Sahara - L’ONU remet en doute les accusations du Maroc… en brandissant les nuances diplomatiques  

Sahara - L’ONU remet en doute les accusations du Maroc… en brandissant les nuances diplomatiques  

Depuis dimanche dernier, les Marocains sont allés sur le front diplomatique international et essentiellement onusien, montant aux créneaux pour dénoncer des agissements et mouvements du Polisario qui pourraient remettre en cause le calme relatif qui règne dans la région.  L’ONU n’a pas trop apprécié d’être égratignée par les communications officielles de Rabat, et elle a répondu, tout en nuances diplomatiques…

Dimanche 1er et lundi 2 avril, les chefs du gouvernement et de la diplomatie, respectivement Saadeddine Elotmani et Nasser Bourita, se sont réunis avec les chefs des groupes parlementaires et les responsables de tous les partis et syndicats nationaux pour les informer de la situation dans la zone tampon du Sahara. Le Polisario a fait des incursions dans cette zone, effectuant des manœuvres et des actes qui pourraient remettre en cause le statu quo dans la région en changeant les paramètres de résolution du conflit.

L’accord de cessez-le-feu de 1991 précise que cette zone doit être entièrement démilitarisée, en maintenant une distance respectable entre armées algérienne et marocaine. Aujourd’hui, à Bir Lahlou, Tifariti, Mijek…, le Polisario s’installe, et le Maroc refuse.

Lundi 2 avril toujours, le représentant permanent du Maroc au Palais de verre de New York écrit au président du Conseil de Sécurité, et lui dit ceci : « Le Polisario a, encore une fois, récidivé, il y a trois jours, dans ses violations de l’Accord Militaire N.1, dans une autre zone du Sahara Marocain, en l'occurrence à Mahbes, et plusieurs éléments armés du Polisario se sont introduits dans cette zone, à bord de véhicules militaires, et y ont dressé des tentes, creusé un fossé et érigé des constructions à l’aide de sacs de sables. Plus grave encore, le Polisario s'apprête à transférer les locaux de certaines de ses structures administratives et militaires, des camps de Tindouf en Algérie, où ils ont toujours été établis depuis le début du différend en 1975, vers...

la zone située à l'Est du dispositif de sécurité au Sahara Marocain, dont font partie les localités de Bir Lahlou et de Tifariti ».

Lundi 2 avril toujours, l’ONU par la voix de son porte-parole Stéphane Dujarric dit ceci : « La Minurso n'a observé aucun mouvement d'éléments militaires dans le territoire nord-est ».

Tout est dans la nuance du langage diplomatique qui veut tout dire, et ne rien dire aussi, et surtout… En effet, le Maroc parle « d’éléments armés » qui entreprennent des travaux à Mahbes, dans le nord-est du Sahara, à une centaine de kilomètres à l’ouest de Tindouf, en Algérie. L’ONU, pour sa part, évoque un « mouvement d’éléments militaires », ce qui est différent, cette expression renvoyant vers l’idée d’une troupe, d’une armée, faisant mouvement, ce que les Marocains n’ont jamais dit, évoquant peut-être une unité de « génie militaire ».

Autre précision : la Minurso, composée de 216 militaires, peut-elle raisonnablement « surveiller de près » les mouvements de quelques dizaines d’hommes sur un territoire de plusieurs milliers de kilomètres carrés ? Peut-être pas, contrairement au Maroc qui,  depuis mi-novembre 2017, a placé un satellite d’observation Mohammed VI-A, doté d’une très haute définition et capable de fournir en quelques heures jusqu’à 500 clichés d’une résolution allant jusqu’à 70 cm. On se rappelle que le lancement de cet engin avait suscité les inquiétudes des Espagnols et l’irritation des Algériens. On comprend aujourd’hui pourquoi, quand on apprend que le Maroc fait état de travaux dans leurs détails (fossés, sacs de sable, tentes…).

Selon un diplomate de haut niveau, ces lectures, pour justes qu’elles soient, n’indiquent qu’une seule chose : « Le Maroc a exercé une pression très forte sur l’ONU, et il est allé très loin dans le langage diplomatique. M. Dujarric, et derrière lui l’ONU, tentent de gagner du temps dans l’attente du rapport du Secrétaire général sur le Sahara, rapport suite auquel les tractations de coulisses démarrent et les effets d’annonces s’estompent ».

AB

Commentaires