Le Maroc réagit contre les atermoiements et le flou de l’Union européenne

Le Maroc réagit contre les atermoiements et le flou de l’Union européenne

Le 21 décembre 2016, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avait annulé l'arrêt rendu par son tribunal le 10 décembre 2015, et qui avait conclu à l'annulation partielle de l'accord agricole passé entre le Maroc et l'UE. La Cour européenne avait  alors considéré comme irrecevable le recours du Polisario. Mais il semblerait que le flou persiste, les membres de l’UE soufflant le chaud et le froid pour cette décision. Le ministère de l’Agriculture d’Aziz Akhannouch vient de faire une mise au point. Musclée.

« Le Maroc et l’UE sont liés par un accord agricole dont l’application est effective sur le territoire du Royaume du Maroc, et ce, malgré un épisode judiciaire qui a, en toute logique, confirmé le protocole agricole entre le Maroc et l’Union Européenne », explique le ministère, ajoutant qu’ « ainsi, celui-ci doit désormais s’appliquer conformément à l’esprit qui a présidé à sa négociation et sa conclusion ».

Une source au sein du ministère nous explique que la décision de la CJUE doit être appliquée dans son ensemble, et pas en sélectionnant ses attendus, chacun de ces derniers pouvant arranger les positions et attitudes des membres de l’Union.  « C’est inadmissible », tempête cette source.

Et pour être encore plus clair, le ministère de l’Agriculture ajoute que « la Commission Européenne ainsi que le Conseil Européen ont la responsabilité de neutraliser les tentatives de perturbation par des positions et un discours clairs et cohérents avec des décisions que ces instances ont, elles-mêmes, portées et adoptées ». Cohérents, dans le sens où ce qu’il reste de pays dans l’UE doivent dérouler le même discours.

Le ministère précise, à toute fin utile, que « toute entrave à l’application de cet accord est une atteinte directe à des milliers d’emplois d’un côté comme de l’autre dans des secteurs extrêmement sensibles ainsi qu’un véritable risque de reprise des flux migratoires que le Maroc, au gré d’un effort soutenu, a réussi à gérer et à contenir ».

C’’est la première fois que le royaume fait une allusion aussi directe, et sur un ton aussi comminatoire, aux efforts qu’il a consentis pour endiguer les flux migratoires. Un (très) haut responsable marocain avait indiqué en privé voici quelques mois que « si le Maroc se contentait de sécuriser le passage des migrants subsahariens et de se contenter d’assurer l’ordre public au...

Maroc, l’Europe se trouverait face à un risque migratoire bien plus important que celui en provenance de Syrie et transitant par la Turquie ».

Et donc, ce qui a suscité l’ire du ministère d’Akhannouch est que des produits marocains peuvent être bloqués à l’entrée du territoire de l’Union européenne, selon une logique désormais inacceptable. « De telles nuisances mettent en péril un édifice de coopération construit sur de nombreuses années ne laissant de choix au Maroc que de s’en détourner au profit d’une accélération de partenariats initiés dans des pays et régions diverses notamment la Russie, la Chine, l’Inde, le Japon, les pays du Golfe ainsi qu’auprès de nos voisins africains ». En un mot, comme en cent, l’Europe continue de vivre dans l’idée qu’hors elle, c’est le chaos. Et Rabat fait bien de lui rappeler les autres partenariats du Maroc, ainsi que son nouveau statut africain et les efforts déployés pour mettre en place « une agriculture africaine performante à travers l'assistance technique, l’accès aux engrais et l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire ».

Et le mot de la fin, qui s’annonce comme annonciateur de la… fin des relations entre deux partenaires historiques : « L’absence d'un engagement franc de la part de l'UE imposera au Maroc un choix décisif où il sera question de préserver un partenariat économique patiemment entretenu ou de s'en défaire sans retour pour se focaliser sur la construction de nouvelles relations et circuits commerciaux ».

En clair, c’est tout ou rien, et rien signifie vraiment rien, c’est-à-dire aucune relation, et sans espoir de faire machine arrière.

Interrogé suite à la parution de son communiqué, le ministre de l'Agriculture Aziz AKhannouch a expliqué que « l’UE doit dire clairement et sérieusement si elle veut un partenaire solide et crédible et avec qui elle veut travailler ». Ce très sévère rappel à l'ordre du Maroc en direction de l'UE intervient et s'explique par une récente déclaration du Commissaire européen chargé de l'action pour le climat et de l'énergie, qui répondait à une question de députés européens sur la collaboration future entre des pays de l'UE et le royaume. Il avait dit que cela sera fait dans le cadre d'une distinction et d'une séparation nettes entre le Maroc et le territoire du Sahara occidental, ce qui avait suscité la colère de Rabat, puis le communiqué d'Akhannouch.

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