Les nouveautés du rapport de l’ONU sur le Sahara

Les nouveautés du rapport de l’ONU sur le Sahara

Lundi 10 avril, le secrétaire général de l’ONU a fait parvenir aux membres du Conseil de sécurité son rapport sur la situation qui prévaut au Sahara, en vue du renouvellement du mandat de la Minurso pour un an. Antonio Guterres introduit, pour le référendum, une notion fondamentale, celle de « la nature et la forme » de cette opération. Ce rapport intervient à l’aune de plusieurs éléments nouveaux.

Ainsi, l’ONU a un nouveau secrétaire général, Antonio Guterres. L’ancien premier ministre portugais connaît mieux la région que son prédécesseur sud-coréen Ban Ki-moon. Il est aussi ancien haut-commissaire des Nations Unies pour les réfugiés et à ce titre, il a eu à visiter plusieurs fois les camps de Tindouf, où il a réclamé, mais en vain, un recensement des populations. De guerre lasse, et lassé par les refus d’Alger de procéder à ce recensement, il a avancé le chiffre de 90.000 personnes.

Ensuite, les Etats-Unis ont également un nouveau président. Mais Donald Trump ne connaît pas beaucoup la région et sa ligne diplomatique dans le conflit du Sahara n’est pas encore connue. On attendra de voir le draft de la résolution à venir, que Washington a l’habitude de rédiger et de remettre aux membres du Conseil de sécurité pour discussion.

Enfin, le Polisario, lui aussi, a un nouveau chef, Brahim Ghali, qui essaie d’asseoir sa légitimité au roulement des tambours, comme l’indique sa politique à Guergarate, et la présence de ses éléments armés, en plus de son refus d’obtempérer aux injonctions de Guterres de se retirer de la zone tampon qui sépare le Maroc et la Mauritanie.

Par ailleurs, le Maroc a fait une entrée aussi réussie et spectaculaire que remarquée au sein de l’Union africaine, avec la ferme résolution de régler le problème du Sahara au sein de cette instance panafricaine. Rabat a de plus demandé son intégration au sein de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest, la Cédéao.

Autant d’éléments nouveaux qui influeront sans nul doute sur la nature de la résolution onusienne attendue fin avril.

La résolution

Les préambules

Antonio Guterres revient longuement sur la crise de Guergarate, en expliquant l’évolution des événements, depuis août 2016 quand le Maroc avait entamé les travaux d’asphaltage des 4 km qui séparent le Maroc de la Mauritanie.

Puis le rapport poursuit sur la description de la situation et des événements qui se sont produits durant ces derniers mois, jusqu’à préciser que la situation devenait difficile, avec les dommages causés par les éléments du Polisario aux véhicules portant des insignes marocains. Guterres indique que le Maroc considère ces actes comme inacceptables et qu’il a saisi l’ONU pour intervention,  ce qui a induit le communiqué du 25 février où le Secrétaire général demande le retrait des forces des deux parties. Guterres  précise que le 26, le lendemain, le Maroc a obtempéré, mais que le Polisario a refusé, souhaitant lier le recul de ses troupes à l’ensemble du processus de négociation et de « décolonisation » (entre guillemets dans le rapport).

Concernant le retour de la totalité des membres de la Minurso, le secrétaire général informe le Conseil de sécurité que le Maroc lui a confirmé que les 17 derniers fonctionnaires retrouveront leurs affectations, ainsi que cela a été mentionné par le Maroc qui, de fait, ne se trouve plus en situation d’infraction par rapport à la résolution 2285.

Le rapport mentionne également l’activité de Christopher Ross, et les réticences du Maroc à le recevoir, en raison de son attitude partiale en faveur du Polisario, tout en précisant qu’en marge de la COP22, le roi Mohammed VI avait reprécisé à Ban Ki-moon la disposition du Maroc à œuvrer à une résolution du conflit avec les Nations Unies.

Puis Antonio Guterres explique qu’il a reçu le chef du Polisario et lui a signifié sa déception de ne pas voir le Front respecter l’injonction de se retirer de Guergarate, ajoutant qu’il lui a promis son engagement sincère dans la résolution...

du conflit, mais à condition que les parties fassent preuve de bonne foi et affichent de bonnes dispositions.

Au chapitre des aides, le secrétaire général rappelle la nécessité de procéder à un recensement des populations de Tindouf, précisant qu’à défaut c’est le nombre de 90.000 qui sera retenu. Mais il relève aussi les cas de malnutrition et de mauvais traitements, précisant que « les taux d'anémie chez les femmes et les enfants ont considérablement augmenté et que la malnutrition chez les femmes enceintes et allaitantes devient préoccupante ».

Concernant les droits de l’Homme, Guterres affirme que la situation s’est nettement améliorée au Maroc, même s’il reste des cas préoccupants, sans autre précision, sauf en ce qui concerne des mauvais traitements subis, en particulier « dans le cas de personnes soupçonnées de terrorisme ou mettant en danger la sécurité de l'État ou posant Une menace pour «l'intégrité territoriale de l'État», que le Maroc définit comme incluant le Sahara occidental ».

Les recommandations du rapport

« Le conflit sur le statut futur du Sahara occidental doit se terminer le plus tôt possible pour permettre à la région de faire face aux menaces de sécurité, aux défis économiques et aux souffrances humaines de manière coordonnée et coopérative. Les efforts des Nations Unies, y compris ceux de mon Envoyé personnel, de la MINURSO, et des organismes présents restent très pertinents.

Dans une série de résolutions commençant en 2007, le Conseil de sécurité a ordonné au Secrétaire général de faciliter les négociations directes entre les parties pour parvenir à "une solution politique mutuellement acceptable, qui prévoit l'autodétermination du peuple du Sahara occidental ". Au fil des ans, le Conseil a fourni de nombreuses indications pour que les négociations se déroulent sans conditions préalables, de bonne foi, compte tenu des efforts déployés depuis 2006 et des développements ultérieurs et du travail avec le réalisme et un esprit de compromis ».

« La difficulté fondamentale est que chaque partie a une vision et une lecture différentes de l'histoire et des documents qui entourent ce conflit. Le Maroc insiste sur le fait que le Sahara occidental fait déjà partie du Maroc, que la seule base pour les négociations est son initiative d'autonomie sous la souveraineté marocaine et que l'Algérie doit être partie à ces négociations. Le Front Polisario insiste sur le fait que, puisque l'Assemblée générale identifie le Sahara occidental comme un territoire non autonome, sa population autonome doit décider de son avenir dans un référendum avec l'indépendance en tant qu'option ».

« Sur la base des consultations avec les parties et les États voisins, les membres du Groupe d'Amis sur le Sahara Occidental et le Conseil de sécurité, ainsi que d'autres parties prenantes importantes, j'ai l'intention de proposer que le processus de négociation soit relancé avec une nouvelle dynamique et un esprit nouveau, qui reflète les orientations du Conseil, dans le but d'aboutir à une solution politique mutuellement acceptable qui comprend la résolution du différend sur le statut ultime du Sahara occidental, y compris en accordant sur la nature et la forme de l'exercice de l'autodétermination. Pour que les progrès soient réalisés, les négociations doivent être ouvertes aux propositions des deux parties et aux idées. L'Algérie et la Mauritanie, en tant que pays voisins, peuvent et doivent apporter une contribution importante à ce processus ».

« J'apprécie la réponse positive du Maroc à mon appel à ce que les deux parties se retirent de la bande tampon de Guergarate et reste profondément préoccupé par la présence continue des éléments armés du Front Polisario et par les défis que cela pose à la raison d'être de la zone tampon, y compris l'attente de créer une zone exempte de présence directe des parties au conflit ou de contact direct entre elles. Reconnaissant que la situation actuelle risque une panne du régime de cessez-le-feu, je demande au Conseil de sécurité d'exhorter le Front Polisario à se retirer complètement et inconditionnellement de la bande tampon de Guergarate ».

Aziz Boucetta

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