ses prédécesseurs et celle du Conseil de la concurrence à exercer ses prérogatives ou à remettre son mandat à qui de droit s’il considère qu’il en est empêché.

Tertio, force est de constater que la personne de...

Aziz Akhannouch est devenue un boulet au fonctionnement apaisé de nos institutions politiques et de notre économie : les 6 mois de blocage du gouvernement Benkirane, le dossier des hydrocarbures, l’affaire La Samir, le scandale de l’assurance agricole avec Saham, les choix contestables de ministres, le sujet de prédilection des réseaux sociaux et des médias… Il y a manifestement un climat général de défiance, mais qui s’oppose, reconnaissons-le franchement, à la confiance qu’il a su conquérir auprès du Souverain puisqu’il est ministre depuis 12 années. Nous sommes là, aux limites de notre modèle politique ».

L’attaque est frontale, la charge est personnelle. Comment peut-on parler d’hydrocarbures où tout et son contraire a été dit, et où la justice essaie de démêler le vrai du faux, alors que le gouvernement et la justice examinent encore et encore cette insoluble affaire, puis bifurquer subitement sur un « tertio » en forme d’attaque ad hominem comme on dit, contre Aziz Akhannouch ? Que viennent faire le blocage, Saham, les ministres et le reste dans cette interview sur la Samir ? Il faut dire aussi que la question était orientée, et que M. Benmoussa n’a pas su résister à l’envie de se faire plaisir. Au risque de vider son entretien de tout son fondement.

Mais toujours est-il que le groupe Akwa a réagi par la voix de son directeur général Saïd El Baghdadi, qui démonte un par un les arguments de Mohammed Benmoussa, sur la part de marché d’Afriquia, sur l’intérêt porté par celle-ci à la Samir, sur l’importation libre de carburants… De toutes les façons, cette affaire la Samir a été débattue, décortiquée, scrutée par les experts, les juges, les parlementaires, la presse… et le dernier mot reviendra aux justices nationale et internationale.

Mais l’événement proprement dit, au-delà de la raffinerie, est bien cette sortie de Mohammed Benmoussa dans le Desk, l’interviewé se présentant pompeusement comme économiste en chef au sein de la CGEM, une fonction qui n’existe pas sur le site de la Confédération, au chapitre des instances statutaires. M. Benmoussa se présente également comme membre du Conseil national du parti de l’Istiqlal, ce qu’il est en effet…

Il a été immédiatement désavoué par la CGEM qui a bien précisé qu’il ne parle qu’en son nom, et non en celui de la CGEM ou de son groupe parlementaire qu’il a évoqué dans son entretien. Il faudra attendre également la réaction de l’Istiqlal, dont la pratique a depuis toujours – hormis la période 2012-2017 – proscrit les attaques personnelles contre ses adversaires.

Quant à nos confrères du Desk, leurs attaques aussi systématiques que régulières contre des personnages publics, dont Aziz Akhannouch, sont connues mais, talentueuses de férocité, elles n’en sont pas pour autant toujours justes et pertinentes.

AB

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