L’Arabie saoudite purge… vague d’arrestations de hauts responsables

L’Arabie saoudite purge… vague d’arrestations de hauts responsables

Le prince héritier Mohamed Ben Salmane poursuit ses œuvres. Quelques mois après la révolution de palais qui l’a hissé au rang de prince héritier, le jeune homme de 32 ans a lancé une grande vague de purges dans les rangs du gouvernement et de l’armée. Quatre ministres en titre ont été limogés, et arrêtés, et plusieurs autres hauts responsables et princes ont également été embastillés.

A l’origine de tout cela, officiellement du moins, la commission anti-corruption mise en place quelques heures avant la décision stupéfiante d’arrêter tous ces dignitaires hier dans l’après-midi.  Onze princes et des dizaines de ministres, anciens et actuels, ont été interpellés, sur décision de cette commission. L'agence de presse officielle saoudienne SPA a indiqué que le but de la commission est de «préserver l'argent public, punir les personnes corrompues et ceux qui profitent de leur position». Le conseil des religieux a rapidement réagi sur son compte Twitter en affirmant que la lutte contre la corruption est «aussi importante que le combat contre le terrorisme».

Parallèlement, les puissants chefs de la Garde nationale saoudienne – une force d’élite intérieure –, et de la marine ont été limogés. Mitaeb Bin Abdullah, fils de l’ancien roi Abdallah, a notamment été écarté de la Garde nationale, un important rouage sécuritaire du royaume chargé de la protection des sites stratégiques du pays, dont les champs pétroliers. Mitaeb était le dernier des princes de la branche Abdallah à menacer Mohamed Ben Salmane. La Garde nationale, que de nombreuses sociétés étrangères ont équipé pendant des décennies, est un puissant instrument de défense du pays, composée de ses principales tribus. Elle est passée dans l'orbite du prince héritier, l'homme derrière ce mini-tremblement de terre à la cour des Saoud.

Le prince milliardaire Al-Walid ben Talal, propriétaire de l'hôtel George V à Paris, figurerait parmi les personnes arrêtées et qui font l'objet d'une enquête de la part de l'agence de lutte contre la corruption. Si la nouvelle était confirmée, il s'agirait d'une décision lourde de sens, frappant un personnage gravitant dans la sphère des investisseurs internationaux.  Il...

est actionnaire, en effet, à Apple, Four Seasons, Eurodisney, City Group… Le cours de son groupe a d’ores et déjà chuté de 10%.

L'ancien ministre des Finances Ibrahim al Assaf a également été interpellé. Des hommes d'affaires puissants, et liés parfois à des industriels français comme Baqr Ben Laden, ont également été arrêtés.

Le prince Mohamed Ben Salmane est atypique. Jeune prince héritier, il a fait ses études en Arabie saoudite et n’est pas imprégné des coutumes occidentales, mais il prône un islam plus soft que le très rigoriste wahhabisme de ses aïeux, qui a nourri nombre de djihadistes dans le monde. Fin octobre, il a promis une Arabie «modérée», en rupture avec l'image d'un pays longtemps considéré comme l'exportateur du wahhabisme. «Nous n'allons pas passer 30 ans de plus de notre vie à nous accommoder d'idées extrémistes et nous allons les détruire maintenant», a-t-il assuré sous les applaudissements des participants à un forum économique baptisé le «Davos dans le désert» (en référence au forum économique de Davos, en Suisse) qui a attiré 2.500 décideurs du monde entier.

Parmi les décisions phares dont il a été à l’origine, l’ouverture de cinémas pour le grand public et l’autorisation faite aux femmes de conduire leurs voitures, en plus de pouvoir accéder aux stades de football… Cela n’a l’air de rien, mais c’est une petite révolution dans ce pays où les femmes ne sont pas tout à fait considérées comme des humains à part entière. En permettant aux femmes d’avoir plus de droits, le prince héritier veut les avoir de son côté, et il en va de même pour les jeunes.

Et cette vague d’arrestations n’est pas vraiment un début, tout en étant un… En effet, en septembre 2017, les autorités procédaient déjà à une série d'arrestations de religieux influents et d'intellectuels. Human Rights Watch et Amnesty international avaient dénoncé une "campagne de répression" contre des dissidents. Et cela continue aujourd’hui, dans la sphère politique et familiale. Le prince Salmane, une fois roi, pourrait régner des dizaines d’années. Il modèle donc le pays à sa mesure…

AB

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