Service militaire : regards sur les différents systèmes

 Service militaire : regards sur les différents systèmes

La contribution à la défense de la patrie est une coutume vieille comme le monde. Toutes les civilisations, grecque, romaine ou même à l’ère de l’Egypte antique, la tendance était à la protection du territoire national. A l’époque, on parlait de conscription. Aujourd’hui, l’expression service militaire a pris le relais. Tour d’horizon des services militaires dans le monde, hier et aujourd'hui.

Au Maroc, le retour du service militaire obligatoire est le sujet qui alimente les conversations des jeunes Marocains, et aussi des moins jeunes. Et pourtant, cette obligation remonte au début du règne de Hassan II, en 1966. Suite aux batailles de rues meurtrières survenues entre citoyens et forces de l’ordre en 1965, soit quatre ans après le début de son règne, le défunt roi proclama l’état d’exception. Il institue ensuite, le 9 juin 1966, le service militaire obligatoire.  Le texte annonçait que tous les citoyens marocains, de sexe masculin âgés de 18 à 30 ans révolus, y étaient assujettis. La durée de la mission était de 18 mois.

En 2006, ce service national était supprimé par Mohammed VI… jusqu’à cet été. Discuté sans que rien ne le laisse deviner en conseil de gouvernement, puis en conseil de ministres, le texte qui réinstaure le service militaire prévoit que les assujettis de sexe masculin et féminin devront être âgés de 19 à 25 ans. Les autres dispositions de cette loi qui sera sans doute adoptée dans un futur proche, concernent les exemptions (handicap, études, soutien de famille).  Les appelés percevront une solde de 2.000 DH.

En France, c’est vers l’époque de la révolution que la conscription est instaurée. En 1798, l’article 1 de la Jourdan annonçait : « Tout Français est soldat et se doit à la défense de sa patrie ». Tous les Français âgés de 20 à 25 ans pouvaient être appelés s’ils étaient tirés au sort. A l’époque, le système du remplacement était permis : les bourgeois et les nobles pouvaient payer un remplaçant qui effectuera la mission à la place du désigné. La conscription a été totalement supprimée après la Restauration, en 1815.

En 1905, la loi est finalement rétablie mais connaît une véritable réforme : le tirage au sort a été remplacé par le système d’égalité en supprimant toute possibilité d’exemption, sauf pour cause médicale. Après avoir été supprimé par l’armistice, en 1940, le service militaire a été remis en place pendant la période de la guerre d’Algérie : plus d’1,5 million de Français y ont été expédiés.

On remarquera qu’en France, le service national était rétabli à chaque préparation de guerre. C’est pour cette raison qu’en 1996, Jacques Chirac ne voyant venir aucun conflit dans un horizon proche ou lointain, annonçait la suppression du service national. Aujourd’hui, Emmanuel Macron, souhaiterait le rétablir et, si l’on en croit des indiscrétions, la période sous les drapeaux pourrait aller d’une période de 3 à 6 mois.

En Tunisie, le...

service national fait actuellement l’objet d’une réforme. Le ministre de la Défense tunisien, a, en 2017, fait part de son souhait d’améliorer le texte de loi régissant le service national en y invitant les jeunes femmes aussi, parité oblige... Il faudra également, selon lui, supprimer les multiples exemptions toujours en vigueur et qui profitent aux jeunes appelés. En effet, les jeunes Tunisiens peuvent échapper au service militaire s’ils payent une compensation financière. Afin de lutter contre le chômage, le ministre affirme vouloir créer un service civil disponible au sein des ministères, collectivités locales et établissements publics.

En Algérie, le gouvernement français colonisateur de l’Algérie à l’époque instaure le service national en 1912. Les désignés étaient tirés au sort alors qu’en France, le système égalitaire était déjà en vigueur depuis 1905. Ce système a duré jusqu’à l’indépendance de l’Algérie en 1962, mais a été réinstauré en 1968.

La constitution algérienne prévoit en effet que « tout citoyen a le devoir de protéger et de sauvegarder l’indépendance du pays et doit remplir loyalement ses obligations vis-à-vis de la collectivité nationale. Tout citoyen est tenu de respecter la Constitution et de se conformer aux lois de la République ».

Aujourd’hui, c’est la loi n°14-06, publiée au Bulletin Officiel en septembre 2014, qui définit le service national. Elle dispose entre autres que la durée de la mission est de 12 mois, au lieu des 18 mois d’avant.

Mais en Algérie, les jeunes du service national étaient surtout occupées à servir de main d’œuvre peu ou pas chère pour les grands travaux d’infrastructure.

Ailleurs, les lois sont différentes mais le principe est le même. Ainsi, aux USA par exemple, la conscription est utilisée en temps de guerre exclusivement, mais elle a été abandonnée en 1973. Il reste cependant le service dit sélectif, où les jeunes peuvent demander à être intégrés, et où ils peuvent l’être, en fonction des besoins des gardes nationales dans chaque Etat.

En Europe, le service national n’est maintenu que dans 7 pays, généralement petits et peu peuplés, ayant besoin de la conscription pour maintenir une armée qui ressemble à une armée : Suisse, Autriche, Grèce, Norvège, Finlande, Danemark, Estonie et Lituanie qui a rétabli la conscription en 2015 face à la menace russe.

Mais globalement, l’imposition du service militaire recule de plus en plus dans le monde. En effet, à une époque où la technologie rend le travail du soldat de plus en plus complexe (ce qui nécessite une formation continue à grands frais), la conscription ne semble plus être une méthode de recrutement privilégiée par les gouvernements.

La sophistication du matériel militaire et la complexité des opérations demandent au candidat qu’il investisse temps et énergie, qu’il se professionnalise, ce qui implique qu’il soit parfaitement motivé.

Ce qui est rarement le cas… On verra bien ce qui se passera au Maroc, après la décision de réinstaurer ce service national.

Meriem Boucetta

 

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