Mondial 2026 : « Le meilleur atout du Maroc sera peut-être Donald Trump… » (Carole Gomez)

Mondial 2026 : « Le meilleur atout du Maroc sera peut-être Donald Trump… » (Carole Gomez)

Carole Gomez est chercheuse à l’IRIS, spécialisée sur l’impact du sport dans les relations internationales depuis 2013. Titulaire d’un Master 1 en Droit International et Droit Européen (Queen’s University of Belfast), puis d’un double Master 2 en Droit international public – Relations Internationales, à l’Université Panthéon Assas et Sécurité internationale et défense de l’Université Pierre Mendès France à Grenoble, elle a travaillé au sein du Bureau du Cabinet du ministère en charge des Sports entre 2011 et 2013.

Ses travaux de recherche, principalement menés pour le compte d’institutions françaises et étrangères, portent sur la diplomatie sportive, les questions d’intégrité dans le sport et la réforme de la gouvernance sportive.  Après avoir étudié les ressorts du boycott sportif, elle s’est plus globalement intéressée à la performance des sanctions internationales.

Carole Gomez (photo ci-dessous) a répondu aux questions de PanoraPost sur les deux candidatures pour l'organisation du Mondial 2026 de football.

Quel est votre avis sur la candidature du trio USA/Canada/Mexique ? Est-ce une alliance sincère et crédible, compte tenu de la relation plutôt tendue entre les Etats-Unis et le Mexique ? 

Si de prime abord cette candidature portée par 3 pays peut surprendre, puisqu'il s'agirait d'une première pour une Coupe du monde de football, plusieurs éléments peuvent toutefois venir l'expliquer :

D'une part, si l'on se réfère à la règle de la rotation des continents, la Confédération de football d'Amérique du Nord, d'Amérique centrale et des Caraïbes (CONCACAF) qui n’a pas organisé de compétition depuis l’édition 1994 aux États-Unis, aurait, pour cette candidature, toutes les chances de son côté.

Ensuite, il y avait une volonté forte de la part de ces trois pays de se positionner sur cette question. Il convient de noter que les Etats Unis avaient présenté leur candidature pour accueillir la compétition en 2022, finalement devancés par le Qatar. Aussi, plutôt que de se concurrencer, et donc de s’éliminer, les Etats-Unis, le Mexique et le Canada ont émis l’idée de présenter une candidature commune, ce qui avait été en outre préconisé par Gianni Infantino début 2016.

Enfin, cette candidature commune permet également de dépasser les différends et tensions politiques entre les différents acteurs depuis notamment l’arrivée au pouvoir de Donald Trump à la Maison Blanche.

Les Etats-Unis se sont arrogé la part du lion, si toutefois ils remportent l'organisation du Mondial 2026. Cet élément ne risque-t-il pas de créer davantage de problèmes au sein de cette alliance...

?

C’est effectivement un des risques puisque quelques jours à peine après l’annonce officielle de la candidature, les premières divergences intervenaient, notamment sur le nombre de matchs organisés par chaque pays.

Ainsi, le Mexique n’hésitait pas à faire part de son mécontentement face à sa place mineure dans l’organisation, car 10 matchs seulement (sur 80), et n’allant pas au-delà des 1/8èmes de finale, seraient organisés au Mexique. Si des discussions ont été menées au sein du comité de candidature triple, l’approche de la désignation ne manquera pas de faire resurgir les désaccords et divergences entre les organisateurs.

Que vaut la candidature marocaine et quels sont ses atouts ?

Le Maroc, candidat pour la 5ème fois de son histoire à l’organisation de la Coupe du monde de football, fait montre de sa volonté toujours intacte d’accueillir cet évènement. Face à une candidature portée par 3 pays et où l’esprit du Mondial pourrait être dilué, le Maroc peut avoir une carte à jouer, tant par l’image renvoyée que par l’aspect purement pratique pour les spectateurs, qui n’auront pas à traverser un continent pour aller de match en match. Cela permettrait également de mettre en avant la forte culture footballistique du Maroc.

De plus, la FIFA pourrait également être sensible au fait d’attribuer cette nouvelle édition au continent africain qui n’a, depuis 1930, accueilli qu’une seule fois la compétition.

Enfin, le meilleur atout du Maroc sera peut-être Donald Trump…

Le mode d'élection de la FIFA constitue-t-il un avantage pour le Maroc, quand on sait que désormais ce sont les fédérations nationales qui vont voter et non le Comité exécutif de la FIFA ?

Les prévisions en matière de votes restent toujours difficiles à anticiper. Cependant, il est clair que ce mode d’élection sera équitable mais également plus transparent. Là encore, Donald Trump peut être le meilleur argument pour le Maroc, puisqu’un certain nombre de fédérations se garderont sans doute de voter pour lui.

Qu’est-ce qui va départager les deux candidatures ?

La campagne est encore longue avant le vote et la désignation, il sera donc bien difficile de prévoir l’évolution des prochains mois. La FIFA et plus généralement les fédérations vont être particulièrement attentives au projet proposé, à la qualité du dossier. La dernière ligne droite risque d’être aussi la plus délicate, car le moindre faux pas d’un comité de candidature ou d’un autre pourrait avoir un effet désastreux sur le vote final le 13 juin.

Propos recueillis par Mouhamet Ndiongue

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