La faisabilité de l’adhésion du Maroc à la CEDEAO débattue au CESE
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- 28 septembre 2018 --
- Maroc
L’adhésion du Maroc à la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) contribuera à accroitre les capacités de ce groupement, a souligné, jeudi à Rabat, le président de l’Union des Conseils Economiques et Sociaux d’Afrique (UCESA), Boulkassoum Haidara.
« Le progrès économique et la maîtrise de certaines technologies de pointe constitue un atout majeur du Royaume pour intégrer cette communauté », a dit Haidara, qui est également président du Conseil économique, social et culturel du Mali, lors d’une conférence sur « le Maroc et la CEDEAO », organisée à l’occasion de la 90è session ordinaire de l’Assemblée générale du conseil économique, social et environnemental (CESE).
« C’est ce que je souhaiterai que tous les Etats comprennent », a-t-il poursuivi, ajoutant que « toutefois, nous ne pouvons pas ignorer qu’il s’agira, par cette adhésion, de mettre en concurrence dans certains domaines, les entreprises marocaines avec celles des pays de cette communauté ».
A cet égard, Haidara a mis l’accent sur la nécessité d’établir des règles de concurrence justes et claires à même de permettre à « tout le monde d’avoir un certain développement spécifique ».
Il a en outre estimé que « la demande d’adhésion du Maroc est une formalisation de la participation de l’un des membres de la famille à l’édification et à la construction de l’édifice familial », soulignant que cette demande « ne peut être reconnue autrement pour qui connait la nature des rapports officiels multiformes et pluridimensionnels existant entre le Maroc et cette communauté ».
Rappelant que les « 15 Etats de la CEDEAO ont un poids de 630 milliards de dollars de PIB », le président de l’UCESA a fait remarquer que l’arrivée du Maroc est à même de placer l’ensemble de ces pays au 6è rang de l’économie mondiale.
Sur le plan commercial, Haidara a noté que « le Maroc ne souhaite pas faire des Etats de la CEDEAO un débouché », indiquant dans ce sens, que « l’ensemble des exportations marocaines dans ces 15 pays ne représentent que 6% ».
Par ailleurs, il s’est félicité de la qualité des relations maroco-maliennes, citant à cet effet, deux exemples concrets de « cette collaboration fructueuse entre le Maroc et le Mali » qui relèvent des secteurs bancaire et de l’Agriculture, en particulier l’élevage.
« Ces deux exemples montrent que la coopération sud-sud est possible et réalisable en faveur du bien-être de nos populations », a-t-il noté.
De son côté, le président du CESE, Nizar Baraka, a indiqué, que cette rencontre constitue une occasion de traiter du sujet de l’intégration économique du Maroc en Afrique et ses bienfaits sur la jeunesse marocaine, ainsi que sur la création de la richesse et de l’emploi.
L’objectif est d’évaluer les capacités, les potentialités et les avantages de cette intégration, ainsi que d’identifier les défis auxquels le Maroc doit faire face dans le cadre de son intégration régionale, a-t-il précisé.
Pour sa part, le directeur général de l’Institut royal des études stratégique (IRES), Tawfiq Mouline, qui a présenté les principales conclusions du rapport stratégique 2018 de l’Institut, a fait observer que le Maroc, qui accorde une importance particulière à la coopération sud-sud, place l’Afrique au cœur des priorités de sa politique étrangère.
Les enjeux
L'Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE), think tank spécialisé sur les questions stratégiques et internationales eurafricaines, et l'institut de sondage « Opinions en région » ont souhaité profiter de la tenue du 53ème Sommet ordinaire de la CEDEAO (Communauté Economique des Etats d'Afrique de l'Ouest), qui se déroulera à Lomé le 31 juillet, pour interroger les députés des quinze Parlements des pays membres de la CEDEAO ainsi que ceux siégeant au sein de l'Assemblée parlementaire de la CEDEAO....
Ce sommet qui verra inscrit à l'ordre du jour l'élargissement éventuel de l'organisation économique régionale ouest-africaine, créée en 1975, au Maroc, permettra également de voir la Mauritanie revenir au sein de cette organisation qu'elle avait quittée en 2000 et la Tunisie obtenir un statut de « membre observateur ». Ce sommet viendra aussi clore la présidence de la CEDEAO par le président togolais Faure Gnassingbé.
Dans ce contexte, l'étude menée par l'IPSE et Opinions en région, permettra ainsi de mieux comprendre les enjeux et défis de l'intégration régionale, sur le plan politique et économique, ainsi que de mieux prendre en compte leurs impacts sociétaux, et, de facto, les réponses qu'entendent y apporter les parlementaires ouest-africains. La création de la Zone de Libre Echange du Continent (ZLEC) en mars dernier, mettant en exergue la nécessaire intégration économique intra-africaine, est venue confirmer que la libre circulation des biens et des personnes, principe fondateur de la création de la CEDEAO en 1975, était la condition sine qua non du développement économique harmonieux des Etats d'Afrique de l'Ouest.
Cette étude inédite entend ainsi apporter son éclairage quant à la réflexion récente liée à l'importance de la lutte contre les vulnérabilités à travers la résilience - bien que ne remettant nullement en cause la réponse sécuritaire traditionnelle - qu'exprime la mise en place du G5-Sahel, engageant concrètement et de manière pérenne les Etats de la bande sahélo-saharienne dans leur lutte conjointe contre les facteurs d'insécurité que sont le terrorisme et la criminalité organisée. Il en sera, bien évidemment question lors du Sommet de Lomé, qui devrait confirmer également l'importance des relations interétatiques et trans-régionales, que ce questionnaire entend contribuer à mettre en exergue.
Dix points à retenir du sondage
Selon Emmanuel Dupy Président de l'IPSE dix point clés sont à retenir du sondage réalisé par l'institut.
1/ La CEDEAO recueille 90 % d’opinions favorables. Elle a plutôt bien accompli sa mission depuis sa création en 1975. C'est une institution utile et profitable.
2/ La libre circulation des personnes et des biens est plébiscitée à 80 %. C'est le grand acquis de l'organisation et cette réalité est utile à toute l'économie de l'Afrique de l'Ouest.
3/ La présidence togolaise 2017/2018 de la CEDEAO a fait du bon travail. L'initiative du Président Faure Gnassingbé d'un Sommet commun avec le CEEAC recueille la note de 7,9 sur 10 !
4/ Pour le Maroc, la porte est désormais grande ouverte. Le Royaume est attendu et il a les bonnes clefs. Son adhésion va changer la donne économique de la CEDEAO au bénéfice de tous.
5/ La Mauritanie, dont le retour est salué par 63 %, va pouvoir à nouveau participer à l'aventure ouest-africaine et apporter sa pierre. C'est un retour précieux et utile, notamment au plan sécuritaire.
6/ La Tunisie pourra « observer » de près les travaux et le fonctionnement de l'organisation ouest-africaine. C'est sans doute une première marche vers son intégration... dans quelques années.
7/ L’Algerie reste, en revanche, tenue à distance et en observation sans pouvoir espérer dans l'immédiat le statut d'observateur. Elle n'en avait, du reste, pas fait la demande officielle.
8/ La CEDEAO doit améliorer et harmoniser sa coopération avec toutes les autres organisations sous-régionales. C'est une impérieuse nécessité.
9/ La coopération entre la Commission et le Parlement de la CEDEAO, qui siègent l'un et l'autre à Abuja (Nigeria) ne peut que s'améliorer. Il s'agit de mieux se comprendre et de se faire confiance.
10/ Une monnaie unique de l'espace CEDEAO, même si elle fait rêver 54 %, est encore loin d'être une réalité.
Mouhamet Ndiongue
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