Cuba, nouvel « ami » du Maroc, mais quel ambassadeur désigner à La Havane ?

Cuba, nouvel « ami » du Maroc, mais quel ambassadeur désigner à La Havane ?

Après la visite privée, et en famille, du roi Mohammed VI à La Havane durant ce mois d’avril, et connaissant le chef de l’Etat marocain, on pouvait, voire devait, s’attendre à quelque chose. Et ce quelque chose s’est produit, une semaine après le départ de la famille royale de Cuba. L’annonce de la reprise des relations diplomatiques a été décidée, et actée, ce vendredi 21 avril.

Voici le communiqué du ministère des Affaires étrangères à Rabat : « Un Communiqué Conjoint a été signé, à cet effet, entre les Missions Permanentes des deux pays auprès de l’Organisation des Nations Unies à New York, prévoyant notamment le rétablissement des relations diplomatiques au niveau des Ambassadeurs.

Cette décision s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre des Très Hautes Orientations Royales pour une diplomatie proactive et ouverte sur de nouveaux partenaires et espaces géographiques.

Dans ce contexte, Sa Majesté le Roi, que Dieu L’assiste, a bien voulu donner Ses Très Hautes Instructions à l’effet de l’ouverture prochaine d’une Ambassade du Royaume du Maroc à La Havane ».

Et voici le communiqué de la diplomatie cubaine : « Au siège de la Mission permanente de Cuba auprès de l'Organisation des Nations Unies a eu lieu aujourd'hui la cérémonie de signature de la reprise des relations diplomatiques entre le Gouvernement de la République de Cuba et le Gouvernement du Royaume du Maroc.

Ce sont les deux représentants permanents de leurs pays, ambassadeurs extraordinaires et plénipotentiaires Anayansi Camejo Rodriguez pour la partie cubaine et Omar Hilale pour le Maroc, qui ont signé l’accord de reprise des relations diplomatiques.

Les deux gouvernements sont guidés par le désir mutuel de développer des relations amicales et une coopération entre les deux pays dans les domaines politique, économique, culturel et autres.

Avec cet accord, les deux pays ont ratifié le rétablissement des relations diplomatiques, conformément aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies et du droit international et conformément à l'esprit et les règles énoncées dans la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961 ».

Ce n’est donc pas l’amour fol, à la lecture des deux communiqués plutôt froids. Mais l’essentiel est là. Le Maroc a réussi une intrusion dans le carré algérien et après le réchauffement des relations avec le Nigéria, autre allié stratégique d’Alger dans l’affaire du Sahara, c’est maintenant au tour de Cuba. Les relations diplomatiques avaient en effet été rompues en 1981, de manière plutôt brutale, quand Rabat avait expulsé le représentant de Fidel Castro après que celui-ci ait reconnu la RASD.

Sauf que...

pour l’Etat des Caraïbes, tout reste à faire, cette reprise des relations n’étant que le premier pas, mais un pas de géant. Mohammed VI, semble-t-il, ne prend pas de vacances… Il change juste sa tenue vestimentaire, tout en travaillant.

En plus d'être un soutien historique du Polisario, avec l'Algérie et l'Afrique du Sud. Les premières tensions entre les deux pays remontent à 1963, lors de la « guerre des sables » en 1963 entre le Maroc et l'Algérie où Cuba avait apporté son aide à Alger. Les deux pays se sont également affrontés au Congo (encore Zaïre à l'époque) où Rabat se trouvait dans le camp de Kinshasa et La Havane soutenait les sécessionnistes du Katanga.

Quel ambassadeur marocain pour La Havane ?

Dans le choix du représentant diplomatique marocain, et sachant que tout reste à faire pour un véritable réchauffement, le profil de l’ambassadeur sera crucial car c’est lui (ou elle) qui travaillera à l’instauration de véritables « relations amicales ».

Après la longue période de règne de Fidel Castro, et avec les dix dernières années de son frère Raul à la tête de l’Etat, il faut savoir que Cuba a un certain leadership en Amérique Latine. Son aura est d’avoir tenu tête aux puissants Etats-Unis. Et cette aura, bien qu’elle se soit un peu ternie avec les outrages du temps et les avancées du libéralisme, est toujours bien présente dans les esprits de là-bas et d’ailleurs.

L’ambassadeur marocain devra donc, en plus d’être parfaitement hispanophone, maîtriser les modes de fonctionnement et les codes latino-américains, les organismes économiques et politiques, les sensibilités entre nations, les types de relations personnelles entre dirigeants… Et il est important de garder en tête que Cuba a fait de la question de la femme une priorité, avec un succès inégal mais un succès quand même, salué un peu partout dans le monde.

La moitié du Conseil d’Etat est composé de femmes, de même qu’au parlement, presque la moitié des membres sont des femmes (3ème  rang mondial), de même que dans le Comité central du parti. Au gouvernement, et bien qu’il n’existe aucune loi sur la parité, 25% des ministres sont des femmes…  10 assemblées provinciales sur 15 sont présidées par des femmes… et, à quelques variantes près, la prééminence des femmes dans le continent est une réalité.

Le profil idéal, donc, pour le futur ambassadeur du Maroc à La Havane serait que ce soit une femme, hispanophone, bien au fait des pratiques et coulisses politiques latino-américaines. Notre diplomatie dispose-t-elle d’un tel profil ? Certainement, en cherchant bien…

AB

Commentaires